Le serial killer Patrick Bateman, campé par Christian Bale dans American Psycho, devenu égérie de mâles désabusés: ils l'imitent sur TikTok

Le personnage new-yorkais est un banquier golden-boy boursouflé par ses fringues de marque, ses dégustations dans des restos huppés et son appart nickel design. Mais son “hobby” contraste avec la forme. Bateman torture et tue cruellement, notamment des femmes qu’il hait au possible.

Signe des temps, de nombreux internautes, jeunes surtout, l’érigent aujourd’hui en modèle de masculinité. Sur TikTok, les publications, extraits de film à l’appui, glorifient cet énergumène. Des milliers de montages y apparaissent en son honneur. Le nouveau jeu à la mode consiste à imiter sa gestuelle sanguinaire et son jeu de visage “pepsodent” et, à la fois, désaxé. Ses néofans s’autofilment et diffusent leur performance sur le réseau social à des fins de concours de mimétisme. Pour certains, ce jeu relève de la blague, pour d’autres d’un véritable style de vie fascinant.

La philosophie de vie de Bateman les fascine : nihiliste, détachée, voire désabusée, sportive à en sculpter son corps, et misogyne. Dans ce créneau-là, le cynique Tyler Durden, le héros du film Fight Club campé par Brad Pitt, le rejoint, sur les réseaux sociaux, au rang des exemples à suivre, tout comme Leonardo Di Caprio dans Le Loup de Wall Street.

Tous trois, selon ces adeptes, incarnent ce qu’ils appellent un “mâle sigma”, renvoyant à un idéal masculin. Fin 2022, le mot-clé sigma a atteint 36 milliards de vues sur Tiktok et SigmaBateman 2,4 millions de vues.

Avec la terminologie sigma, on parle de solitaires autosuffisants, adhérant au système capitaliste, et qui ont, pour valeur suprême, un mode de vie focalisé sur l’apparence physique. Un homme sigma est un homme qui n’a pas besoin d’être validé par d’autres personnes. Il n’est pas bruyant ou effronté, mais calme et posé. Un mâle sigma est un homme introverti, “loup solitaire”, mais confiant. Les sigma choisissent de ne pas se positionner dans la hiérarchie de dominance. Tu ne peux pas dire aux sigma comment s’habiller ou comment agir. Ils font ce qu’ils veulent, luttant contre l’autorité.

Le choix de Patrick Bateman comme icône des sigma n’est pas totalement judicieux. D’abord, le personnage tue des gens pour le plaisir, ce qui n’est pas l’apanage de cette catégorie.

Ensuite, ceux-ci ne sont pas hiérarchistes. Or, Bateman trouille à l’idée de perdre son statut de golden-boy. Il cherche à s’intégrer parmi les gens de son rang.

Et puis, les sigma ne sont pas (plus que d’autres) misogynes et ils ne sont surtout pas encrassés par le matérialisme, source de dépendance.. Or, dans une scène culte, Bateman se retrouve avec des collègues de son standing à comparer le degré de frime se dégageant de leur carte de visite.

Un peu comme si des mâles comparaient entre eux la longueur de leur…