Un buste de Sophie Wilmès au parlement fédéral: une avancée symbolique dans un univers très masculin
Les femmes sont très peu représentées dans les œuvres qui décorent le Palais de la Nation.
Publié le 13-03-2023 à 13h55 - Mis à jour le 13-03-2023 à 14h04
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Sophie Wilmès devrait, dans un futur proche, avoir son buste dans les couloirs du parlement. Comme Elio Di Rupo, Herman Van Rompuy ou Yves Leterme avant elle, la députée MR a droit à une représentation sculpturale de sa personne pour avoir exercé le rôle de Première ministre d’octobre 2019 à octobre 2020. Ce sera la première femme à y avoir droit.
Dans le cadre de la confection de leur budget, les services de La Chambre ont pris contact avec la première Première de Belgique pour s’enquérir de ses disponibilités quant à la création de cette représentation. La procédure va maintenant doucement se mettre en marche, avec le temps qu’il sera nécessaire de prendre pour que cela se concrétise.
La tradition des bustes des Premiers ministres est née en 1850, sous l’impulsion de Charles Rogier. Depuis, chaque “chef de cabinet” (nom donné au chef du gouvernement à l’époque), et ensuite chaque Premier ministre, a eu droit à son buste. Leur arrivée dans les couloirs du parlement ne suit par contre pas une logique chronologique. Guy Verhofstadt, par exemple, Premier de 1999 à 2008, n’a pas encore fait ériger son buste alors que plusieurs de ses successeurs l’ont déjà fait.
Longues procédures
Les procédures menant à la concrétisation de la sculpture peuvent être assez longues. Dès la fin de la législature, la conservatrice du parlement prend contact avec l’ex-Premier ministre. Il faut ensuite choisir une artiste, déterminer les conditions, choisir si l’on préfère poser ou donner une photo, faire un contrat, l’œuvre doit s’intégrer parmi les autres œuvres de la galerie… des éléments qui ne sont pas forcément prioritaires dans l’emploi du temps des politiques.
L’arrivée du buste de Sophie Wilmès sera toutefois symboliquement importante puisqu’elle marquera une rupture dans un univers encore très masculin. Car même chez les créateurs, la sélection allait toujours majoritairement vers les hommes.
Les présidents de la Chambre, par exemple, ont également droit à une représentation. En l’occurrence, il s’agit d’un tableau et non d’un buste. Or, “sur les 41 portraits de la galerie des présidents de la Chambre, trois ont été confiés à une femme”, nous explique Sophie Wittemans, conservatrice du Palais de la Nation. ” Il s’agit chronologiquement de Paul Kronacker, portraituré par Marie Terlamen en 1962, de Joseph Michel portraituré par Françoise André en 1987 et d’Herman Van Rompuy, qui a confié son portrait à Anne Van Herreweghen en 2011. Dans les salles de commission historiques se trouvent 9 tableaux dont 3 portraits peints par Marie Terlamen.”
Un changement supplémentaire pourrait advenir au terme de cette législature puisque, pour la première fois, la Chambre a désigné une femme présidente en la personne d’Eliane Tillieux (PS).
9 % d’artistes femmes
”Il y a, comme partout, plus d’artistes masculins que féminins dans les collections de la Chambre. Mais il y a quand même 9 % d’artistes femmes dans les collections de la Chambre (12 % au Sénat), ce qui est bien mieux que beaucoup de musées”, poursuit Sophie Wittemans. “Les 6 peintures de paysages des couloirs ainsi que les sculptures de bustes de Premiers ministres n’ont, jusqu’à présent, été confiés qu’à des hommes. Mais peut-être que Sophie Wilmès y apportera du changement ?”
Si aujourd’hui, un soin plus important est accordé aux choix des créateurs ainsi qu’aux personnes représentées, par le passé certaines décisions ont donné lieu à des inversions surprenantes. Le baron Paul Kronacker (1897-1994) avait confié la réalisation de son portrait à Marie Terlamen, mais 10 ans plus tard, ce portrait a été remplacé par un portrait peint par Luc De Decker. En l’apprenant, la présidente la Chambre a exigé que les deux portraits soient exposés côte à côte. “Et d’expérience, je peux vous dire que bien des visiteurs préfèrent nettement le portrait réalisé par Marie Terlamen”, sourit Sophie Wittemans.