Le coup de gueule d’un médecin bruxellois : “22€ pour 4h30 de stationnement: se garer est devenu impayable à Bruxelles”
Plusieurs automobilistes dénoncent les tarifs pratiqués dans la capitale. La Région bruxelloise assume et se justifie.
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- Publié le 16-09-2023 à 07h11
- Mis à jour le 16-09-2023 à 10h05
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La gestion du stationnement en centre-ville est souvent source de tensions entre les automobilistes qui estiment, en grande majorité, qu’ils paient trop, et les autorités publiques qui doivent prendre des décisions pour assurer une rotation des véhicules et ainsi éviter que des voitures-ventouses monopolisent les places de stationnement.
Entre le gratuit, les zones à disques et le stationnement payant, quel est le meilleur choix ? “Il n’y a pas de solution miracle”, nous indiquait, en janvier, Jean-Luc Calonger, président de l’Association de Management de Centre-Ville (AMCV).
À Bruxelles, la Région a fait son choix. Depuis quelques semaines, une ordonnance régit le stationnement. Avec un impact sur le portefeuille revu à la hausse. “C’est devenu impayable, commente Hassan, gynécologue à Bruxelles.

L’homme sait de quoi il parle : lorsqu’il se rendait dans son centre médical de l’avenue Louise, il ne devait débourser que 12,5€ pour 4h30 de stationnement, il y a encore quelques semaines. Aujourd’hui, le tarif est désormais passé à 22 € ! “C’est presque le double, commente-t-il. Personnellement, j’ai besoin de ma voiture pour me déplacer en cas d’urgence. C’est une nécessité pour moi. Et si j’ai le malheur de dépasser de quelques minutes parce que j’ai dû rester plus longtemps avec une patiente, je risque une amende qui, elle aussi, a augmenté.”
L’homme comprend qu’il faille éviter les voitures qui stagnent toute la journée au même endroit. “Mais il faut aussi penser aux gens qui ont parfois des difficultés à terminer les fins de mois. Les tarifs sont exagérés.”

Bon à savoir : les médecins et professions médicales peuvent obtenir une carte de stationnement gratuite de la Région, nous indique le cabinet de la Ministre de la Mobilité, Elke Van den Brandt.
À Jette, Mélanie a subi la même mésaventure. Ayant dernièrement passé l’après-midi chez ses parents avec ses enfants de 4 mois et 3 ans, elle s’est dite estomaquée par la note finale. “J’ai payé 20 € pour 4 h de stationnement, c’est énorme”, se désole-t-elle. Elle aurait pourtant pu se garder dans le parking de la place du Miroir, situé à distance raisonnable de marche. “Mais il est trop loin pour pouvoir m’y garer quand je suis avec mes deux enfants en bas âge.”
Qualifiée de “voleurs” sur les réseaux sociaux, l’agence parking.brussels se dédouane : “Nous appliquons les tarifs mis en place par l’ordonnance bruxelloise en matière de stationnement”, comment Pierre Vassart, son porte-parole.
Contactée, la Région bruxelloise, par l’intermédiaire de sa ministre de la Mobilité, Elke Van den Brandt, assume. Avec une justification qui, même emprunte de bon sens, ne plaira pas à tous. “Notre politique est d’encourager les alternatives au stationnement en ville, commente Marie Thibaut de Maisières, attachée de presse de la ministre bruxelloise. Et la politique de stationnement est un levier essentiel en la matière. L’objectif de la nouvelle ordonnance est d’encourager le stationnement hors-voirie en renvoyant les automobilistes dans les parkings souterrains ou à étage (NDLR : Interparking) ou de BePark (NDLR : du stationnement public sur des parkings d’entreprises, de supermarchés,…). Mais avant l’ordonnance, ces derniers n’étaient pas compétitifs et les automobilistes préféraient tourner, parfois de longues minutes, dans les quartiers afin de trouver une place en rue.”

Désormais, avec la hausse des tarifs en surface, les parkings concédés à Interparking ou gérés par BePark sont devenus moins chers que ceux en surface. “Nous souhaitons que le premier réflexe de l’automobiliste qui vient en centre-ville se garer, soit de chercher une place hors-voirie..”
Objectif final : libérer l’espace public dédié aux voitures pour le rendre aux piétons et doper l’attractivité du centre-ville. “Cela permet d’améliorer l’espace public en récupérant des places dédiées au stationnement pour les rendre plus chaleureuses et accueillantes. Par la plantation de zones vertes, la mise en place de terrasses pour cafés et restos comme on a pu le faire, avec un certain succès, dans le centre avec le piétonnier.”

Pour la ministre elle-même, la situation à Bruxelles ne pouvait plus durer. “53 % des ménages bruxellois ne possèdent pas de voiture, affirme Elke Van den Brandt. C’est le cas de 70 % du quart le plus pauvre de la population. Or, la voiture occupe 72 % de l’espace public, particulièrement dans les quartiers plus précarisés, où les habitants n’ont pas de jardin ou d’espaces verts. L’espace public est donc la prolongation de leur logement. Nous voulons rendre nos rues et nos places plus agréables, plus vertes, plus accueillantes. Mais actuellement, beaucoup d’espace est occupé par des voitures garées. Nous voulons donc encourager les gens à ne plus se garer en rue.”
À l’heure actuelle, 11 communes appliquent les tarifs harmonisés par la Région. Les autres (Auderghem, Bruxelles-Ville, Etterbeek, St-Gilles, St-Josse, Uccle, et les deux Woluwe) les appliquent partiellement voire pas du tout. Elles pourraient y être contraintes si la tutelle ou le gouvernement l’estimaient nécessaires. L’autre voie serait un recours en justice mais, étant donné les tarifs moins élevés dans ces communes, on doute qu’un automobiliste décide d’en arriver là.