Quand Bart De Wever “parle ouvertement et discrètement avec des régionalistes” du PS
Paul Magnette s’est montré clair ce samedi, en réponse aux propos de Bart De Wever. “Les socialistes n’accepteront jamais le confédéralisme”. Un accord institutionnel entre PS et N-VA est-il pour autant exclu en 2024 ? Pas si sûr…
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- Publié le 03-09-2023 à 17h51
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L’avenir de la Belgique passera par le confédéralisme, résultat d’un grand accord entre le PS et la N-VA. C’est du moins la conviction exprimée par Bart De Wever, président de la N-VA, au cours d’une interview accordée à La Libre ce samedi.
”Je suis convaincu qu’un jour, les socialistes seront capables de conclure un accord pour aller vers le confédéralisme. Et si le PS le fait, j’espère que le reste de la gauche wallonne suivra. On verra bien”, a déclaré le nationaliste flamand, depuis son bureau de l’Hôtel de Ville d’Anvers.
Le président du PS n’a guère tardé à lui répondre.
”Je le dis et je le répète. Les socialistes n’accepteront jamais le confédéralisme”, a assuré au micro de LN24 Paul Magnette. “Pour nous le ciment de la Belgique, c’est la sécurité sociale et on ne touchera pas à la sécurité sociale. Nous ne serons jamais un partenaire pour discuter de ce genre de choses”. Ces propos ont été tenus à l’occasion des Universités d’été, au Théâtre de Mons. À l’occasion de cette rerée politique, le président du PS a présenté un pré-bilan et avancé ses pions pour 2024. “Il n’y a qu’un grand parti des travailleurs, c’est le PS”, a affirmé le bourgmestre de Charleroi.
En juin 2022 à la veille d’un congrès du parti socialiste, Paul Magnette avait déjà fermé la porte, démentant tous contacts préparatoires avec la N-VA, et assurant qu’une “septième réforme de l’État en 2024 n’est ni nécessaire ni souhaitable”.
Il serait toutefois prématuré de conclure à l’impossibilité d’un accord entre les deux partis, que l’arithmétique pourrait imposer.
Mais il n’y a sans doute guère pire endroit ou moment qu’un meeting socialiste de rentrée, à quelques mois des élections, pour évoquer l’éventualité d’un accord avec un parti flamand nationaliste et conservateur.
Le rejet du confédéralisme exprimé par Paul Magnette ce samedi est par ailleurs centré sur le financement de la sécurité sociale. Or, si tabou il y a bien, il n’empêche pas qu’une réforme institutionnelle donnant davantage de pouvoir aux régions puisse se produire à travers d’autres compétences.
Personne, ni au PS ni à la N-VA, n’a oublié qu’en juillet 2020 Paul Magnette et Bart De Wever ont longuement négocié un accord dans lequel les socialistes acceptaient de lâcher du lest sur l’institutionnel tandis que la N-VA concédait sur le socio-économique.
Le PS, selon Bart De Wever, n’est pas fondamentalement opposé à une réforme des institutions fédérales, même si la N-VA et le PS avancent à des rythmes différents. “Je veux avancer aussi vite que possible. Pour le PS, au contraire, il n’y a pas urgence tant qu’il y a de l’argent qui arrive”, assurait encore Bart De Wever dans La Libre. “Quand je parle ouvertement et discrètement avec des régionalistes tels que Dermine ou Dermagne, il est clair que leur analyse sur l’avenir de ce pays n’est pas si éloignée de la mienne. Mais, moi, je suis pressé d’aboutir”.
Si Paul Magnette a plusieurs fois démenti tout contact préparatoire avec la N-VA pour une réforme de l’État, le dialogue entre les deux partis n’est pas pour autant rompu. Des discussions et rencontres ont bel et bien lieu entre le président de la N-VA et des socialistes.
Dermagne à l’hôtel de Ville d’Anvers
L’une des rencontres évoquée par Bart De Wever date en fait du mois d’août 2022. Le Vice-Premier ministre Pierre-Yves Dermagne s’était alors très officiellement rendu à Anvers à l’invitation de la N-VA, pour une visite du port. Le socialiste avait été reçu à l’hôtel de Ville où il avait rencontré Bart De Wever, bourgmestre de la plus grande ville de Flandre. Il avait été question, nous dit-on, de la problématique de la drogue, qui gangrène le principal port du pays, mais aussi plus largement, de politique.
Thomas Dermine, Secrétaire d’État à la Relance, se refuse quant à lui à tout commentaire à propos de l’autre rencontre évoquée par le président de la N-VA.
Des contacts plus classiques entre mandataires PS et N-VA ont également lieu dans le cadre du travail parlementaire. Un poids lourd de la N-VA assure même qu'”il y a encore de très discrets contacts entre N-VA et PS”.
Il y a un temps pour tout, et l’heure est aux propos de pré-campagne chez les socialistes. Il n’en reste pas moins qu’une partie significative du PS ne voit pas d’un si mauvais œil la possibilité d’une réforme de l’État en 2024. Cette frange régionaliste garde un poids certain au sein du parti, et est incarnée par des personnalités comme Nicolas Martin, bourgmestre de Mons, le ministre wallon Christophe Collignon, ou un poids lourd comme Pierre-Yves Dermagne.
L’un d’eux, Malik Ben Achour (PS), député fédéral, l’a à nouveau exprimé sans détour en août dans l’Echo. ” Je ne suis pas hostile à une grande réforme institutionnelle qui permette aux Flamands de gagner l’autonomie qu’ils réclament. Dans ce cas-là, elle peut servir à un grand mouvement de redéploiement économique de Bruxelles et de la Wallonie sur la base d’un projet profond de réindustrialisation”.
Nul doute qu’il y aura encore de part et d’autres des positionnements, de petites ouvertures et de grands démentis d’ici aux élections de mai 2024. Ce sera sans doute, pour Bart De Wever, la dernière chance d’arracher la grande réforme de l’État qu’il a toujours échoué à obtenir.