Faut-il interdire Facebook au boulot? (Infographie)
Selon Olivier Moch, expert en communication, un patron a tout à perdre en interdisant Facebook. Mais il n'y pas que les réseaux sociaux qui carburent. La DH est ainsi le premier site d'info lu depuis le bureau. Découvrez notre enquête sur internet au travail!
Publié le 13-04-2015 à 18h17 - Mis à jour le 14-04-2015 à 13h13
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Selon Olivier Moch, expert en communication, un patron a tout à perdre en interdisant Facebook. Mais il n'y pas que les réseaux sociaux qui carburent. La DH est ainsi le premier site d'info lu depuis le bureau. Découvrez notre enquête sur internet au travail!
"L’entreprise qui prohibe Facebook se trompe"
Toutes les stats convergent : dans la classe européenne, la Belgique est l’un des élèves les plus assidus aux réseaux sociaux. Facebook y est, comme ailleurs, mais dans une proportion plus grande encore, la star incontestée : plus de 5,5 millions de Belges y possèdent un profil, que 66 % d’entre eux consultent quotidiennement, un peu moins de 19 minutes durant. En moyenne, les Belges vérifient leur mur vingt fois par semaine. Dont, forcément, quelques connexions émanant du lieu de travail…
Or, si les employés belges sont Facebook-addict, les employeurs y sont particulièrement rétifs. Du coup, énormément d’entreprises jugulent, voire bloquent totalement l’accès au réseau des réseaux. En 2009, une entreprise belge sur trois fermait les portes du réseau social. Selon Insites Consulting, c’est le chiffre de quelque 20 % d’employés condamnés au sevrage social qui émerge.
"La Belgique patronale a effectivement une réputation, justifiée, de réticence par rapport aux réseaux sociaux dans l’entreprise", nous éclaire Olivier Moch, expert en communication, auteur du livre Managers, communiquez mieux avec vos collaborateurs. "C’est toutefois en pleine mutation : notre pays a mis le temps, mais le management commence, enfin, à saisir l’intérêt des outils sociaux pour la culture d’entreprise."
Pour Olivier Moch, c’est plus qu’un intérêt. "Aujourd’hui, 33 % des employés belges sont des digital natives (des personnes nées avec les nouvelles technologies, NdlR). Ce n’est, déjà, pas négligeable. Mais dans cinq ans - soit demain -, cette proportion passera à 58 % ! En tant qu’employeur, vous ne pourrez bientôt plus vous permettre de priver, au boulot, quelqu’un pour qui les réseaux sociaux sont devenus un geste naturel, un moyen de communication permanent et quotidien. Sur les plans de la confiance et de la motivation, l’interdiction est infantilisante et contre-productive. L’entreprise qui prohibe Facebook, aujourd’hui, est une entreprise qui est dans l’erreur."
Mais 50 minutes par jour à surfer pour son plaisir, n’est-ce pas du temps, et donc de l’argent perdu pour l’employeur ? "Je ne le crois pas. Lorsqu’il surfe, même pour son compte, un employé peut s’enrichir, et enrichir sa structure. On pense à un contact dont il ferait bénéficier son entreprise, une info... Facebook n’est pas juste une plaine de jeux : c’est aussi un moteur de recherche truffé d’informations pertinentes ! Et quand bien même : 50 minutes sur le web à fins privées, en quoi est-ce moins productif qu’un fumeur qui prend cinq pauses-cigarette par jour ?"
Notre expert va plus loin : "Selon moi, les réseaux sociaux sont tout à fait adaptés pour devenir le moyen de communication interne privilégié de l’entreprise. On vous prend pour un fou lorsque vous dites cela en Belgique, mais Renault a créé son propre réseau social ! Un autre géant, Sodexo, a depuis longtemps délaissé l’Intranet pour utiliser un groupe secret, sur Facebook. Pourquoi inventer l’eau chaude, quand elle existe déjà ?"
Surf au bureau : 50 minutes/jour pour le fun !
Fléau des employeurs, bulle d’oxygène des employés, Facebook & Cie, au bureau, posent encore débat…
Un chouïa plus qu’une mi-temps d’un clasico, pile le temps qu’il faut pour visionner un épisode entier de Game of Thrones, fût-il leaké. Soit précisément 50 minutes.
Chers salariés consentants, chers employeurs en quête de rentabilité maximale : voilà le temps passé, chaque jour, en moyenne, par les employés à surfer sur Internet, à fins privées. Soit, en Belgique, essentiellement : sur des forums (22 % des sessions), des réseaux sociaux (17 %), des sites d’actualité (14 %), des plateformes de streaming vidéo ou radio (10 %), des sites d’e-shopping (6 %), de jeux d’argent (5 %), voire, plus coquin, pornographiques (3 %).
50 minutes par jour , c’est 44 % du temps moyen passé par les employés sur Internet dans l’entreprise par jour, soit 1h53. Voilà donc 44 % du temps passé en ligne qui file entre les mains de l’employeur… Porté sur l’année, cela pèse tout de même 25 jours par an et plus d’1,2 mois de salaire brut employeur ! C’est lorsqu’il arrive au boulot (entre 8h et 9h) et qu’il aborde ou sort de sa pause déjeuner (entre 11h et 15h) que l’employé surfe, le plus, pour son compte.
Ces chiffres, qui disent tout haut ce que beaucoup d’employés cliquent tout bas, nous viennent d’Olfeo, éditeur français d’une solution de proxy et de filtrage de contenus Internet. Ils sont le fruit de l’analyse des journaux d’une centaine d’entreprises, pesant 150 000 employés, dont une partie est belge (mais aussi française, allemande, hollandaise et suisse).
Et ils vont assurément relancer, en comité d’entreprise, les stratégies à mener pour juguler cette perte sèche…
Rappelons qu’en Belgique, une entreprise a totalement le droit de bloquer, limiter ou contrôler (de manière uniforme pour chaque employé, en respectant sa vie privée) l’accès à certains sites ou services web.
De là à dire que c’est pertinent, en 2015, le débat est autre.
DH.be, premier site d’info lu depuis le bureau
Selon l’étude d’Olfeo, le site web assimilé à votre quotidien préfé, dh.be, est le seul site d’information francophone qui figure dans le top 15 des sites consultés depuis le lieu de travail, en Belgique. Derrière Facebook, YouTube et Wikipedia (comme quoi, on est manifestement aussi désireux d’apprendre à ses heures perdues…), mais devant Immoweb (recherche immobilière) et Kapaza (vente d’occasion).
Nicolas Christiaens, coordinateur dh.be, est "ravi, mais pas totalement surpris. L’analyse de nos audiences montre, systématiquement, un pic entre 12h et 13h30. Avec 85 % de connexions établies depuis un PC de bureau, alors qu’en soirée, la part de connexion depuis un appareil mobile augmente. On nous suit donc beaucoup au bureau, dans la foulée ou pendant l’heure de table. On le constate de manière encore plus directe lorsque nous réalisons des livechats durant les heures de bureau. Comme pendant le Tour de France, par exemple : là, nos internautes confessent ouvertement nous suivre depuis leur lieu de travail…"
Après le burn-out, v’là le bore-out
Le syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui prend de l’ampleur.
Bien qu’il tarde à convaincre les ultimes sceptiques, le burn-out, alias le mal du 21e siècle, est officiellement reconnu en Belgique comme maladie professionnelle depuis le 1er septembre dernier.
Le bore-out suivra-t-il la même voie ? Un peu d’étymologie, d’abord : le burn-out, c’est le fait de se sentir malheureux dans son travail, à cause de l’ampleur des tâches à effectuer, et du stress qui y est lié. Le bore-out prend la tendance inverse : ici, on n’est pas brûlés (littéralement) par le boulot, mais plutôt par l’ennui lié à l’absence de boulot.
Les conséquences, en revanche, sont identiques : tant burn- que bore-out pouvant conduire à une dépression sévère. Pour autant, le burn-out est bien plus dicible que le bore-out, même si ce dernier n’est pas moins présent dans nos bureaux : dans The bore-out-syndrom, un article publié en 2011 dans La Revue internationale de psychologie et de gestion des comportements organisationnels, Christian Bourion et Stéphane Trebucq assurent que "cette maladie honteuse d’un Occident où il n’y a plus assez de travail" toucherait jusqu’à 30 % des salariés. Et l’on parle autant des quinquagénaires en déficit de challenges que de primo-arrivants sur un marché de l’emploi saturé, qui ont sauté sur le premier job alimentaire disponible.
Quid en Belgique ? En 2009, une étude de Stepstone réalisée sur près de 12.000 salariés considérait qu’entre 21 % et 39 % d’entre eux n’avaient pas suffisamment de travail pour remplir leurs journées.