Douze février, grande brûlée à 16 ans: "Il y a 10 ans, mon costume de carnaval s’enflammait à cause d’une cigarette"
Julie Bourges, alias Douze Février sur les réseaux sociaux, est suivie par plus d’un million de personnes suite à son tragique accident qui a tout fait basculer, le 12 février 2013. Elle vient de publier “Chaque jour compte” aux éditions Marabout. “Après 10 ans, le deuil de la jeune fille que j’étais est enfin fait.”
Publié le 18-02-2023 à 16h49
”Le 12 février est une date a jamais gravée… C’était le carnaval organisé par mon lycée. J’étais déguisé en mouton avec ma meilleure amie et, en fumant une cigarette en fin de journée, mon costume s’est enflammé. J’étais donc prisonnière des flammes. Mais je n’ai jamais perdu connaissance le jour de cet accident, c’est ce qui me permet de pouvoir le raconter en détail…”, confie ainsi Julie Bourges, cette passionnée de sport brûlée au 3e degré sur 40 % de son corps à 16 ans. Dix ans après, celle qui aujourd’hui évite de fumer sort un livre thérapie -Chaque jour compte- aux éditions Marabout. “Ce qui m’a fait tenir, c’est l’adrénaline, penser à mes parents et cette volonté de rester en vie. Je me souviens absolument de tout jusqu’à ce masque qui se pose sur mon visage pour me réveiller trois mois plus tard d’un coma artificiel. C’est ce qui a fait de moi ce que je suis aujourd’hui.”
Véritable modèle pour des milliers de jeunes femmes complexées, cette jeune femme de 26 ans originaire de Cagnes-sur-Mer délivre un message résolument optimiste, rappelle la règle des 3x15 en cas de brûlure (on met une eau à 15 degrés donc tempérée, pendant 15 minutes à 15 centimètres de la brûlure) et compte bientôt lancer une association en son nom. Plus de 620 000 personnes suivent désormais le parcours de Douze février sur Insta et plus de 230 000 sur YouTube, et s’inspirent de sa joie de vivre et de sa positivité malgré les épreuves. “C’était il y a 10 ans et, honnêtement, je l’aborde de manière différente que les années précédentes. Avec un peu plus de résilience et de reconnaissance par apport à tout ce que j’ai vécu. Dix ans, c’est un peu une boucle qui se boucle. Et le début d’un nouveau cycle. Cela m’a donc permis de l’aborder un peu différemment.” Et d’ajouter : “Il est vrai que chaque 12 février, c’est un moment que je prends un peu pour moi. Ce n’est pas que je m’oblige à revivre un peu le truc mais c’est comme un moment de recueillement, comme un deuil. Après 10 ans, le deuil de la jeune fille que j’étais avant est fait.”
Et depuis, donc, chaque jour compte.
”C’est un moyen un peu de revenir sur ces dix dernières années et de montrer à quel point la vie, parfois, elle peut être injuste. Je l’ai souvent trouvée injuste de m’avoir imposé cet accident. En tout cas, tant que je ne comprenais pas pourquoi cela m’était arrivé. Aujourd’hui, 10 ans après, je sais pourquoi cela m’est arrivé. Parce que j’avais déjà la force de me relever et de transmettre, aider les autres. Ce livre, 10 ans après, est donc un mélange de tout ça. On y retrouve toutes mes thérapies qui vont aider les personnes qui ont simplement envie de se retrouver et de se faire du bien.”
Est-ce facile de s’accepter comme grande brûlée ?
”S’accepter ou regarder son corps, c’est un chemin de toute une vie. Encore plus quand on voit son corps à travers le regard des gens. J’ai souvent laissé le regard des gens diriger ma vie, je me suis beaucoup couverte. J’ai énormément caché mes cicatrices derrière des vêtements et du maquillage. Dix ans après, j’ai appris qu’on ne pouvait pas interpréter le regard des gens. Mon regard sur mon propre corps a aussi changé avec le temps. Mes cicatrices, je ne les définis pas par ce qu’elles font de moi ce que je suis mais plus parce qu’elles font partie de moi et de mon histoire. Aujourd’hui, c’est différent de les montrer, je les vois plus comme des tatouages.”
Dans mes anciennes relations, j’ai toujours eu peur que mon mec se barre avec une meuf qui n’était pas brûlée..."
Des cicatrices visibles mais qui cache des invisibles…
”Celles sur mon cou sont les plus visibles et les plus flagrantes. Mais il y a aussi tout l’aspect psychologique, les traumas et les séquelles que cela peut laisser. Je me suis battue contre énormément de choses comme les drogues qu’on m’imposait à l’hôpital, les cauchemars du coma artificiel, de l’accident, etc. Des choses qui prennent du temps mais que l’on parvient à surmonter.”
Tout comme votre féminité qui en a pris un coup…
”Oui et comme je l’associe aux cheveux et que l’on m’avait rasé la tête, je ne trouvais plus rien de féminin en moi : ma peau, mes cheveux et le fait que j’étais devenue maigre. Dix ans après, j’ai compris que ma féminité, elle résidait ni dans mes cheveux ni dans ma peau mais surtout comment moi je me sentais avec moi-même. Quand on relève la tête, qu’on sourit et qu’on aime la vie, les gens le remarquent. Et c’est cela la féminité.”
Avec cette crainte des relations amoureuses ?
”Après mon accident, je suis restée seule pendant quelques années. Car, en fait, je ne m’aimais pas moi-même alors je ne voyais pas comment quelqu’un pouvait m’aimer. Et dans ma première relation, j’attendais d’un homme qu’il comble toutes mes failles, toutes mes douleurs et mon manque de confiance en moi. Ce qui a amené une relation assez toxique. Dans mes anciennes relations, j’ai toujours eu peur que mon mec se barre avec une meuf qui n’était pas brûlée... Mais aujourd’hui, j’ai la chance de vivre une relation hyper saine et réciproque donc la question ne se pose pas.”
Aujourd’hui, vous bénéficiez d’une forte communauté sur les réseaux sociaux. Paradoxal de vous être lancé sur ces supports sachant le regard nocif de certains internautes…
”Alors, en effet, à l’époque, Instagram était vraiment un pari risqué. Je crois que j’avais vraiment besoin d’aide. Un appel au secours. Je voulais savoir ce que pensent les gens de mes cicatrices car comme je me prends plein de regards dans la rue. Je voulais savoir ce que les gens pensaient de moi. Je m’étais dit que si j’avais besoin d’un retour que ce serait peut-être moins violent à travers mon écran. Un pari hyper risqué car si j’avais eu des retours négatifs à ce moment-là, je ne serais pas là aujourd’hui avec vous. Un cercle hyper vertueux avec des retours bienveillants et qui ont permis de m’aider à m’accepter.”
Comme cette étape du maillot de bain ?
”Me mettre en maillot est déjà un défi dans la vie de tous les jours. Le faire sur Instagram, ce sont des caps à chaque fois. Quand je le fais, je me dis aussi que j’aide plein de femmes qui n’osent pas le faire à cause de leurs formes ou vergetures. Donc si je le fais, elles peuvent aussi le faire. Ces brûlures ont révélé une partie de moi que je ne connaissais pas du tout. Quelqu’un de vraiment résilient, qui a la force de se relever. Je savais que j’avais de la force en moi mais pas autant. Mon tatouage Burn to be alive, en jeu de mots à Born to be alive -se brûler pour être en vie- est un moyen de m’en souvenir. Elles ne sont un frein à rien du tout et la vie continue après cela.”
Son tatouage "Burn to be alive" et l’étape du maillot de bain

Aujourd’hui, Douze février bénéficie d’une forte communauté sur les réseaux sociaux. Paradoxal, sachant le regard nocif de certains internautes…
"Alors, en effet, à l’époque, Instagram était vraiment un pari risqué. Je crois que j’avais vraiment besoin d’aide. Un appel au secours. Je voulais savoir ce que pensent les gens de mes cicatrices car comme je me prends plein de regards dans la rue, je voulais savoir ce que les gens pensaient de moi. Je m’étais dit que si j’avais besoin d’un retour, ce serait peut-être moins violent à travers mon écran. Un pari hyper risqué car si j’avais eu des retours négatifs à ce moment-là, je ne serais pas là aujourd’hui avec vous. Un cercle hyper vertueux avec des retours bienveillants ont permis de m’aider à m’accepter."
Comme cette étape du maillot de bain." Me mettre en maillot est déjà un défi dans la vie de tous les jours. Le faire sur Instagram, ce sont des caps à chaque fois. Quand je le fais, je me dis aussi que j’aide plein de femmes qui n’osent pas le faire à cause de leurs formes ou vergetures. Donc si je le fais, elles peuvent aussi le faire. Ces brûlures ont révélé une partie de moi que je ne connaissais pas du tout. Quelqu’un de vraiment résilient, qui a la force de se relever. Je savais que j’avais de la force en moi mais pas autant. Mon tatouage Burn to be alive, en jeu de mots à Born to be alive - se brûler pour être en vie - est un moyen de m’en souvenir. Elles ne sont un frein à rien du tout et la vie continue après cela."