Scandale de viols sur mineurs, trafic sexuel, chiffres classés XXL: on a vu le docu choc de Netflix sur les dessous de Pornhub, le YouTube du porno
En révolutionnant l’industrie du porno via la fabrication et la distribution de contenus “hot”, le site internet Pornhub est devenu l’un des plus visité au monde (2,5 milliards d’utilisateurs) devant Amazon, TikTok et Netflix. Mais le progrès a aussi ses dérives : Pornhub a été accusé d’exploiter des images de viols, de pédopornographie, de "revenge porn" ou encore de trafic sexuel sur sa plateforme.
Publié le 21-03-2023 à 14h27 - Mis à jour le 21-03-2023 à 14h48
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Avec son documentaire sulfureux “Pornhub : gros plan sur le géant du sexe”, Netflix ne prend pas parti dans la polémique mais pousse à la réflexion -bien au-delà du porno consommé dès l’âge de 11 ans en moyenne- sur nos modes de consommation à l’ère des réseaux sociaux.
”Deux femmes peuvent faire ça ?”, “Normal qu’on me reconnaisse dans la rue : 16 millions de personnes ont vu mon trou de cul !”, “Je passe la plupart de mon temps à noter des bites” ou encore : “Tout peut être pornographique” ; voici quelques témoignages de stars du porno dans le documentaire de Netflix intitulé Pornhub, gros plan sur le géant du sexe, disponible depuis le 15 mars dernier. “Tout le monde pense que je fais du porno mainstream mais je fais juste des vidéos seule dans ma chambre.” Ou quand internet en personne a été influencé par la pornographie et que certaines personnes auraient voulu “que cela reste caché”.
Cette plateforme pour adultes créée en 2007 a en effet bouleversé le mode de fabrication et de distribution de la pornographie, faisant gagner des milliards de dollars à ses fondateurs mais basculant vite dans des dérives peu reluisantes. ”C’est une entreprise qui fait comme Facebook, peut-on entendre d’un interlocuteur et ancien employé de la plateforme controversée. C’est une opération de collecte de données.” Des militants et autres avocats ont donc tenté de “faire le ménage dans cette industrie”. En 2020, le “New York Times” ayant épinglé le site après la diffusion de contenus illégaux, des abus perpétrés sur des enfants et de la violence non consentie. Ou quand internet devient une scène de crime en live ?
Des stars du porno sorties de la précarité
La force de Pornhub, devenu le 10e site le plus visité au monde et qui réalisait 3 milliards de dollars par jour, est que les stars du porn y ont vu une manne financière intéressante. Au lieu de 4000 dollars environ par mois en tournant pour des studios, ils passaient à environ 10 000 dollars par mois. Et surtout, ils ne sont plus tributaires de studios et de leurs lois ou dérives, ces stars de la pornographie devenaient ainsi maître de leur propre contenu. “On est nos propres patrons”, peut-on entendre de Chérie DeVille. C’est pourquoi ces mêmes stars montent au créneau lorsque des militants ont voulu faire tomber le géant du porno en ligne. “Ces gens oublient que le travail du sexe et le trafic sexuel sont deux choses totalement différentes”, témoigne Asa Akira. Selon Siri Dahl, 72 % ont même perdu leur source de revenus suite à cette attaque contre le porno. “Les laissés-pour-compte sont les stars du porno.”
Le scandale des enfants du Pornhub
La success story a ouvert à des dérives. Si sur la partie payante du site, seuls des créateurs de contenu porno “certifiés” pouvaient publier des vidéos, il n’en était rien pour la partie gratuite du site. En effet, n’importe qui pouvait alors publier du contenu sur Pornhub. Résultat ? Des vidéos d’agressions sexuelles ou de viols sur mineur ont fait leur apparition. Tout comme le revenge porn, se venger d’une personne en balançant du contenu intime sur la Toile.
Et c’est finalement grâce à un article décortiquant les dessous du milieu de la plateforme, écrit par le journaliste du New York Times Nicholas Kristof, que Pornhub s’est retrouvé dans la tourmente en plein Covid. Ce lauréat d’un prix Pulitzer y proposait même des solutions comme avoir plus de modération (mais visionner entre 800 et 1 000 vidéos par jour était impossible pour la société, des employeurs déclarent même qu’ils ne savaient pas donner un âge précis aux personnes visibles dans les contenus) ou suspendre les mécanismes de paiements via Mastercard et Visa. Un article qui a fait l’effet d’une bombe et a poussé les compagnies de transactions financières à se retirer en 2022. Résultat ? Pornhub supprime des millions de contenus de sa plateforme et les boss de l’entreprise canadienne démissionnent dans la foulée. Sans compter le manoir de l’un d’entre eux qui a été brûlé… par on ne sait qui.
Le porno comme “indicateur de la liberté d’expression de notre société” ?
Cette guerre contre l’industrie du porno pose toutefois question grâce au fait que Netflix ne prend pas parti dans ce documentaire. car suite à la mise au ban de Pornhub, c’est toute l’industrie du porno qui vacille comme l’avancent les performeurs du milieu et actifs sur la plateforme parfois comparés comme les Soprano du porno. Mais ces “gangsters” ou “racketteurs” ne se laissent pas faire. “Ce sont toujours les performeurs qui morflent alors que nous n’avons rien à voir là-dedans”, déplorent-ils. “La censure repousse les stars du porno à retourner vers les studios et autres dérives. L’industrie du porno en ligne n’est pas si horrible qu’on le prétend et permet aussi de calmer les libidos les plus extrêmes.” Et de conclure. “Ce n’est que reporté le problème ailleurs, vers d’autres sites. Les gens s’en foutent de notre travail alors que le porno est un indicateur de la liberté d’expression de notre société.”
D’où ce questionnement à la vision du documentaire qui pousse le téléspectateur à s’interroger sur l’importance de la pornographie dans notre monde. Libre et consentie, elle a son utilité. Et toutes les questions que soulèvent le docu sur la vie privée, la préservation des données, la modération des contenus sensibles, la publicité ciblée et on en passe… pourrait très bien s’appliquer à tout type de site ou réseaux sociaux comme TikTok, Facebook ou Instagram (ce dernier connaît déjà sa dérive, OnlyFans). Un débat actuel, pertinent et non résolu à l’ère de la puissance d’internet qui fait parfois partir ce monde -d’aujourd’hui et de demain-… en couilles !