Trier ses chaussettes grâce à une application, lancer le ménage de la maison en un clic, faire des achats en appuyant sur un simple bouton, demander à un professionnel de draguer sur internet à sa place… Voilà l’expérience à laquelle le journaliste Nicolas Santolaria s’est livré durant un an. En est né un livre, Comment j’ai sous-traité ma vie aux Editions Allary.
Il a relayé son expérience, sans pour autant donner une idée du coût total. "Je disposais d’une enveloppe de 2.000 euros allouée par l’éditeur pour faire l’expérience. je n’ai pas véritablement chiffré la chose, d’autant qu’il y a des expériences que je n’ai pas menées sur l’année entière, comme celle de me faire livrer des plats préparés tous les jours, toute l’année. C’est un coût exorbitant."
Ce qui a coûté le plus cher, selon lui, c’est la "délégation de la drague. Le forfait est d’à peu près 500 euros. J’étais étonné par le coût assez réduit de certains services, notamment dans les tâches cognitives sur 5euros.com qui permet de sous-traiter certaines tâches professionnelles comme la transcriptions d’interviews. Par exemple, j’ai sous-traité une de mes chroniques, avec l’accord du journal, à une personne. Il m’en a coûté 5,10 euros. J’étais étonné de la qualité du rendu, il n’y avait pas de faute d’orthographe, le sujet était bien creusé. Il y a une forme de dévaluation du travail cognitif avec l’émergence du travail à la tâche…"
Il dénonce
A-t-il gagné plus de temps en sous-traitant sa vie ? "Je n’ai pas le sentiment d’avoir véritablement gagné du temps. Quand on gère sa vie de manière classique, on est dans une forme de continuum où on gère des tâches pas toujours passionnantes. Or, là, c’est un autre rapport à son existence. On scinde sa vie en deux choses : des moments prétendument nobles qu’on accepte de vivre et d’autres jugés sans intérêt, qu’on préfère déléguer, avec une idée de rentabilité. Le fait de saucissonner sa vie en différents dossiers à gérer, c’est quelque chose de très pénible : on doit s’assurer que chaque dossier avance, que les sous-traitants ont fait leur travail, que les trucs commandés sont bien arrivés ce qui est rarement le cas. On se retrouve à dialoguer avec des services après-vente situés dans d’autres pays, comme par exemple pour les chaussettes. Ça devient kafkaïen : ce qui était censé vous faire gagner du temps vous en fait perdre énormément par ailleurs. L’idée de déléguer sa vie devient un boulot à plein-temps."