Le P.-V. qui accuse Delilez

Philippe Crêteur
Le P.-V. qui accuse Delilez
©DH

Dans cette audition, un ancien proche du commissaire suspendu révèle ses liens avec la mafia russe

BRUXELLES Dans la DH du 12 août, nous révélions que le commissaire Pierre Delilez de la Brigade Nationale de la PJ (BNB), spécialiste des mafias russes, avait été suspendu le 1er août dernier, après que sa démission eut été refusée par le ministre de la Justice. Il fait l'objet d'un dossier ouvert à sa charge du chef de corruption et instruit par la juge Anne Gruwez.

Aujourd'hui, nous sommes en mesure de produire le témoignage de l'homme qui a fait omber Delilez, un Bruxellois proche des milieux d'affaires russes, erronément présenté comme un informateur des services de police. Un témoignage qui révèle les sourdes luttes d'influence au coeur même du pouvoir russe pour s'approprier les richesses fabuleuses que recèlent les sous-sols du Kazakhstan.

Notons d'abord que le témoin fut très proche de Delilez jusqu'au début de cette année: c'est lui qui, à la demande de l'officier de police judiciaire, l'introduisit auprès des milieux russes, criminels ou non.

A l'origine de toute cette affaire, la tentative de rachat de la concession de Tractebel, aujourd'hui propriété du groupe français Suez-Lyonnaise des Eaux, au Kazakhstan (distribution de gaz): 55% des parts appartiennent à Tractebel et 45% à trois hommes d'affaires russes, MM. Chodiev, Maskevitch et Ibraguimov. Trois concurrents de ces derniers, MM. Grigori Loutchansky, Shabaï Kalmanowich et Bulat Utemuratov, avaient décidé de racheter la concession et, pour y parvenir, avaient tenté de discréditer les concessionnaires russes auprès du président Nursultan Nazerbaev.

Hôtels de luxe

En Belgique, ils ont pris contact avec le témoin. `Kalmanowich, un ancien général du KGB détenu 5 ans en Israël pour espionnage, était intéressé de me rencontrer car il avait besoin d'un contact en Europe de l'Ouest pour lui servir de guide´ , explique-t-il aux gendarmes de la 3e SRC de la BSR de Bruxelles dans une audition du 22 février dernier. `Il savait que j'avais des contacts avec le monde policier belge et il m'avait demandé de l'introduire dans ce milieu. C'est ainsi que je l'ai mis en contact avec Pierre Delilez´ .

Pour salir la réputation de MM. Chodiev, Maskevitch et Ibraguimov, l'ancien général du KGB, présenté comme un proche de Wiatzelam Ivankov, surnommé Yaponchik (le petit Japonais) voulait disposer de `documents officiels belges´ prouvant que le trio était sous le coup de poursuites judiciaires en Belgique et était fiché comme mafieux. Une réunion fut organisée à l'hôtel Royal, à Paris, en août 1999. `Pierre Delilez était présent lors de cette réunion. Ils lui ont demandé s'il pouvait quelque chose à ce sujet (fournir des documents officiels belges impliquant le trio, NDLR) . Il n'a pas répondu affirmativement, il a dit qu'il verrait. A ma connaissance, par la suite, un rapport de la Sûreté de l'Etat a été transmis par fax à Loutchansky selon ses dires. Je ne l'ai pas vu´ .

Les rencontres vont se poursuivre. Cinq jours après la rencontre de Paris, une nouvelle réunion est organisée à Bruxelles. Kalmonovich, Loutchansky et la femme de ce dernier, qui logent à l'hôtel Conrad, rejoignent Delilez et le témoin à La Villa Lorraine . Un diner au cours duquel le témoin va comprendre que Delilez tente de le doubler .

Le P.-V. / page 1

Le P.-V. / page 2

A-t-il tourné Kazakh?

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