Le juge a interdit à Alyson de revoir son petit garçon: “C’était cruel d’entendre mon fils appeler cette femme ‘maman’...”
Alyson en détresse totale : le juge lui interdit de revoir son petit garçon
Publié le 29-03-2023 à 11h40
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Elle a reçu la décision comme un coup de poignard. Il était écrit : "Suppression totale des visites". Il avait suffi de quatre mots pour la rendre folle de douleur. Le juge de la jeunesse interdisait qu'elle revoie son petit garçon.
Nous étions le 29 juin, et depuis bientôt un an, la justice reste inflexible. Alyson, cette maman que nous rencontrons, n'a pas revu son fils âgé de cinq ans et demi. Dans l'intérêt de l'enfant, le juge a décidé qu'elle n'allait pas pouvoir l'élever et il l'a placé dans une famille d'accueil.
C'était compliqué de rencontrer Alyson. En révolte, la jeune femme en veut à la terre entière. Alyson voulait dénoncer ce qu'elle considère pour de l'inhumanité, et n'est en réalité que la nécessité, aussi dure soit la décision, de donner le meilleur à cet enfant qui a besoin de stabilité.
Aussi fort soit l'amour qu'elle lui porte, sa mère n'est tout simplement pas apte à l'élever.
Mais rien n'est définitif. Rien n'est jamais définitif. A l'écouter, on avait le sentiment qu'Alyson commence à accepter l'idée que c'est à elle de faire ce qu'il faut pour qu'elle puisse plus tard revoir son petit garçon. Mais pour l'instant, le juge a toutes les raisons d'estimer que ce n'est pas possible.
Le chemin d'Alyson sera long. La maman souffre d'être privée de son enfant. C'est ce qu'elle a voulu raconter.
Respect
Alyson n'a pas grandi dans la facilité. Depuis l'enfance, la jeune femme a traversé la plupart des épreuves que réserve la vie. Les coups durs ont forgé son caractère. D'autres auraient sombré dans la drogue. Nous voyons sa fierté d'affirmer qu'elle n'a même jamais, elle, touché à la cigarette.
Elle provient d'un milieu précarisé. Son père, technicien de surface, a perdu son emploi et travaille à présent dans un atelier protégé. Maman buvait.
Elle a rencontré un garçon de sa cité. De la relation est né, en 2017, cet enfant dont le père, dès la naissance, ne s'est jamais occupé. Mais elle était là, elle, prête à donner de l'amour pour deux. Mais les orages de la vie furent les plus forts. Les services de l'aide à la jeunesse considèrent qu'Alyson traverse trop régulièrement des périodes de grande instabilité, de sorte que son bébé lui a été retiré. Elle peine à admettre que la décision était prise dans l'intérêt de l'enfant.
On éprouve du respect pour la jeune femme, un respect immense. Dans d'autres circonstances, Alyson serait la meilleure et la plus tendre des mamans.
Les juges n'ont jamais douté de l'amour qu'elle éprouve pour son fils. Ils n'ont de cesse de le répéter : Alyson, disent-ils, a pour cet enfant un "amour de mère". Personne ne songe à le contester. Elle est bleue de son fils. Et l'enfant adore sa maman.
La dernière fois qu'ils se sont vus, ce mercredi 29 juin, il la réclamait, se blottissait dans ses bras. Le petit demandait à vivre avec elle.
Les juges ont dû dire non.
Maman ou Mamou
Qu'elle est terrible, leur responsabilité, eux qui dans chacune de leurs décisions, insistent sur le fait que "le lien de l'enfant avec sa mère est bien présent". Et les services de protection disent pareil. Ils écrivent qu'Alyson joue le jeu, qu'elle est capable de faire passer l'intérêt du petit avant le sien et par exemple "s'investit positivement dans l'orientation de son fils chez les accueillants familiaux afin de répondre à ses besoins".
Les services sociaux relèvent que "son cœur de maman a envie d'un projet de réintégration familiale ". Ils ajoutent que s'il faut soutenir Alyson "dans ses difficultés", ils doivent noter aussi qu'elle éprouve malheureusement "des problèmes de maturité et de stabilité affective" et que ceux-ci l'empêchent, pour l'instant, d'élever le petit comme il se doit.
Ça s'est mal passé le jour où Alyson, autorisée à voir son fils dans la famille où il est placé, l'a entendu appeler "maman" la maman d'accueil.
Elle parlait à l'enfant, la maman d'accueil arrivait et dans la discussion, le petit s'adressant à elle l'a appelée 'maman'.
C'était trop cruel. La plaie ne se referme pas. Elle en crève. Et le plus terrible fut de constater que la maman d'accueil, qui devait réagir, ne réagissait pas. Jusqu'alors, il était convenu, pour marquer la différence, que le petit garçon l'appellerait "Mamou".
Alyson : "Je me suis sentie perdre complètement mon rôle. Même aux yeux de mon fils, je ne comptais plus pour rien".
Le résultat a été que les visites suivantes se sont mal déroulées. Les services spécialisés ont dû signaler qu'il fallait intervenir d'urgence et le juge, attentif à l'évolution, décidait purement et simplement de supprimer totalement les visites.
Nous étions le 29 juin et Alyson, nous dit-elle, n'a pratiquement plus aucune nouvelle.
Tout au bout
Jusqu'alors, le juge de la jeunesse autorisait deux visites par mois. Depuis fin juin, c'est terminé. Les rares nouvelles lui parviennent au compte-gouttes. On dit à Alyson qu'elle ne doit pas s'inquiéter, que "tout va bien", que son fils "évolue bien" dans sa nouvelle famille.
Mais cela s'arrête là. Quand il a fallu inscrire l'enfant à l'école, on ne lui a pas demandé son avis. "Je n'ai rien eu à dire".
Elle croit savoir où il est scolarisé.
Les tentations sont énormes. Mille fois, dit-elle, " j'ai été tentée d'essayer de l'apercevoir, même de loin, en me cachant". L'idée la traverse, mais elle résiste. "Je tiens bon afin de ne pas me mettre dans mon tort".
La seule décision à laquelle elle dit avoir été associée a été celle du choix de la religion.
L'entretien se prolonge. Par moments, Alyson monte sur ses grands chevaux et en veut à ces juges qui "ne comprennent pas", "qui n'ont pas de cœur", ne "m'écoutent pas" et ne "cherchent pas à me comprendre". À d'autres moments, Alyson se montre plus raisonnable.
On la sent devenir positive.
Neuf mois sans son fils n'ont pas été inutiles. Elle se dit prête à changer, s'améliorer, faire en sorte de se stabiliser. Elle a fait le tri dans ses relations. Elle suit des thérapies. Elle s'est inscrite à des formations et espère trouver du travail. Elle voudrait devenir ambulancière.
Son appartement n'est pas très grand, mais Alyson en fait un endroit confortable, agréable à vivre. Il y aura une petite chambre.
Alyson veut devenir la maman forte, stable et courageuse dont son fils a besoin.
Elle n'a que vingt-huit ans. Elle sait que le chemin sera long et semé d'embûches mais que l'enfant est dans de bonnes mains : une famille généreuse fait son maximum pour lui et le jour viendra où le petit garçon reviendra chez maman, avec son cœur et les bras grand ouverts.