Femmes "cougars"... l’invention des hommes couards ! La chronique psy-toyenne
Femme invisible après 50 ans, trop ridée, cheveux trop gris, ménopausée qui ne peut plus procréer. Ou au contraire, femme cougar, Milf à la sexualité bien trop débridée... Comme le regard de la société sur les femmes qui avancent est normatif et peu bienveillant ! Et pourtant, avec l'âge, les femmes acquièrent expériences et liberté et jouissent mieux de leur sexualité... que les hommes ! La chronique sans fard de la psychothérapeute Anne-Françoise Meulemans.
- Publié le 09-10-2022 à 08h52
- Mis à jour le 20-10-2022 à 10h54
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Qui d'autre qu'un homme a pu baptiser d'un nom aussi insultant la femme qui fréquente courtoisement ou fougueusement un homme plus jeune ? Un homme jaloux? Un homme qui a peur de perdre le contrôle, sa dominance dans le couple ?
Un homme qui a été biberonné à la psychanalyse machiste, et qui ne voit pas de souci à reconnaître la beauté virile des tempes grisonnantes chez les hommes, mais beaucoup moins à apprécier les cheveux ou les poils grisonnants des femmes. Sans parler des rides... Pourquoi les traits de vieillesse seraient plus seyants chez les hommes que chez les femmes ?
Une "simple" différence physiologique
Historiquement, l'homme est un procréateur jusqu’à sa mort, car la tache est minime. Si ce n'est son impuissance physiologique qui peut apparaitre avec l'âge, rien ne lui fait obstacle... Il peut procréer paresseusement en somme. Dans la procréation, tout autre chose est demandée à la femme : il ne lui suffit pas seulement de donner sa dot ovulaire, elle doit y consacrer tout son abdomen, et ensuite, ses seins et ses nuits...
Et puis, à la cinquantaine, tombe la bombe nommée ménopause : fin de la procréation. Depuis la nuit des temps, il est ainsi inscrit que cette « femme-là », cette femme âgée n’est plus bonne à rien. Une croyance culturelle et sociétale qui perdure encore et toujours, même si elle s’immisce de façon différente dans les relations.
Car oui, du point de vue de la longévité de la procréation, il n'y a pas d'égalité, mais du point de vue sexuel, il n'y en a pas non plus!
Et voilà la bonne nouvelle : cette inégalité ne va pas dans le sens que l’on peut imaginer. Avec l'âge, femmes procréent moins bien mais jouissent mieux de leur sexualité ! Alors que pour les hommes c'est tout le contraire. Elles ont plus d’expérience, plus de curiosité, plus de possibilités de connaître leur corps, leur sexualité grâce aux sextoys notamment.
Une sexualité féminine plus longue
Les femmes matures ont donc cette grande chance d'avoir une sexualité beaucoup plus longue que les hommes. Il serait presque à considérer comme statistiquement normal qu'elles choisissent des hommes plus jeunes, dont le niveau de performance sexuelle rejoint le leur.
Ce désir est pourtant vite moqué et le mot est lâché : les cougars sont de sortie…. Une femme au pouvoir dans la société civile passe encore mais une femme plus agée dans le couple… Quelle cougar. Le machisme que ce terme sous-tend n'atteint pas que les hommes, et pas tous, loin s'en faut, mais aussi les femmes, figées par des normes sociales presque inconscientes, presque à la Barbie et Ken.
Car les critères de beauté et d’esthétique ont toujours une importance démesurée. Et ils sont bien étroits pour la femme, et culpabilisants au fur et à mesure qu’elle avance en âge.
> Anne-Françoise Meulemans est médecin psychothérapeute, coordinatrice d' e-mergence et CentrEmergences . Chaque semaine, elle aborde ici une question psy ou citoyenne que chacun pourrait se poser par rapport à soi ou à la société.
Et voici les Milf !
Voici aussi les Milf, ces "Mothers I’d Like to F...ck" ou, en français ces "Mères bonnes à b...ser", acronyme pour qualifier une femme "d’âge mûr", la "mère d’un pote" qu’un jeune homme trouvera très désirable sexuellement. Une cougar qui n’a pas besoin de chasser, si l’on reste dans l’hypersexualisation qu’induisent ces termes. C’est pourtant bien plus proche de « Nique ta mère » (insulte suprême pour les Méditerranéens) que de l’idée d’un partage généreux d’expérience à plusieurs niveaux. Ceux qui l’emploient n’y voient pourtant pas malice ni machisme : après tout, on leur dit bien qu’elles sont désirables, alors silence ! Mais a-t-on déjà entendu parler de Filf ? Non, on parle de pygmalion, de mentor, ...
Loin de moi l’idée de jeter l’opprobre sur les couples où l’homme est bien plus âgé que la femme. Mais je veux dénoncer la différence de considération pour un couple où c’est la femme qui a plus d’années que son partenaire
Alors ouvrons le débat !
Les femmes d’un certain âge (celui de la ménopause) sont-elles condamnées à perpétuité à n’être plus que jugées si elles veulent encore vivre leur sexualité ?
Plus on en parle, plus on peut changer ce regard. A l’image du film « Les Jeunes Amants » qui met en scène une sublime Fanny Ardant en femme flamboyante de 70 ans qu’un homme et père de famille ne voit pas comme une femme d’un certain âge mais comme une femme désirable à tous niveaux dont il va tomber éperdument amoureux.
Le contrepied en somme aux propos de Yann Moix sur les femmes qui deviennent « vieilles et invisibles à partir de 50 ans ». Un homme à la sexualité bien faible et à la libido terriblement hétéro-normée. De ceux qui disent que si une femme ne jouit pas avec eux, c'est qu'elle est frigide, qu'une femme qui revendique est hystérique, qu'une femme ridée est une vieille femme. Toutes les faiblesses des hommes deviennent la faute des femmes.
Heureusement, pour de plus en plus d'hommes, et surtout parmi les nouvelles générations, l'amour et l'érotisation peuvent se construire sur l'humour du partenaire, sur sa brillance intellectuelle, sur sa culture et même la beauté de son corps regardé sans oeillère sociale !