Faut-il moins punir la consommation de drogue? “C’est le sens de l’histoire, fixons des règles sur le marché des stupéfiants!”
Julien Uyttendaele (PS) demande au Sénat un rapport d’évaluation de la loi drogue de 1921. Une première étape pour faire évoluer la loi vers moins de répression.
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Publié le 24-02-2021 à 07h48
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La loi drogue du 24 février 1921 fête son centenaire ce mercredi. Elle a été prise à l’époque pour lutter contre... la consommation d’opium. "On doit avoir une réflexion sur toutes les substances, pas seulement le cannabis. Le cannabis doit être la première étape, vu son caractère plus que répandu, mais la réflexion doit être étendue. Le vrai problème qui se pose est un problème de santé publique. Actuellement, le remède contre la consommation d’une drogue illicite, c’est la répression. On offre comme solution sanitaire une amende, un P.-V., un emprisonnement. Et au bout du compte une stigmatisation du consommateur, ce qui ne l’aidera jamais", pointe Julien Uyttendaele (PS), sénateur et avocat pénaliste de profession. Il veut obtenir du Sénat la rédaction d’un rapport d’évaluation de cette loi de 1921. Une première étape de l’évolution de la loi vers moins de répression, espère-t-il. "C’est le sens de l’histoire, juge Julien Uyttendaele. La première étape consiste dans l’évaluation de cette loi avec tous les acteurs : la police, le parquet, le secteur pénitentiaire, les acteurs de terrain, les consommateurs, etc. Pour qu’on puisse avoir enfin un véritable rapport objectif. On discute avec les autres partis. On n’a pas tous la même vision mais beaucoup comprennent qu’il faut évaluer la loi. Et que c’est la première étape vers une évolution. Quand on a une législation de 100 ans qui remplit la moitié des prisons (52 % en 2018), il faut se poser la question de son efficacité."
La croyance populaire selon laquelle "la consommation de cannabis est tolérée" a du plomb dans l’aile, selon le Bruxellois. "Les dernières circulaires ministérielles créent un rétropédalage. L’histoire des trois grammes, ça n’existe plus ! Le précédent gouvernement en est revenu à une tolérance zéro . On dénombre 70 % de P.V. qui concernent la simple détention de drogue et seulement 18 % pour le commerce et l’importation de drogues. Cela peut avoir des répercussions pénales."
Pour le socialiste, les principaux opposants à une remise en question du système sont les réseaux criminels eux-mêmes. "Il y a un marché : une offre et une demande, mais pas de règles. Ce sont les réseaux criminels qui les fixent. Ils visent le profit. Évidemment, ils ne vont pas demander la carte d’identité des gamins qui en achèteraient, constate-t-il. Je n’utilise pas le terme légalisation, mais il faut fixer des règles sur ce marché. On a beaucoup à apprendre des réussites et des échecs des politiques de prévention de l’alcool ou des cigarettes. Ne faut-il pas se poser la question d’interdire le profit dans ce marché de la drogue ? Si le lobby de l’alcool et du tabac sont si puissants, c’est parce qu’il y a derrière un but lucratif. Dans une première phase, on entrerait en concurrence avec le marché criminel. Il faut une politique de prix qui assèche ce marché. Le consommateur préfère payer un euro de plus par gramme pour du cannabis sûr. Il faudrait une Afsca du cannabis, avec des contrôles efficaces de la qualité."