Retrouvé avec plus de 2g d'alcool dans le sang, dans sa voiture à 3h du matin, la tête affalée sur le volant : acquitté !
Il cuvait l'alcool au volant : acquitté malgré 2,33 grammes par litre dans le sang !
Publié le 25-05-2023 à 13h46
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Après, on dira que la décision est logique. Encore fallait-il l'obtenir et ce n'était pas gagné, assure l'avocat Christophe Redko qui sait à quel point, nous disait-il, "le parquet faisait tout un foin de cette affaire".
Les circonstances
Nous sommes la nuit du 30 septembre 2021, un jeudi, et il est 3 h 10 du matin. Nous sommes à Waterloo, à la chaussée de Bruxelles où un coup de klaxon vient de réveiller les riverains. Lesquels, excédés, alertaient la police locale.
Sur place, la patrouille découvrait un véhicule stationné à hauteur du numéro 184. Un Ford Transit rouge dont le moteur tournait. Avec, assis sur le siège conducteur, un homme endormi, la tête affalée sur le volant.
Alexandre a 28 ans. Il habite à Braine-l'Alleud et, réveillé, déclarait aux policiers avoir passé la soirée en compagnie d'amis. Ils avaient mangé thaï et n'avaient rien bu, ajoutait-il, en tout cas pas d'alcool.
Après le repas, Alexandre, selon ses dires, avait laissé les amis et s'était rendu seul à Waterloo. Il s'était arrêté chaussée de Bruxelles, là où les policiers l'avaient trouvé endormi.
Un détail est important : les verbalisants notaient que le pare-choc touchait un poteau de signalisation au point que ce poteau, déchaussé, penchait sur le côté, le lourd Ford Transit exerçant une pression sur lui. Enfin, le test d'haleine affichait un résultat de 1,02 mg d'alcool par litre d'air alvéolaire expiré.
Soit : 2,33 g/l par litre de sang. Près de 5 fois plus que la limite de 0,5 g...
La dernière circonstance ne plaidait pas en faveur d'Alexandre : un tribunal l'avait condamné trois mois plus tôt pour défaut d'assurance.
Nul besoin de faire un dessin : Alexandre risquait gros, sans parler de la facture de la remise en état du poteau, la police de Waterloo s'étant bien sûr mise en devoir d'alerter les services compétents.
Alexandre a dû comparaître dix-huit mois plus tard devant le tribunal de police du Brabant wallon, division Nivelles. Pas de chance : celui-là même qui l'avait condamné trois mois plus tôt. L'avocat Christophe Redko le défendait.
Nul besoin de faire un dessin : Alexandre risquait gros, très gros. Mais, parfois, les apparences...
Tête sur le volant
L'histoire montre qu'il faut se méfier des apparences et des conclusions hâtives. En réalité, que s'était-il passé ? Après le souper thaï à Braine-l'Alleud où il maintient n'avoir pas consommé d'alcool, Alexandre a effectivement pris le volant afin de se rendre à Waterloo. Il s'est donc stationné chaussée de Bruxelles, se parquant en effet contre le poteau, mais ce poteau, explique-t-il, penchait déjà avant qu'il se gare. Il était 23 heures.
Il s'est alors rendu à pied dans un établissement situé à dix minutes de là sur la même chaussée de Waterloo.
Il y a effectivement bu. "Au moins deux cocktails", dit-il, composés chacun de cinq alcools différents. Vers 2 h du matin, des clients l'ont raccompagné jusqu'à son véhicule.
Estimant qu'il n'était pas en état de conduire, Alexandre s'est endormi. Sa tête, tombant sur le volant, a déclenché le klaxon, lequel a réveillé le quartier. Et les agents, alertés par le voisinage, l'ont trouvé dans cet état.
Or le moteur tournait
C'était sa version mais comment démontrer sa véracité avec les éléments se trouvant dans le dossier ? Christophe Redko a commencé par établir que si le Ford Transit touchait le poteau et si celui-ci penchait, le véhicule de son client ne présentait aucun dégât de carrosserie. En bonne logique, Alexandre n'était donc pas celui qui avait déchaussé le poteau, ce dont il ne pouvait être tenu responsable.
Et puisqu'aucun dégât de carrosserie n'avait été constaté, Me Redko tenait la preuve qu'alors qu'il circulait, son client avait gardé en permanence le contrôle du véhicule.
Quant à le condamner pour conduite en état d'ivresse, le mot 'conduite' nécessite, en bon français, d'avoir... conduit. Or puisque les policiers l'avaient trouvé endormi sur le siège conducteur, où était la preuve qu'Alexandre avait... conduit ?
Christophe Redko reprochait aux verbalisants d'avoir négligé d'interroger les clients de l'établissement qui avaient raccompagné Alexandre à son véhicule vers 2 heures du matin, et auraient pu confirmer sa version.
L'affaire, pour l'avocat, se résumait à un conducteur plutôt prudent qui, sachant qu'il avait bu, au lieu de prendre le volant, se reposait dans le véhicule où les policiers l'avaient trouvé endormi, la tête couchée sur le klaxon.
Et la juge lui donne raison sur toute la ligne. Elle ajoute qu'Alexandre a d'ailleurs répété à plusieurs reprises qu'il n'avait eu à aucun moment l'intention de reprendre la route. Elle relève encore que les policiers, arrivant sur place, "n'ont pas constaté que le moteur fonctionnait".
Ce qui, en réalité, est... faux. Au contraire, les policiers relataient que le moteur tournait, ce à quoi Alexandre avait d'ailleurs eu la belle présence d'esprit d'expliquer qu'il faisait froid dehors.
Au final, le tribunal estime qu'il "ne résulte pas du dossier qu'Alexandre a conduit en état d'imprégnation alcoolique". En conséquence de quoi il acquitte celui qui, en récidive, trouvé au volant d'un véhicule dont le moteur tournait et contrôlé positif avec 2,33 g/l d'alcool dans le sang, avait les apparences contre lui. Et qui, condamné trois mois plus tôt pour roulage, risquait une déchéance et jusqu'à 2 000 euros d'amende.