Bruno Coppens et Pierre Kroll lancent leur "Dicovid" : "L’humour n’a pas osé parler des morts du Covid"
Le Covid a son vaccin, il a désormais son dictionnaire, le Dicovid, rédigé par Bruno Coppens et illustré par Pierre Kroll. Interview.
Publié le 06-06-2021 à 19h55 - Mis à jour le 07-06-2021 à 13h23
"J’ai eu l’idée en février dernier car je pressentais qu’ils allaient nous lâcher en juin", nous confie l’humoriste et chroniqueur de Bel RTL, Bruno Coppens, au sujet de son Dicovid (d’Asymptomatique à Zoonotique et garanti sans effets secondaires) réalisé à base de ses chroniques radios et en presse écrite. "J’ai cumulé et, à un moment, tu as une douleur… Et puis tu en rigoles car tu dois sortir de ça. Et ce qui manquait avec ce gouvernement, c’est un scénario (sourire) ! Car on retient davantage leurs nouveaux mots que leurs chiffres…" Ou quand Bruno Coppens voit le rire comme un "lubrifiant social" !
Cette crise sanitaire, finalement, était du pain bénit pour vous, l’un humoriste et l’autre caricaturiste ?
Pierre Kroll. "Au début du premier confinement, j’ai bossé comme un malade. Comme le monde a changé à toute vitesse, cela a tout aggravé. J’ai donc dessiné sur tout, tout le temps. Mais, maintenant, ça devient long, j’en ai ras le bol des Codeco !"
Bruno Coppens. "La difficulté était qu’on ne pouvait pas toucher au virus lui-même. On pouvait parler de la gestion du virus avec les masques ou vaccins ou encore de comment on nous gouverne. Mais qui a osé parler du virus ? Personne… à part cette pub ‘Deux corona achetées, une mort subite offerte’, qui a été retirée illico le lendemain. Or, notre métier est de pouvoir rire de tout, même de la mort. Si Pierre a osé une fois un dessin de cercueil dans un jardin, on constate que l’humour n’a pas osé parler des morts du Covid. Il n’a pas osé aller jusque-là. D’où cette ouverture du livre avec la citation de Pierre Desproges avant la pandémie : ‘Peut-on mourir de toux ? Oui mais pas avec tout le monde’ (sourire)."
P.K. "Avec le grand débat sur la censure des GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), je me rappelle que, sur mon site internet, le virus rouge que j’avais griffonné avait été censuré. Parce que j’avais l’air de rire de la mort, il avait un air trop sarcastique. Et pour les Américains, on ne rit pas de ça. Au début, il y avait un vrai poids là-dessus. Il faut aussi dire qu’on a vu des camions frigorifiques de boucherie devant le CHU de Liège… Ils étaient bâchés mais quand tu vois cela devant un hôpital, tu as compris…"
En dehors de ça, nos virologues (la mariusgilbertologie, la baronne de Rothschild de 2020 alias Yves Van Laethem) et nos politiques (la reine de l’impro Maggie De Block ou Georges-Louis Bouchez alias le Boucher des vanités) en prennent pour leur grade dans votre Dicovid…
B.C. "Georges-Louis Bouchez m’a d’ailleurs appelé pour me dire… merci Bruno (sourire) ! Je pensais qu’il allait m’engueuler mais au plus on parle de lui, au plus il aime ! La phrase ‘le clivant est roi’ c’est vraiment de lui. C’est son mantra. On n’est jamais aussi bien selfie que par soi-même (sourire) !"
Quels sont les mots qui, selon vous, vont entrer dans le vocabulaire courant et familier de tout un chacun ?
B.C. "Le fait que Sarkozy était le seul en France à faire des tournées… des tribunaux (rire) ? Non là je force le trait mais, j’ai déjà entendu quelqu’un dire sur scène ou en terrasse, ‘allez faisons un cluster !’ Avant on n’aurait jamais dit ça !"
P.K. "Maintenant, on connaît le mot jauge aussi… Des mots vont rester, c’est certain."
B.C. "Oui, comme Covid, variant, kayak qui a pris une autre tournure ou encore déconfinement. On va dire déconfinement pour d’autres choses. Nos vacances de Noël seront désormais nos vacances de déconfinement, qui sait ? Bref, on est tous devenus virologue en quelques mois (rire) !"
"Ils devraient plutôt faire des soirées-test dans les clubs libertins !"
Après "Le jeu des dictionnaires" ou "Kroll en scène", le duo Bruno Coppens et Pierre Kroll semble être une équipe de sexagénaires qui gagne.. Deux artistes "menant une vie scène" comme rédige le premier dans son Dicovid. Et on n’écrit pas cela parce que l’humoriste a réalisé un événement-test ce samedi à Arlon avec Yves Coppieters, dans le but d’aider à la réouverture mais surtout d’avoir un protocole pour ne plus devoir fermer les centres culturels à l’avenir. "Mais bon, ils sont six mois en retard, ils devraient plutôt faire des soirées-test dans les clubs libertins. Là, au moins, on saura, on sait que c’est efficace (rire) ! " Il ne faut pas "codéconner" comme dirait l’auteur du Dicovid, pour qui le gel hydroalcoolique est l’eau bénite de l’an 2020 et le pacte d’excédence, le surpoids pris en plein confinement. Un ouvrage qui permettra d’être encore meilleur au Scrabble, que ce soit en présentiel, à To Moreau Land, ou en quatorzaine. L’après pandémie (ses extraits du Dicovid 2 à paraître en 2035) s’annonçant aussi surréaliste que pendant. Bref, du chiantifique Raoult (le chloroking du vaccin) à la mélancovid en passant par la cage aux fioles (le dialogue entre vaccins) ou ce nouvel hymne scout "Hissez haut Sciensano", ce Dicovid fait du bien à nos zygomatiques.
