Pourquoi a-t-on plus d'empathie pour les réfugiés ukrainiens que pour les Syriens ou les Africains ? La chronique psy-toyenne
Une vague de compassion et de sympathie s'est manifestée envers les réfugiés ukrainiens arrivés chez nous. Ce qui a donné lieu à une solidarité bien plus massive et active que celle observée auprès des autres réfugiés ou demandeurs d’asile. Mais pourquoi ce "favoritisme" ?
- Publié le 22-05-2022 à 09h45
- Mis à jour le 25-08-2022 à 17h26
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D'abord, tout est dans les termes utilisés tant par les politiques que les médias et les citoyens. On parle de "migrants" concernant les Syriens ou les réfugiés fuyant leur pays en Afrique alors que l'on parle de "réfugiés" pour les Ukrainiens. Migrant, cela renvoie dans l'imaginaire collectif à une masse sans nom, sans visage, déferlant sur l'Europe et gagnant la Belgique avec l'aide payante de passeurs alors que le terme réfugié renvoie à une autre acception, avec une notion de guerre, de danger et de mort. Ici on a parlé directement de réfugiés ukrainiens, de droit acquis, alors que les autres passent par la case demandeur d'asile, avec cette notion de 'mendicité', avec possibilité de ne pas être reconnus, et renvoyés dans leur pays.
Cette guerre en Ukraine a été aussi fortement documentée par des histoires de vie, en Ukraine ou en Belgique : on ne parlait pas de "groupes de migrants" mais de "familles réfugiées", venues rejoindre qui un cousin, qui une tante... L'empathie vient plus facilement lorsqu'il y a personnification, lorsque l'on peut se projeter en quelque sorte dans des gens qui nous ressemblent. Car oui, les Ukrainiens, blancs et caucasiens, dont la culture est plus proche de la nôtre, dont on achète le blé et de nombreuses matières premières, nous semblent plus « compréhensibles », même s'ils ne parlent ni français, ni néerlandais. C'est le phénomène des neurones-miroirs qui se mettent en place : on peut presque parler d'un racisme positif par rapport à ceux que l'on estime nous ressembler, même inconsciemment. A culture égale, couleur de peau égale, difficultés égales, on donnera sa sympathie majoritairement à celui qui est le plus proche de nous en distance.
Pouvoirs publics et histoires de vie
Enfin, les pouvoirs publics, quels qu'ils soient, ont appelé massivement à la solidarité : les personnes qui ont aidé ont ainsi été "sublimées" par les politiques et mises en avant par les médias.
Comme on le disait, les réfugiés ukrainiens forment souvent des familles, il y a des hommes, des femmes, des enfants tandis que les réfugiés syriens ou de pays d'Afrique par exemple sont la plupart du temps des hommes seuls, dépersonnifiés.
Les médias qui décryptent mais décrivent aussi cette guerre et les arrivées des réfugiés ont un rôle crucial à jouer dans l'empathie envers tous les réfugiés. Même si leurs choix sont biaisés par ceux de la population, moins nombreuse à se sentir concernée par les conflits et les guerres au Moyen-Orient ou en Afrique.