Factures d’énergie, les régularisations commencent à tomber, et c’est moins grave que prévu : les fournisseurs nous ont-ils pris pour des banquiers ?
Nombreux sont les clients qui retouchent finalement de l’argent, alors qu’on s’attendait à une vague de factures hors de prix.
Publié le 02-02-2023 à 06h46 - Mis à jour le 02-02-2023 à 09h35
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Ces dernières semaines, les nouvelles sont plutôt bonnes sur le front de la crise énergétique. Les prix du gaz ont fortement chuté sur les marchés, et la situation semble se stabiliser. On tourne depuis quelques semaines désormais entre 55 et 60€ du mégawattheure. On est très loin des records de la fin de l’été – jusqu’à 340€ du mégawattheure – mais il faut dire aussi qu’on reste avec des prix trois à quatre fois plus élevés par rapport la situation d’avant crise. Il ne faut donc pas se réjouir trop vite et rester attentif à la situation en Ukraine, où la guerre fait toujours rage.
Mais revenons en Belgique, où des milliers de consommateurs payent encore aujourd’hui des acomptes beaucoup plus élevés qu’avant. Et ce début d’année coïncide avec l’arrivée des factures de régularisation annuelles. Ces derniers mois, nous avons relayé de nombreux témoignages de consommateurs qui se retrouvaient avec des milliers d’euros à payer, en plus d’une augmentation de leur acompte. Cette année, on pouvait craindre une nouvelle vague de facture hors de prix, mais la situation semble plutôt sous contrôle. En effet, beaucoup de consommateurs s’étonnent aujourd’hui de ne payer que quelques dizaines d’euros de supplément, voire de retoucher de l’argent, parfois plusieurs centaines d’euros !
Bien sûr, tout le monde n’aura pas cette chance, mais on peut se demander si les consommateurs n’ont pas joué le rôle de banque pour les fournisseurs. Pour Damien Ernst, ce n’est pas à exclure. “Beaucoup de consommateurs se retrouvent à retoucher de l’argent au moment de la facture de régularisation, confirme-t-il. En fait, cela vient essentiellement de la hausse des acomptes observée dès le printemps, mais surtout à la fin de l’été, quand les prix ont battu tous les records. Les fournisseurs ont fortement augmenté les acomptes des clients, mais les prix ont fortement baissé depuis lors. Les acomptes, eux, n’ont pas baissé, ou très peu et un grand nombre de personnes ont trop payé pendant quelques mois.”
"Ce qui est clair, c’est que les fournisseurs ont eu des problèmes de liquidités et qu’on a d’une certaine façon joué le rôle de banque pour les fournisseurs"
Il reste prudent pour autant. “Attention, on n’est pas face à une arnaque. Ce n’est pas du vol. Il y a un régulateur qui surveille aussi ce que font les fournisseurs, ils ne peuvent pas faire n’importe quoi. Mais ce qui est clair, c’est que les fournisseurs ont eu des problèmes de liquidités et qu’on a d’une certaine façon joué le rôle de banque pour les fournisseurs. Est-ce que cet argent a permis de faire des bénéfices ? Vu les taux d’intérêt à l’heure actuel, il ne faut pas s’inquiéter.”
Un autre élément à prendre en compte, c’est la baisse de la consommation de l’ensemble des ménages. Les acomptes sont en effet calculés sur base de la consommation de l’année précédente, ce qui peut aussi expliquer une partie des sommes retouchées par les ménages. “Il y a aussi eu cette volonté des fournisseurs d’éviter d’envoyer des factures de régularisation énormes qui ne seront pas payées. En 2022, il y a eu beaucoup de retard de paiement et cela leur a posé problème.”
"Les fournisseurs ont été plus proactifs pour proposer (voire imposer) des hausses d’acompte plutôt que des baisses, ce que nous avons largement dénoncé"
Du côté de Test Achats, on reste attentif à la situation. Si l’association de défense des consommateurs ne veut pas incriminer les fournisseurs, elle appelle à diminuer les acomptes des consommateurs. “Nous n’avons aucune preuve tangible que les fournisseurs auraient délibérément gonflé artificiellement les acomptes. On sait que déterminer en amont un montant d’acompte correct dans une période de prix extrêmement volatils, n’est pas chose aisée. Ajoutons que tous les fournisseurs n’ont pas augmenté proactivement et régulièrement les acomptes, c’est surtout Mega qui a été actif dans ce domaine. Les autres se sont souvent limités à proposer des augmentations, rappelle Julie Frère, porte-parole de Test Achats. Le fait de récupérer le trop payé est à notre sens dû à deux facteurs : la baisse des prix de l’énergie d’une part et le fait que les consommateurs ont moins consommé. À cela s’ajoute évidemment le fait que les fournisseurs ont été plus proactifs pour proposer (voire imposer) des hausses d’acompte plutôt que des baisses, ce que nous avons largement dénoncé. Nous demandons d’ailleurs que tous les fournisseurs mettent à disposition de leurs clients des outils faciles pour adapter le montant de leur acompte (en rentrant leur index sur l’espace client pour avoir une vision claire du prix en cours pour leur contrat avec leur conso) et en proposant proactivement des baisses d’acompte. Dans l’intervalle, on recommande aux consommateur.trice.s de vérifier le montant de leur en utilisant un calculateur comme le nôtre.”