Antidépresseurs, maisons de repos, téléconsultations : Trois ans après le premier confinement, le covid a bouleversé nos vies et notre santé
En mars 2020, la Belgique s’apprêtait à vivre son premier confinement. Trois ans plus tard, le rapport à notre santé reste toujours bouleversé et de nouvelles pratiques ont émergé. On fait le point sur les plus grands changements avec les Mutualités Libres.
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Publié le 16-03-2023 à 06h51
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Dans les centres de soins résidentiels, le Covid-19 a fait des ravages, notamment lors d’une première vague qui a surpris tout le monde. D’après les données récoltées par les Mutualités Libres (qui comptent plus de 2,2 millions d’affiliés), 32 % des décès jusqu’à début novembre 2022 ont eu lieu dans des centres de soins résidentiels, et lors de la première vague (mars – juin 2020), près de la moitié des décès étaient à déplorer dans des centres de soins résidentiels, contre près de 4 décès sur 10 lors de la seconde vague (septembre 2020 – février 2021).
“Aujourd’hui, on voit que le taux de mortalité dans les maisons de repos revient à un niveau similaire par rapport à la période pré-covid, indique Güngör Karakaya, expert aux Mutualités Libres. En 2022, on était à un décès sur cinq, ce qui est le cas également en ce début d’année alors qu’en 2020, ce taux atteignait une personne sur quatre. On passe donc de 25 à 20 % au niveau de la mortalité”. Entre 2014 et 2019, le nombre de résidents des centres de soins résidentiels a augmenté en Flandre, en Wallonie et (dans une moindre mesure) à Bruxelles. La désastreuse année 2020 a fait chuter le nombre d’entrées et monter en flèche le taux de mortalité. Plus d’un quart des résidents sont décédés en 2020, contre un cinquième les autres années.
"Le profil des patients en maisons de repos n'est clairement plus le même"
En 2021, environ 1 personne âgée de plus de 65 ans sur 14 en Flandre réside dans un centre de soins résidentiels, contre 1 sur 13 en Wallonie et 1 sur 11 à Bruxelles. Et le taux de mortalité atteint à nouveau le niveau pré-Covid de 1 résident sur 5 qui décède dans l’année. Malgré le contexte très compliqué dans ce secteur, les Mutualités Libres constatent que la situation s’est pratiquement normalisée.
“Avec le covid, l’image des maisons de repos a en a pris un coup, notamment en raison de leur gestion imparfaite en début de pandémie, note-t-il. Cela a également eu un impact sur le profil des résidents, on constate que les personnes qui entrent en maison de repos sont aujourd’hui plus dépendantes qu’avant la crise du Covid-19. Il y a clairement une hausse de cette proportion, on note donc un changement du profil des résidents. Les gens avec un degré moindre de dépendance sont plus réticents à intégrer une maison de repos. Mais quand on regarde les entrées, on voit un bon rattrapage pour la Flandre (avec un niveau similaire à la situation pré-covid), une situation relativement similaire en Wallonie et à Bruxelles, où les entrées sont bien moins élevées, on est par contre loin de l’époque prépandémique”.
Chez les 12-24 ans, la consommation d’antidépresseurs reste à un niveau élevé
La crise sanitaire a mis notre santé mentale à rude épreuve au niveau psychologique. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) prévoit même que les troubles mentaux seront la principale cause de morbidité en 2030. Environ 30 % de la population mondiale sera confrontée à un trouble mental à un moment donné de sa vie.
Pour tenter d’objectiver l’évolution de cette situation depuis la pandémie, les Mutualités Libres ont réalisé entre 2018 et 2021 une cartographie de leurs affiliés qui consomment des psychotiques ou des antidépresseurs, consultent un psychiatre et subissent une hospitalisation psychiatrique. Sur une base annuelle, environ 10 % des affiliés se sont vus prescrire un antidépresseur. Un pourcentage qui est resté stable tout au long des 3 années examinées dans cette étude.
”Et la prévalence des utilisateurs d’antidépresseurs augmente significativement pour les tranches d’âge 12-18 ans et 19-24 ans (et dans une moindre mesure pour les 25-39 ans). L’augmentation en termes relatifs entre 2019 et 2022 est de 42 % pour le taux de prévalence des 12-18 ans et de 30 % pour les 19-24 ans, précise l’expert. L’augmentation a principalement eu lieu en 2021 (avec la reprise progressive de l’activité médicale et des soins) et s’est poursuivie en 2022 (les baisses de 2020 par rapport à 2019 s’expliquent principalement par le report de soins = > moins de consultations et donc moins de prescriptions).
De plus, les personnes atteintes de troubles mentaux sévères ont un taux de mortalité 2 à 3 fois plus élevé par rapport à la population générale, ce qui correspond à une réduction de l’espérance de vie de 10 à 25 ans. “Si on regarde nos données selon le genre, on peut voir que le taux de prévalence des utilisatrices d’antidépresseurs est quasiment le double de celui des hommes. On constate également une baisse de la prévalence de l’utilisation d’antidépresseurs aussi bien chez les hommes que chez les femmes en 2020 (par rapport à 2019) en raison du report de soins et donc des consultations (baisse qui est tout de même plus marquée chez les hommes). Ensuite, on constate une augmentation de la prévalence aussi bien chez les hommes que chez les femmes mais avec une hausse plus importante chez les femmes (mais les ordres de grandeurs sont assez similaires)”.
Les téléconsultations se sont installées en Belgique
Très vite, les consultations à distance sont devenues la nouvelle norme entre les médecins et leurs patients. Plus pratiques pour les deux parties, elles ont permis à la population de garder un contact avec le milieu médical durant le plus fort de l’épidémie de Covid-19.
Aujourd’hui, les consultations sont un complément utile à une consultation en face-à-face, et non pour la remplacer. Certaines conditions doivent d’ailleurs être respectées. Depuis le 1er août 2022, il doit s’agir de consultations à distance auprès d’un médecin avec lequel le patient a déjà une relation thérapeutique, d’un médecin spécialiste vers lequel un autre médecin l’a orienté ou d’un service de garde de médecine générale.
D’après les données récoltées par les Mutualités Libres, elles s’élevaient à 192 346 au mois de novembre 2020 contre 224 967 en 2021 et 83 204 en 2022. Une diminution logique au vu de l’amélioration sanitaire même si le total reste relativement élevé. “Elles sont moins nombreuses que durant la pandémie mais on remarque qu’elles restent un complément utile et viennent aujourd’hui compléter les consultations physiques, rapporte Güngör Karakaya. Durant le premier confinement, elles avaient permis de combler la moitié des consultations physiques qui n’avaient pas pu avoir lieu. On voit qu’à ce jour, près de la moitié des téléconsultations ont toujours lieu, elles n’ont pas été abandonnées, elles se sont bien installées chez nous. Si toutes les conditions sont respectées, elles peuvent être très bénéfiques”.