Cécile a 50 ans et, depuis plus de 30 ans, elle ne passait plus une nuit correcte sans Lorazepam. Insomniaque, elle n'a pas particulièrement de difficultés à s'endormir, même si elle veille tard depuis toujours mais se réveille souvent entre 4 et 6h et parfois bien avant. Du plus loin qu'elle s'en souvienne, en vacances, pendant les camps scouts, elle a toujours été la dernière à s'endormir et la première à se réveiller : « Je me disais : comment font ces gens pour dormir si bien ? C'était impensable pour moi. Mais au moins, j'ai toujours bien aimé être la première réveillée pour profiter du matin, du silence de la maisonnée »
Une petite consolation pour celle qui dit dormir « peu et pas bien » depuis l'université : « Un jour, ma mère m'a donné un anxiolytique, cela n'avait pas du tout mauvaise réputation à cette époque. Et j'ai pu dormir enfin ! Résultat, j'en ai pris 1 mg tous les soirs pour passer des nuits à peine correctes jusque récemment ». Depuis peu, Cécile a retrouvé un cycle régulier d'environ 6h sans comprimé, en quelques séances avec une psychologue spécialisée en troubles du sommeil à la clinique du sommeil de l'hôpital Brugmann.
Ordonnances falsifiées« Je suis d'abord allée voir un somnologue qui m'a rassurée sur mon cas et le dosage que je prenais. C'est vrai que je me suis toujours refusée à augmenter ma prise pour mieux dormir, je ne voulais pas entrer dans une spirale médicamenteuse. Je me suis beaucoup renseignée sur cette molécule, ses effets sur le cerveau, j'en avais peur... Même si je n'ai jamais eu aucun effet secondaire, j'ai préféré mal dormir que d'en prendre toujours plus ». Le spécialiste lui conseille alors une thérapie brève.
Après trois décennies d'insomnies, Cécile prend finalement rendez-vous en février. Ce qui l'a poussée à agir ? Le décès de son médecin de famille et ami, « là j'ai compris que je ne pourrais plus avoir d'ordonnances de Lorazepam à volonté. J'ai commencé à ne plus penser qu'à ça, je demandais à mes amis s'ils pouvaient s'en procurer pour moi, j'ai même falsifié des ordonnances, cette peur du manque me polluait la vie ! » Et la tenait d'autant plus éveillée la nuit. « Lorsqu'il fallait ensuite aller travailler 9h durant, c'était insupportable ».
Camille Totté, psychologue spécialisée dans les troubles du sommeil confirme : « Lorsque l'on ne dort pas, le sommeil devient une obsession et plus l'obsession est forte, plus l'anxiété et le stress augmentent et... moins l'on dort ».
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