Roch Voisine : “Durer 40 ans dans la chanson, aujourd’hui, ce n’est plus possible… Mon métier, ce n’est pas L’École des Fans”
La star canadienne, en tournée Americana 2.0 ce 28 mars à Liège et en novembre à Bruxelles, déplore l’évolution du milieu de la chanson d’aujourd’hui.
Publié le 16-03-2023 à 15h49
:focal(2554x1711:2564x1701)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/LIJPSDTX4RHWZB2JJIZTJNFNEQ.jpg)
”Americana 2.0 se veut un peu plus intimiste et plus léger dans sa présentation, confie Roch Voisine, qui sera le 28 mars prochain au Forum de Liège et le 8 novembre au Centre Culturel d’Auderghem. J’ai le temps de parler un peu plus, raconter des histoires. Il y a un intérêt, dans la culture francophone, à travers toutes les chansons qui ont été adaptées à une certaine époque pour la country-folk-rock. Les gens connaissent la country plus qu’ils ne le pensent parce qu’ils l’ont connue via Johnny ou Joe Dassin, notamment. Une culture américaine bien ancrée via ces adaptations-là et il y a donc un parallèle intéressant à faire.”
Après le succès de sa tournée acoustique, le chanteur de 60 ans -qui a fait du hockey sur glace jusqu’à ses 57 ans- revient pour présenter son nouveau spectacle, entouré de cinq musiciens mais sans batteur. Un concert dépouillé autour des morceaux qui ont accompagné sa jeunesse et qui l’habitent encore aujourd’hui comme Willie Nelson, Elvis, Roy Orbison, Neil Young, Willie Lamothe, Johnny Cash (de “Suspicious Minds” à “Take it easy” en passant par “Always on my mind”, “Ring Of Fire” ou encore “Pretty Woman”, Mrs Robinson”).
Ce côté americana/country cacherait-il un rêve de cinéma ?
”Je vais vous répondre ce que je réponds depuis 36 ans : tout le monde me voit faire du cinéma sauf les producteurs et les réalisateurs de films. Ce n’est pas un regret mais plutôt une curiosité inassouvie.”
Vous avez par contre laissé tomber la barbe country. Pourquoi ?
”Oui, je l’ai coupé ! C’est logique, ma fille se plaignait que cela piquait (sourire). Puis, laisser pousser la barbe, c’est un truc mais la garder, s’en occuper et la traiter, c’est plus de travail que de se raser le matin… Elle va repousser aussi donc c’est l’avantage, c’est quand on veut !”
En parlant de votre fille, est-ce difficile de partir loin de votre famille en tournée ?
”Ce sont les aléas de mon métier mais, heureusement, cela passe vite. Puis, on a la technologie aujourd’hui pour voir et parler aux gens. Ce qu’on n’avait pas à l’époque. Aujourd’hui, c’est presque comme si on y était.”
Vous êtes connu pour vos chansons d’amour. Quel est votre secret ?
”Il faut souffrir un peu, c’est tout. Et comme tout le monde, j’ai souffert. L’amour, c’est toujours compliqué mais cela en fait de bonnes chansons.”
"Les gens n'achètent plus de musique. Du coup, il y aura de moins en moins de musique originale car les artistes n'en feront plus."
Qui durent dans le temps. La chose la plus compliquée dans votre métier..
”Surtout avec la tangente qu’il a prise, il est quasiment impossible aujourd’hui de durer dans le temps. Les nouvelles générations font ça pendant un an ou deux. Le faire par hobby ou passion, c’est une chose. Mais en vivre pendant 40 ans, c’est différent. Je pense que cela n’arrivera plus. À moins que le modèle ne redevienne plus classique. Les gens n’achètent plus de musique. S’ils peuvent la prendre gratuitement, ils le feront. Du coup, il y aura de moins en moins de musique originale car les artistes n’en feront plus.”
Un nouvel album est donc proscrit ?
”Non, on y pense quand même mais il est vrai que le modèle de travail est complètement changé. Il faut d’abord avoir des partenaires et c’est compliqué avant même de commencer à travailler. À l’époque, on faisait 30 chansons, on en enregistrait 17, on en sortait 12 et aujourd’hui ce n’est plus possible de faire 30 chansons… C’est trop cher ! Pas de retraite pour autant car on s’adapte… la preuve : on est encore là.”
L’époque du tube Hélène où les fans vous arrachaient votre chemise vous manque ?
”Oh, non, pas du tout ! Mais cela reste d’excellents souvenirs et des histoires à raconter.”
Et vous n’avez jamais basculé dans le côté obscur du show-business comme un certain Pierre Palmade dont tout le monde parle de nos jours…
”Oh là là, non. Je ne suis pas là-dedans, cela ne risque pas de m’arriver ce genre de truc.”
Allez-vous vous diriger vers des chansons plus engagées ?
”Je ne vais en tout cas pas m’engager dans un truc auquel je ne crois pas et les gens n’aiment pas qu’on leur fasse la leçon. Je ne suis pas sûr que la raison pour laquelle j’ai fait ce métier était de faire la leçon aux gens pendant 40 ans. Il y a toujours des messages sous jacent, au deuxième degré, mais ce ne sont jamais celles qui sont retenues.”
Quel est votre rêve ultime ?
”À une certaine époque, c’était des choses extraordinaires comme faire un stade de France. Mais, maintenant, c’est plutôt dire : encore 10 ans. Déjà là, c’est un fantasme. On ne sait pas où ce qu’on s’en va. On peut se réinventer mais à un moment donné, on ne maîtrise plus rien non plus.”
Et participer à des émissions comme The Voice ou la Star Academy ?
”Oh non, je ne suis pas fait pour ça… Mais si vous me voyez un jour là-dedans, c’est que le reste ne marche plus (sourire) ! Ce n’est vraiment pas mon truc, ni ma façon de travailler. Je ne suis pas très télévisuel. Mon métier, ce n’est pas L’école des fans.”