Bart De Wever : “On pourrait encore prolonger le réacteur nucléaire de Tihange 2 pendant 40 ans”
”Il existe une majorité pour changer la loi sur la sortie du nucléaire”, affirme le président de la N-VA.
Publié le 31-01-2023 à 17h43 - Mis à jour le 31-01-2023 à 19h00
Tihange va souffler une de ses bougies dans la nuit de mardi à mercredi. À 23h59, l’arrêt du réacteur numéro 2 sera enclenché, au grand désespoir d’une série d’adeptes du nucléaire. Avec Doel 3 en septembre dernier, c’est le deuxième réacteur belge qui sera mis à l’arrêt après 40 ans de service.
Dans la journée, plus d’une centaine de personnes se sont réunies sur les bords de Meuse, sur la rive opposée à la centrale, pour appeler à l’annulation de cette décision, cette application de la loi révisée de sortie du nucléaire. Parmi eux, se trouvait Bart De Wever, escorté d’une série de députés N-VA, comme Bert Wollants, Theo Francken ou encore Darya Safai.
”Fermer une centrale nucléaire dans le monde actuel, c’est vraiment de la folie”, déplore le leader des nationalistes flamand. “Ce type de centrale est prolongée aux États-Unis jusqu’à 80 ans, donc on pourrait encore produire de l’énergie propre bon marché pour 40 ans, sans problème. À Borssele, aux Pays-Bas, il y a une centrale de ce type plus vieille que celle de Tihange que l’on garde encore ouverte.”
Marie-Christine Marghem était également sur place. L’ancienne ministre fédérale de l’Énergie espère, comme les élus N-VA, que l’opération entamée par Engie ne sera pas irréversible, raison pour laquelle elle appelle à une suspension temporaire de l’activité nucléaire dans le réacteur 2 de Tihange.
”Je vais déposer une nouvelle proposition de loi qui va permettre de ralentir le démantèlement de Doel 3 et Tihange 2. Je vais centrer cette proposition sur ces deux réacteurs pour éventuellement les mettre sous cocon comme ils l’ont été lorsque l’on a examiné les fameuses inclusions à l’hydrogène dans les années 2014-2016”, avertit la libérale.
Bart De Wever, pour sa part, dit espérer obtenir des garanties d’Engie que les opérations ne seront pas irréversibles et que l’on pourra encore redémarrer ces centrales. “On va avoir un manque d’électricité en 2025 très important. [Le gestionnaire du réseau de transport] Elia parle d’un manque supérieur à 3 GW. C’est énorme. C’est plus de 20 % de notre consommation. Et si l’on veut atteindre les objectifs climatiques, on doit s’attendre à une augmentation de la consommation d’électricité. On devrait aller vers un mix nucléaire et renouvelable.”
MR comme N-VA se disent déjà prêts à déployer des méthodes offensives pour permettre cette prolongation. Le président des libéraux francophones Georges-Louis Bouchez l’a répété mardi matin : “Le MR va se battre pour empêcher la décontamination, une phase irréversible, des réacteurs nucléaires à l’arrêt.”
Sur ce point, le MR pourra compter sur le soutien du deuxième parti le plus important de Flandre. “Il existe une majorité pour changer la loi sur le nucléaire”, confirme Bart De Wever. “En 2020, j’ai eu des pourparlers avec d’autres partis pour former un gouvernement, qui ne s’est pas formé. À ce moment, j’ai demandé à tous les partis politiques autour de la table s’ils étaient prêts à prolonger le nucléaire et tout le monde a répondu oui. Immédiatement. C’était la négociation la plus facile de ma vie. C’est seulement lorsque les écologistes sont arrivés pour former la Vivaldi que le plan s’est orienté vers la fermeture. Mme Van der Straeten [l’actuelle ministre fédérale de l’Énergie, NdlR] a même trompé les partenaires. L’accord de gouvernement prévoyait qu’elle cherche deux pistes et elle n’a travaillé que sur une piste, le plan A pour la fermeture des centrales.”
Le bourgmestre d’Anvers, qui la semaine précédente appelait à réformer le pays, serait-il prêt à monter dans un nouveau gouvernement pour défendre la prolongation du nucléaire ? “Il n’est pas nécessaire de former un nouveau gouvernement pour cela”, répond-il. “S’ils nous demandent au parlement de voter pour une voie alternative, on le fera sans condition et sans prix. Ceci est trop important. Ce n’est pas un jeu politique. Il s’agit de notre futur et de notre prospérité.”
Au parlement, plusieurs propositions de loi visant à prolonger le nucléaire au-delà de 2025 sont en gestation. Le CD&V, l’Open VLD, la N-VA et les Engagés en ont déposé. Et le MR, par le biais de Marie-Christine Marghem, en a plusieurs sous le coude.
”Les situations de 2003 ne sont plus celles d’aujourd’hui”, analyse Serge Dauby, président du Forum nucléaire, qui défend un mix de production atomique et d’énergies alternatives. Ce mix ne pourra être obtenu qu’avec des Small Modular Reactor, plaide-t-il. “Les SMR apporteront toute la flexibilité à l’énergie renouvelable dont elle a besoin. Mais pour qu’on y arrive, il va falloir avant tout qu’on abroge la loi de 2003.”
En effet, ces SMR fonctionnent sur base de la fission. Or, la loi de 2003 interdit cette fission au-delà de 2025, raison pour laquelle elle doit être revue, selon les pro-SMR… Etant donné que le co-président d'Ecolo a déjà annoncé qu'il s'opposait aux SMR, on peut prédire que cette question va fortement agiter la sphère politique dans les prochaines semaines.