On ne parle plus de dérèglement mais d'effondrement climatique: ces 5 chiffres noirs déjà bien réels en Belgique qui doivent nous alerter
Entre vagues de chaleur, inondations et incendies, les catastrophes naturelles se sont multipliées ces derniers mois. Aux quatre coins du monde, des records de chaleur ont été battus cette semaine, c’est le cas en Belgique également.
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- Publié le 08-09-2023 à 12h06
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Quand les politiques et les médias se concentrent sur le “pipigate”, le dérèglement climatique bat des records à une vitesse qui fait froid dans le dos. Et qui devrait précipiter la thématique du climat au centre de la campagne électorale.
Car oui, l’effondrement climatique a commencé. Ce sont les mots alarmants du secrétaire général de l’ONU fait la une du journal Libération ce mercredi. Une déclaration qui fait suite au constat de l’Observatoire européen Copernicus : l’humanité n’a jamais vécu un été aussi chaud, 2023 sera probablement l’année la plus chaude de l’Histoire.
Il faut sortir des combustibles fossiles et arrêter la déforestation"
”Juin, juillet et août ont été les trois mois les plus chauds depuis environ 120.000 ans, c’est-à-dire depuis le début de l’histoire de l’humanité”, a précisé Samantha Burgess, cheffe adjointe du centre d’observation. Aux quatre coins du monde, des records de chaleur ont été battus cette semaine. Avec 30,1 degrés, la journée de mercredi est devenue le 6 septembre le plus chaude en Belgique.
Une vague de chaleur historique pour la période pourrait même être décrétée cette semaine. Un record de chaleur avait d’ailleurs déjà été battu en juin chez nous juste avant un mois de juillet propulsé au rang de mois le plus chaud jamais enregistré sur la planète. Entre vagues de chaleur, inondations et incendies, les catastrophes naturelles se sont multipliées.
Un véritable effondrement climatique durant l’été et principalement ces dernières semaines, qui inquiètent les spécialistes et professionnels du climat. Pour prendre conscience de ce changement qui a déjà commencé, nous avons sélectionné cinq chiffres majeurs qui illustrent à quel point il est urgent d’inverser cette tendance. Une situation qui ne se mesure pas qu’au bout du monde : en Belgique, les changements sont déjà bien réels.
2,2°C
Le programme européen d’observation de la Terre, Copernicus, a récemment publié un rapport sur le changement climatique. Et un chiffre ressort : 2,2°C. Selon les scientifiques, cela s’explique par le fait que l’Europe se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète. Le vieux continent s’est en effet réchauffé en moyenne de 2,2 °C depuis l’ère préindustrielle, contre 1,2 °C pour la moyenne mondiale. Un niveau bien au-dessus des 1,5 °C fixés par l’Accord de Paris.
Ce réchauffement est donc déjà presque deux fois plus rapide en Belgique que la moyenne mondiale. Une situation qui alimente canicules et sécheresses exceptionnelles et qui a également provoqué de violents incendies de forêt responsables de la deuxième plus grande surface brûlée jamais enregistrée, et fait des milliers de victimes. L’année 2022 a d’ailleurs été la plus chaude jamais enregistrée pour la Belgique, mais aussi la France, l’Allemagne, l’Irlande, l’Italie, ou encore le Luxembourg, le Portugal et l’Espagne.
Entre 25 et 65 %
En Belgique, 25 à 75 % des espèces présentes courent le risque de voir leurs populations se réduire de manière plus ou moins importante. Parmi les causes liées à ce phénomène, on peut notamment évoquer l’atteinte à leurs habitats par le morcellement ou l’urbanisation, pollution des sols, des eaux et de l’air.
Plus largement, les populations d’insectes chutent de façon alarmante en Belgique et partout dans le monde. On estime qu’en trente ans, près de 80 % des insectes auraient disparu en Europe. Un déclin catastrophique dû à l’intensification des pratiques agricoles et au recours aux pesticides, et qui menace toute la chaîne alimentaire.
Des chercheurs de l’UClouvain ont participé avec une septantaine de scientifiques des quatre coins du monde, à une synthèse parue, récemment, dans le journal Ecological Monographs et ont également démontré que 80 % des plantes cultivées dépendent des insectes pour se développer.
23
D’après le classement du World Ressources Institute, la Belgique se hisse à la 23ème place des pays exposés à un stress hydrique important, loin devant des pays au climat plus chaud comme l’Italie (44e), la Namibie (37e) ou la Somalie (100e). Si depuis l’été 2021, on a tendance à penser que les réserves d’eau en Belgique sont bien remplies, le risque de pénurie d’eau potable n’est pas improbable.
Notre pays est considéré par l’organisation comme un pays “à haut stress hydrique”, c’est-à-dire un pays qui utilise chaque année entre 40 et 80 % de l’eau disponible sur son territoire. Un chiffre qui signifie que l’eau doit être mieux gérée et (ré) utilisée dans notre pays. Face à cette situation, les autorités régionales continuent à donc surveiller de près la situation.
900 000
Depuis 15 ans, l’Europe s’est embrasée comme jamais. Au total, plus de 900 000 hectares de végétation sont partis en fumée. D’après le rapport réalisé par Copernicus, il ne fait aucun doute que ces catastrophes sont liées au dérèglement climatique. ce qui forme un cercle vicieux.
La raison ? Ces feux de forêt ont émis un niveau record de CO2, qui n’est autre que le principal gaz à effet de serre responsable du changement climatique.
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L’été 2022 dans sa totalité présente une surmortalité plus élevée par rapport à ce que nous avons observé lors des étés 2021 (3,5 % et 1 346 décès supplémentaires), 2020 (4,3 % avec 1 687 décès supplémentaires) et 2019 (3,1 % et 1 188 décès supplémentaires). C’est la surmortalité estivale la plus importante depuis les 20 dernières années d’après le dernier rapport de Sciensano. En effet, les facteurs de risques météorologiques et environnementaux ont été plus nombreux et intenses que lors des deux étés précédents.
Durant cette période, la chaleur et l’augmentation de l’ozone dans l’air ont contribué à augmenter jusqu’à 488 le nombre de décès par jour.
En 2020, cela représente une surmortalité de 35 % due à la chaleur, c’est la plus grave à laquelle la Belgique ait jamais dû faire face. Au mois d’août 2020, la chaleur a même plus tué que le covid-19.
“Il manque une volonté politique assez forte”
Parmi les rares lueurs d’espoir du rapport, on peut souligner que l’an dernier en Europe, les énergies solaires et éoliennes ont ensemble, et pour la première fois, produit davantage d’électricité (22,3 %) que le gaz d’origine fossile (20 %) et le charbon (16 %).
Pour Jean-Pascal van Ypersele, climatologue et professeur à l’UCL, le terme “effondrement” est d’ailleurs mal choisi. “La situation est très grave, mais l’humanité a les moyens, si elle en a la volonté suffisante, d’empêcher que la Terre devienne partiellement inhabitable. Il faut sortir des combustibles fossiles et arrêter la déforestation, explique-t-il. Parler abusivement d’effondrement climatique” risque de renforcer le sentiment d’impuissance de beaucoup de citoyens, en particulier de jeunes. Or le GIEC n’a cessé d’être clair : nous avons les moyens d’agir. Ce qu’il manque, c’est une volonté politique assez forte”.