C’est à cet homme qu’on doit l’invasion de perruches à Bruxelles et en Belgique: "Ouvrez, ouvrez la cage aux oiseaux"
L’ancien directeur du parc Meli les a libérées dans la nature, sans regrets.
- Publié le 05-07-2019 à 14h01
- Mis à jour le 05-07-2019 à 17h30
:focal(899x457:909x447)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/QWFBXURLGZHNPMZWM3VXPSEF4M.jpg)
L’ancien directeur du parc Meli les a libérées dans la nature, sans regrets. Il y a 45 ans, alors qu’il est le directeur du parc Meli à Bruxelles, Guy Florizoone a relâché 50 perruches dans la nature. Depuis, ces oiseaux au plumage vert ont élu domicile dans plusieurs parcs flamands et bruxellois. Leur nombre est aujourd’hui estimé à 20 000, même si les scientifiques ont arrêté de compter…
Malédiction pour certains, ambiance exotique pour d’autres… "Si je me sens responsable ? Bien sûr que non. Presque tous les éleveurs d’alors ont libéré leur surplus de perruches, s’explique Florizoone, pour la première fois. Même si j’ai bien sûr beaucoup appris de cette expérience."
Guy Florizoone, 75 ans, était entre 1973 et fin 1986 directeur de Meli Heysel, un parc d’attractions situé près de l’Atomium, avec sa foire, ses restaurants, une plaine de jeux et un petit zoo focalisé sur les oiseaux exotiques.
Ce temps est révolu . Guy et sa femme apprécient désormais les grands espaces du fin fond du Westhoek. Là, des moineaux pépient dans la haie et l’on peut entendre le roucoulement d’un pigeon ramier. Pourtant, aucune perruche hurlante ne survole (encore) les environs.
"Dans notre parc, les visiteurs pouvaient observer un grand nombre d’oiseaux, dans les volières", raconte Florizoone. De temps à autre, un spécimen s’échappait, mais aucun n’avait été libéré intentionnellement.
Tout change en 1972, au moment où Pierre Perret sort son tube "La Cage aux oiseaux". "Ouvrez ouvrez la cage aux oiseaux, regardez-les s’envoler c’est beau, chante Guy, en continu. La chanson raconte l’histoire de petits oiseaux enfermés qu’on est appelé à relâcher. Eh bien, cela a lancé une hype. Des jeunes se sont introduits dans le parc la nuit pour ouvrir les volières et laisser les oiseaux s’envoler." Une visite au Parrot Zoo de Miami, en Floride, marque Guy au point qu’il change totalement son fusil d’épaule. "Les perroquets pouvaient y voler librement et je rêvais de faire la même chose à Bruxelles : plus de volières, mais des oiseaux en totale ou semi-liberté, tout en tenant compte de la différence de climat, évidemment. Le problème : quand on ouvre une volière, l’oiseau s’en va et ne revient plus. Pas pratique, quand on gère un parc dont le thème est centré sur les oiseaux ! C’est pourquoi nous avons commencé à expérimenter.
Le but était de laisser les oiseaux en liberté, mais en les gardant près de nous afin qu’ils aient le temps de s’habituer à leur nouvel environnement, plus spacieux. Les premiers tests furent effectués avec des perruches. Lors d’une première expérience, nous leur avons coupé les ailes. Elles ne purent ainsi pas voler pendant un an, mais se sont également et malheureusement révélées très vulnérables. Lors d’une seconde expérience, nous avons graissé les ailes des perruches avec du savon noir. Mais cette expérience ne fut pas convaincante non plus, car suite à de fortes averses le savon avait été dissous."
"La meilleure méthode a finalement été celle où on les laisse en volière. Quand leurs petits naissaient, on ouvrait une porte. Les perruches se libéraient, mais revenaient à l’intérieur pour s’occuper de leurs bébés. Lors d’une étape suivante, nous avons construit un étang en béton, avec une île au milieu dans laquelle des trous avaient été percés pour qu’elles pondent et grandissent. Les perruches sont des animaux très intelligents. Un hiver, nous avons vidé l’étang, pour éviter qu’il ne gèle et que le béton n’explose. Le lendemain, les perruches s’étaient envolées. Ce n’est que lorsque nous avons rerempli l’étang et que le danger était écarté qu’elles sont revenues."
Les scientifiques pensent qu’il y aurait entre 18 000 et 20 000 perruches dans les parcs bruxellois et flamands. "Le nombre continue d’augmenter, s’étonne Guy Florizoone. J’ai toujours cru qu’elles arriveraient à un équilibre naturel. Vous savez, j’ai reproduit l’expérience dans notre parc d’Adinkerque. Mais cela a été un échec total. Je pense que les amoureux des oiseaux de la région ont pensé : mieux vaut qu’ils soient dans ma volière que dans le ciel ! (rires)"
Pourtant, "les expériences dans le parc Meli ont bien sûr contribué à la propagation de la perruche, mais ce n’est en aucun cas la seule cause", déclare Diederik Strubbe, chercheur à l’UGent. "Au cours de mes recherches, beaucoup de Bruxellois sont venus me dire spontanément qu’ils avaient sorti leur perruche parce qu’ils trouvaient triste que leur perruche soit dans une cage et non avec ses pairs dans un parc de Bruxelles. Nous avons mené des recherches sur la diversité génétique et celle-ci semble être aussi vaste qu’en Afrique centrale et en Inde, d’où elles sont originaires. Autrement dit, les perruches qui volent en Flandre ont des origines très différentes et ne sont pas toutes descendantes des Meli."