Détournement de fonds à Villers-la-Ville: le bourgmestre Emmanuel Burton (MR) aurait-il dû dénoncer la directrice plus tôt ?
L’ancienne directrice de la RCA de Villers-la-Ville a été licenciée en décembre 2021. Elle aurait détourné plus de 30 000 €.
- Publié le 13-09-2023 à 08h34
- Mis à jour le 13-09-2023 à 08h39
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Le 13 décembre 2021, la directrice de la Régie communale autonome (RCA) de Villers-la-Ville a été licenciée pour faute grave. Elle est soupçonnée de détournements de fonds. Elle aurait versé 30 000 € de la RCA sur son compte personnel en mars 2021. Elle aurait ensuite augmenté sa rémunération mensuelle sans en informer quiconque. Plainte a été déposée par la RCA. En attendant la fin de l’enquête et un éventuel jugement, l’ancienne directrice bénéficie de la présomption d’innocence. Nous ne la nommerons donc pas.
La RCA villersoise gère le complexe sportif de Villers-la-Ville. Si comme son nom l’indique, elle est autonome, elle n’en est pas moins une émanation de la Commune.
"Les graves dysfonctionnements au sein de la RCA" ont poussé deux conseillers communaux villersois, Nadia El Abassi et Pierre Voet (Écolo), à demander au ministre wallon des Pouvoirs locaux, Christophe Collignon (PS), de diligenter un audit de la RCA. Audit qu’ils avaient déjà demandé au conseil communal de Villers-la-Ville où ils avaient essuyé un refus.
Nous n’avons pu obtenir aucun commentaire du ministre Collignon ou de son cabinet sur ce dossier.
Le dossier a été transmis au parquet, a-t-on toutefois appris de sources sûres. À notre connaissance, aucun audit n’a été lancé.
Le député Stéphane Hazée (Écolo) a déposé une question écrite à l’attention du ministre Collignon au greffe du parlement wallon. "Les procédures de contrôle interne ont manifestement fait défaut, note le parlementaire namurois. Des questionnements se posent aussi à l’égard du rôle des autorités communales, notamment au niveau des informations qu’elles auraient reçues […] et de la transmission ou non de ces informations aux organes de la RCA".
Le bourgmestre aurait-il dû prévenir la Régie plus tôt ?
D’après un extrait de procès-verbal du bureau exécutif de la RCA daté du 9 décembre 2021 et reproduit dans le courrier adressé au ministre Collignon, le bourgmestre de Villers-la-Ville, Emmanuel Burton (MR), aurait été alerté du premier détournement et n’aurait pas alerté les responsables de la RCA.
"Il a reçu une information selon laquelle (la directrice de la RCA) se serait versé un montant de 30 000 € sans aucun droit. Monsieur le bourgmestre déclare avoir directement appelé la directrice pour avoir des explications, peut-on lire dans cet extrait de procès-verbal. Elle lui a répondu qu’elle avait eu un besoin de liquidités pendant quelques jours mais que le montant était, entre-temps, déjà intégralement remboursé. Monsieur le bourgmestre lui a confirmé que, vu que le remboursement était fait, il considérait l’incident clos mais l’a clairement avertie de l’illégalité de cet acte et lui a clairement adressé un avertissement verbal que plus aucun écart ne sera toléré et que tout autre écart sera soumis aux instances de la Régie."
Le bourgmestre pouvait-il régler ce "problème" de la sorte ? D’après l’article 29 du Code d’instruction criminelle, "toute autorité constituée […] qui, dans l’exercice de ses fonctions acquerra la connaissance d’un crime ou d’un délit, sera tenue de donner avis sur-le-champ au procureur du roi".
"Ils voudraient me voir tomber"
"Je n’ai certainement pas passé l’éponge pour des faits qu’on m’aurait démontrés, assure Emmanuel Burton. La manière dont j’ai appris, le moment où je l’ai appris et les éléments que l’ancienne directrice de la RCA m’a présentés ne réclamaient aucune procédure disciplinaire. Je suis d’autant plus à l’aise que c’est moi qui ai alerté la Régie des faits qui ont mené au licenciement immédiat de la directrice. Ce qui est en train de se passer aujourd’hui, c’est qu’Écolo est en train de prendre beaucoup de risques en diffusant des choses qui sont parfois fausses, parfois incomplètes alors qu’une enquête judiciaire est en cours à notre initiative. En fait, ils cherchent à m’atteindre mais comme je n’ai rien à me reprocher, je ne peux m’empêcher de croire qu’ils cherchent à protéger quelqu’un qui a probablement commis un détournement."
À la mi-juillet 2021, le conseil d’administration, dont le bourgmestre fait partie, a transformé le contrat de travail à durée déterminée de la directrice, qui avait "montré entière satisfaction" selon le PV de la réunion, en contrat à durée indéterminée. Les responsables de la RCA ignoraient alors les soupçons de détournement, assure son président, Cédric Vermeiren (MR).
"Les mécanismes de contrôle ont bien fonctionné"
Le président de la RCA, Cédric Vermeiren (MR), tient à contextualiser: "Les faits qui nous ont poussés à licencier la directrice se sont déroulés pendant le Covid. La directrice était alors seule au bureau. Pour le reste, il est faux de dire que les procédures de contrôle n’ont pas fonctionné puisque le bureau comptable nous a bien alertés. Bien sûr, il peut se passer un peu de temps entre le moment où les faits ont lieu et le moment où ils nous sont signalés. Mais, dès que nous avons su, nous n’avons pas traîné à prendre des mesures."
Le bourgmestre de Villers-la-Ville, Emmanuel Burton (MR), estime lui aussi que "les mécanismes de contrôle ont bien fonctionné" et rappelle que la RCA est une petite structure qui ne dispose pas d’un directeur financier et que c’est dès lors à sa directrice – à son directeur désormais – de réaliser les paiements, en ce compris celui des salaires.