Une victime des attentats à Bruxelles exprime sa culpabilité d'avoir survécu: "Il est très difficile d'accepter de rester vivant"
Une victime des attentats du 22 mars 2016 a confié lundi, devant la cour d'assises chargée de juger ces attaques, son sentiment de culpabilité d'avoir survécu à la seconde explosion. Sept ans après ces événements, Pierre-Yves Desaive dit encore souffrir de stress post-traumatique, y pensant presque en permanence.
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Publié le 13-03-2023 à 14h16
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Ce conservateur aux Musées royaux des Beaux-Arts, aujourd'hui âgé de 54 ans, devait prendre l'avion pour Milan le jour des faits. Il se trouvait dans le hall des départs, près du grand tableau d'affichage, lorsqu'a retenti la seconde explosion. Sa survie, il la doit au fait d'avoir été à relative distance des deux bombes.
Il a alors été projeté par le souffle de l'explosion vers l'extérieur du terminal. Un souffle qui a fait de multiples victimes avant d'arriver à lui. Depuis lors, il est "très difficile" pour Pierre-Yves Desaive "d'accepter de rester vivant". "J'ai un sentiment de culpabilité d'avoir été si proche de la deuxième bombe et d'être resté vivant", explique-t-il. "Les personnes autour de moi se sont prises la charge, le contenu des bombes."
Dans un premier temps, le quinquagénaire se sentait "complètement illégitime" à faire partie du groupe des victimes. Il a alors essayé de se rendre utile à d'autres "vraies" victimes, en leur prêtant sa voix et en étant présent pour elles dans les médias. "Le sentiment de culpabilité, du survivant, c'est ça", résume-t-il.
Interrogé par la présidente de la cour sur les conséquences qu'ont encore ces attentats sur lui, Pierre-Yves Desaive a répondu qu'il avait essayé et essaye encore d'en faire quelque chose de constructif, plutôt que de se refermer sur lui-même. "C'est ce que j'ai essayé de faire, soit en parlant dans les médias, soit en venant témoigner ici. J'ai beaucoup hésité."
Dans son témoignage, il a confié se souvenir particulièrement du moment où, après la deuxième explosion et alors qu'il se trouve au sol, il a enjoint des enfants terrorisés à se mettre au sol. Il redoutait l'explosion d'une troisième bombe sur le parking. "C'est l'image la plus difficile", dit-il, ajoutant espérer pouvoir revoir un jour ces deux enfants et leurs parents.
Dans la foulée des attentats, l'homme a développé un stress post-traumatique. Il pense en permanence à ce 22 mars 2016. Le seul moment où il parvient à se vider la tête, c'est lorsqu'il donne cours de karaté à des enfants, raconte-t-il. Une incapacité permanente de 8% a été diagnostiquée chez lui et le quinquagénaire n'a plus d'emploi, étant retourné travailler trop rapidement après les attentats, selon son analyse.
Il traverse parfois des moments de panique, a eu des idées suicidaires, a sollicité à deux reprises son hospitalisation aux urgences psychiatriques (en 2016 et lors du dernier réveillon de Nouvel An), et a développé une peur des transports en commun et une extrême vigilance.
Quant à la fille du témoin, elle avait 6 ans à l'époque des faits et 13 ans aujourd'hui. "Pour le moment, elle en souffre beaucoup", regrette-t-il. "Elle voit un psychologue et a des crises de larmes, d'angoisse."