Pénurie de personnel soignant à l’Institut royal pour Sourds et Aveugles: "Des enfants fragiles risquent le décrochage scolaire"
Manque de soignants à l’Institut royal pour sourds et aveugles, où l’on protège les plus fragiles de notre société.
Publié le 13-09-2022 à 14h00 - Mis à jour le 13-09-2022 à 14h02
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Nous manquons d'éducateurs, de médecins, d'infirmières ainsi que de quelques enseignants. Nous l'avons fait savoir mais nous recevons peu de réponses. En ce qui nous concerne, une société qui va sacrifier ses membres les plus fragiles n'est pas une société dans laquelle les acteurs de l'Irsa veulent vivre."
Ainsi parle Rose Romain, la nouvelle directrice générale de l'Institut royal pour sourds et aveugles, cette institution qui propose, à Uccle, les services les plus complets autour des personnes extraordinaires. L'Irsa, qui accueille plus d'un millier de "bénéficiaires", cherche à renforcer ses équipes. Ce n'est manifestement pas facile. " Nous recherchons, depuis janvier, un médecin coordinateur pour être au plus près des besoins médicaux rencontrés par les enfants et les adultes porteurs de handicaps. La place reste vacante. Nous recherchons aussi des médecins disposés à donner de leur temps, par exemple une demi-journée par semaine, pour consulter sur le site de l'institution. Nous parlons bien sûr de médecins qui seront rémunérés. Nous n'avons pas de réponses. Nous recherchons aussi des infirmiers et des aides-soignants."
Le monde du grand handicap n'attire manifestement pas. "Nous avons cherché via les canaux classiques, les réseaux sociaux, en utilisant les agendas personnels et en lançant des bouteilles à la mer tous azimuts. Nous n'avons pas reçu de réponses, ou peu. Alors qu'il y a urgence pour les personnes en situation de fragilité à l'Irsa et pour leurs familles."
Si rien n'entame l'enthousiasme de Rose Romain, on sent la directrice interpellée et préoccupée. " C'est comme si notre société n'était plus capable d'apporter aux personnes différentes ce dont elles ont besoin. À l'Irsa, nous sommes tous des convaincus. Chacun des acteurs présents ici est d'abord et avant tout animé par l'humain. Mais notre société est-elle, elle, suffisamment animée par sa propre humanité ? Je suis persuadée que oui. Si nous avons ces difficultés, c'est peut-être en partie parce que le projet de rejoindre l'Irsa n'est pas celui auquel on pense spontanément. Et là, on fait erreur. Rejoindre l'Irsa, c'est allier travail et plaisir. Ici, on ne se pose pas la question de savoir pourquoi chaque jour on se lève, c'est une évidence."
Ne pas connaître la langue des signes serait-il un obstacle ? Rose Romain répond qu'en partenariat avec l'UCL, l'Irsa propose un catalogue de formations gratuites dans lequel on retrouve des cours d'apprentissage à la langue signée et, de manière plus générale, d'approche des communautés sensoriellement différentes. " En réalité, nous ne cherchons pas en priorité des experts, mais des personnes prêtes à s'investir, à se former pour devenir des spécialistes du monde du handicap. L'Irsa est un condensé. Tout est concentré. À l'Irsa, on touche à tous les domaines dont le jeune différent a besoin."
Chaussée de Waterloo 1504 à Uccle, dans un cadre exceptionnel jouxtant la forêt de Soignes, l'Irsa dispose de plusieurs bâtiments ultramodernes. Mais les défis ne manquent pas. Outre les équipes à renforcer, l'institution est impactée par la problématique du manque de chauffeurs pour le transport scolaire de jeunes handicapés. "Sur Bruxelles, nous avons actuellement deux circuits qui ne roulent pas. Avec pour conséquence que des jeunes n'arrivent plus à l'Irsa, sauf si les parents ont pu trouver une solution. Avoir un enfant différent est un combat énorme. Un combat auquel il ne faut pas ajouter des difficultés pratiques. Ici, des enfants fragiles qui risquent le décrochage scolaire."