La face cachée de Bart De Wever: "J’étais prêt à mettre un by-pass gastrique"
Bart De Wever a fait de la santé une de ses priorités.
Publié le 17-04-2018 à 06h36 - Mis à jour le 17-04-2018 à 12h08
Bart De Wever a fait de la santé une de ses priorités. SPQA. Une version anversoise du célèbre Senatus populusque romanus (NdlR : le Sénat et le peuple romain) est imprimée sur le t-shirt de Bart De Wever. Sa célèbre passion pour la Rome antique s’étend même à son sport.
Le bourgmestre d’Anvers partage avec les Romains ce culte de l’esprit sain dans un corps sain. Un objectif vers lequel tend Bart De Wever depuis sa transformation physique entamée en 2011.
"Je suis, depuis, encore plus convaincu qu’avant que ceux qui ont dit Mens sana in corpore sano avaient totalement raison. Quand le corps fonctionne bien, on est plus dur, plus affûté mentalement."
Pourquoi la planète s’est-elle mise à courir il y a quelques années ?
"Par facilité, car c’est un sport qu’on peut pratiquer partout. Mais plus que cela, le running traduit un changement de mentalité. Tout le monde est actif, court et s’entraîne en ville. J’ai vraiment remarqué ça aux États-Unis. C’est pareil à Manhattan qu’à San Francisco. On y croise beaucoup moins de personnes obèses. Vous savez que pour la première fois de l’histoire, le nombre de McDonald’s est en recul à Manhattan ? À la place, on voit fleurir des bars bio. C’est une énorme évolution qui touche les élites urbaines. Maintenant, il faut l’étendre à toute la population, ne pas créer un fossé entre les plus aisés et les moins bien lotis."
Il est donc important que vous, les politiciens, montriez l’exemple ?
"C’est clair qu’on peut être utiles dans ce sens. Actuellement, la Belgique et le monde grossissent. Cela devient épidémique au point que, dans le monde, il y a plus de personnes en surpoids que de personnes qui ont faim."
Pourquoi avez-vous décidé, en 2011, de vivre plus sainement ?
"Je suis sorti extrêmement frustré des négociations pour le gouvernement. J’avais beaucoup mangé à cette période-là. J’étais gros et avais besoin de changer de façon de vivre."
C’est Chris Goossens, le nouveau médecin du club de football d’Anderlecht, qui vous a aidé…
"J’ai pris rendez-vous chez lui. J’étais prêt à mettre un by-pass gastrique. Il m’a convaincu de ne pas le faire. Il m’a dit de changer ma façon de manger et de faire du sport. Je n’ai jamais été un sportif et je n’en suis toujours pas un. Mais le sport fait partie d’une discipline de vie."
Vous n’êtes donc pas devenu un addict du running ?
"Non, c’est un devoir pour rester en forme. Je dois d’ailleurs me fixer des objectifs pour me maintenir en forme. J’ai besoin d’une motivation externe."
Vous avez commencé à vous afficher en 2012 avec les 10 Miles d’Anvers. Avez-vous eu peur de ne jamais y arriver ?
"Je faisais 143 kilos et j’avais perdu 60 kilos en six mois. Personne ne croyait que je pouvais finir. J’ai mis plus de deux heures. L’année d’après, j’ai fait 1h30 puis 1h26."
Tout le monde se pose la question : quel est votre secret ?
"Il n’y en a pas. C’est une question de discipline. Le mètre le plus difficile, c’est celui jusqu’à la porte. Mais là, durant mon entraînement pour le marathon d’Anvers, j’ai pris un peu de poids. C’est normal, quand on fait beaucoup de sport, on a faim (rires) ."
"Être gros n'est pas un désavantage"
Avant d’être ambassadeur d’Antwerpen Loopt, Bart De Wever n’avait jamais osé se mettre en avant et servir de symbole à ceux qui cherchent à perdre du poids. "Une voix dans ma tête me disait que le risque était trop grand, confie-t-il. Je devais me méfier, car je pouvais à tout moment regrossir. Tout le monde se serait moqué de moi."
Il considère que son ancien poids n’était pas un souci dans sa carrière politique. "Être gros n’est pas un désavantage en politique. Regardez Maggie De Block. Elle a une image très positive. Les gens apprécient les politiciens avec des formes. Maigrir pour être populaire n’est pas une bonne idée. Le seul moyen d’en tirer parti est de surfer sur le changement avec un slogan du type ‘La force du changement’. En être la preuve vivante devient dès lors utile."
"Arrêter de boire a vraiment été difficile"

Bart De Wever n’a plus touché une goutte d’alcool depuis novembre 2011.
"J’ai pris une bouteille dans un restaurant que j’aime beaucoup et je me suis dit que c’était la dernière de toute ma vie."
Bart De Wever a souvent confié qu’il buvait régulièrement de l’alcool par le passé. Depuis le 19 novembre 2011, c’est terminé.
Comment avez-vous procédé ?
"J’ai tout arrêté d’un coup. Sans concession."
Avez-vous bien vécu cette transition ?
"Les premiers mois ont vraiment été difficiles, je dois être honnête. J’ai ensuite perdu l’habitude de la boisson. Après six mois, il y avait déjà une nette évolution. Au bout d’un an, l’idée de boire de l’alcool m’était devenue totalement étrangère."
Comment êtes-vous certain de ne jamais plus boire une seule goutte ?
"C’est une question de volonté et de discipline."
N’était-ce pas difficile à gérer en tant qu’homme politique ? Vous avez un métier qui prête à la boisson, via les différentes réceptions, etc.
"Au début, ce n’était pas simple. Les gens me tendaient un verre et je devais à chaque fois m’expliquer."
Vous comprenaient-ils ?
"Ils étaient très surpris en général. Certains me forçaient même un peu la main en m’en proposant quand même. J’ai déjà eu des gens qui m’ont dit ‘Le régime est terminé, donc prends un verre.’ Ce n’était pas pour m’ennuyer, mais bon…"
Combien de temps a-t-il fallu pour que cela soit accepté ?
"Deux ans. Maintenant, quand j’arrive quelque part, on me tend un Coca Zéro." (rires)
"Je prends des notes quand je rentre de mon jogging"
Bart De Wever considère que la pratique du running aide à la réflexion
Des études récentes ont prouvé que courir à 10 km/h sans musique et sans parler offre une énorme capacité de réflexion au runner.
Bart De Wever a, lui, besoin de puiser dans ses réserves et d’aller repousser ses limites pour ressentir cet effet, notamment lié aux endorphines, ces hormones qui procurent une sensation d’euphorie dans la pratique du sport.
"Courir, c’est réfléchir avec les jambes", affirme le bourgmestre d’Anvers. "En courant une vingtaine de kilomètres, j’ai l’impression que mon corps rentre dans une zone où l’esprit est totalement libéré. C’est difficile à décrire car c’est une sensation particulière. L’esprit se balade librement et se détache des soucis du quotidien. C’est un moment pour réfléchir et rêver."
Le président de la N-VA avoue même avoir eu des idées grâce à ses sorties de course à pied. "Je prends parfois des notes quand je rentre de mon jogging."
Pour beaucoup , courir permet de se sortir des tracas, d’oublier les soucis. Ce n’est pas le cas pour Bart De Wever. "J’ai tellement l’habitude de la pression du quotidien. Je n’ai pas besoin de courir après de longues négociations. Il en faut beaucoup pour m’énerver."

"Je serais riche en donnant des conférences"
Bart De Wever a publié un livre au sujet de son régime. Une partie des bénéfices a été versée à l’auteur, l’autre à une association.
Il est pourtant conscient que son histoire peut facilement se monnayer. "Mon médecin m’a dit que si je voulais devenir riche, je devais arrêter la politique et donner des conférences en Europe. Expliquer aux gens comment j’ai perdu du poids et comment je suis parvenu à terminer un marathon. Les gens pensent qu’il y a un grand secret, mais ce n’est pas le cas."
La Dernière Humeur : De Wever, l'homme que les francophones aiment haïr
Un commentaire de Géry De Maet.
Dans l’entre-deux-guerres, les studios de cinéma présentaient au public l’inquiétant acteur Erich Von Stroheim comme " l’homme que vous aimerez haïr ".
Un slogan que l’on croirait taillé sur mesure pour Bart De Wever tant l’homme fort de la N-VA a l’art depuis une dizaine d’années de hérisser l’opinion francophone chaque fois qu’il prend la parole.
Bien sûr, il existe aussi une partie non négligeable de la population au sud du pays pour adhérer à la politique du bourgmestre d’Anvers.
Autant son combat pour l’indépendance de la Flandre peut choquer les bons Belges, autant ses attaques contre la toute-puissance des syndicats, l’islamisme ou l’insécurité trouvent un certain écho.
Il est vrai qu’à Bruxelles et en Wallonie, Bart De Wever n’a pas d’équivalent. Les rares hommes politiques qui s’aventurent sur son terrain - Mischaël Modrikamen, Alain Destexhe - sont traités en pestiférés dans les médias ou même dans leurs propres partis.
Depuis quatre ans, le MR a fait le pari de s’allier avec la N-VA pour gouverner le pays. Une politique qui se traduit par une embellie de l’emploi, mais dont c’est principalement la Flandre qui profite.
Tout porte à croire que l’an prochain, Bart De Wever sera toujours un partenaire incontournable. Mais quel parti francophone sera prêt à lui tendre la main si le MR ne suffit plus à la tâche ? Une question qui pourrait déterminer l’avenir du pays.