Un conseil : n’arrivez pas en retard sous les ordres de Christoph Waltz
L’acteur autrichien doublement oscarisé pour “Inglourious Basterds” et “Django Unchained” est toujours aussi bon dans les rôles de sociopathes.
Publié le 05-03-2023 à 18h11
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Ça n’aurait dû être qu’une simple visite d’enfants dans un studio de jeux vidéo de Los Angeles. Un groupe de gamins conduit par Ellaine (Brittany O’Grady – The White Lotus), l’assistante de la boîte, vers un bureau vitré. Celui de M.Sang-Woo, le jeune CEO de la start-up. Dix secondes plus tard, des bruits de détonation laissent peu de place au doute. Le boss de CompWare est mort.
Les rubans “Do not cross” n’ont pas été enlevés, l’hémoglobine n’a pas eu le temps de sécher, qu’un nouveau consultant débarque dare-dare. “M.Sang-Woo ne peut pas être avec nous aujourd’hui mais il m’a dit de vous adresser ses bons vœux”, assure Rudolf Patoff (Christoph Waltz), apparemment pas vraiment au courant du drame qui se trame. Ce dernier aurait été missionné par feu le boss pour apporter son expertise à son entreprise. Il ne faut pas longtemps pour que les salariés comprennent qu’ils ont affaire à un personnage “creepy” (flippant, bizarre). C’est peu dire…
Rudolf Patoff – dont le nom n’a aucune occurrence sur le Web – met son nez (au sens propre) dans le cou de ses employés pour débusquer celui qui sent “le fruit gâté”. Le consultant ferme la porte au nez à la barbe d’une employée handicapée en retard… “Pourquoi je ferais une exception pour elle ? Ce n’est pas comme si elle n’avait pas de moyens de transport.” Il minute, avec un réveil, les interventions de ses employés en réunion, force certains travailleurs à l’habiller, lui apporter des “churros” à 3 heures du matin et bien plus. Le pire, c’est qu’avec son accent, son sourire et son air obséquieux, Patoff n’a pas l’air d’y toucher. “Rire est bon pour la productivité et la santé.” En une semaine, 23 employés sont virés et une quinzaine prennent la poudre d’escampette par eux-mêmes.
Ce n’est pas le cas de Craig (Natt Wolff). Sweats à capuche, fumeur de marijuana, ce codeur adulescent n’a pas l’idée lumineuse de l’année lorsqu’il choisit de descendre des pintes de mousses au bar avec son “patron”. Idem pour Ellaine qui mène l’enquête à ses côtés. Seuls…

Mais que font les RH et la police ?
Dans The Consultant, il y a peu de place pour le réalisme. Dans la “vraie” vie, on se doute qu’au bout de deux jours, les salariés seraient allés se plaindre aux ressources humaines de la boîte ou à la police. Quoique… La nouvelle série estampillée Prime Video est une satire du monde du travail contemporain, de sa violence, de la hiérarchie, de l’autorité, de la soumission imposée (ou volontaire) et des compromissions que certains sont prêts à faire pour obtenir une position. Une fiction adaptée du roman éponyme de Bentley Little, auteur qualifié par Stephen King de “maître du macabre”. Même si toutes les trames de l’histoire ne sont pas forcément nécessaires, ça marche. En grande partie grâce à Waltz.
Révélé mondialement en 2009 par Quentin Tarantino pour son rôle du colonel Landa dans Inglourious Basterds, l’acteur autrichien revient, ici, à ses premiers “amours” : les séries. Le double oscarisé a, en effet, longtemps appris son métier dans des feuilletons policiers allemands de seconde zone : Un cas pour deux, Inspecteur Derrick ou encore Le Renard. Avec son accent, son regard, ses mimiques, ses tocs et sa gestuelle (tapoter sur l’épaule d’un salarié avec un crayon), le comédien en fait des caisses et, sans surprise, il n’a, encore une fois, pas son pareil pour incarner les méchants qui nous mettent les pétoches.
La mise en scène de Tony Basgallop (To the Ends of the Earth), aussi, est réussie. Petit à petit, grâce à des raccords malins, une musique angoissante, la disposition panoptique du bureau de Waltz, et les défis auxquels doivent faire face les personnages, le consultant joue avec nos nerfs et parvient à entrer dans nos têtes. En bon sociopathe sadique, il peut surgir n’importe quand et de n’importe où. Ça en devient parfois tellement absurde qu’on s’en amuse. Avec, pour point d’orgue, une statue on ne peut plus de mauvais goût…