À Molenbeek, Rousseau "ne se sent pas en Belgique": "Il y a des gens qui enseignent en arabe car ils ne parlent pas français, c’est inacceptable"
Interrogé sur la migration, le président de Vooruit lâche un gros pavé dans la mare.
Publié le 26-04-2022 à 21h16 - Mis à jour le 28-04-2022 à 13h21
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Quand je traverse Molenbeek, je ne me sens pas en Belgique", dévoile Conner Rousseau dans une interview accordée à Humo.
Interrogé par l'hebdo flamand sur la place la migration dans les débats qui ont agité les élections françaises, le président de Vooruit a décrit la commune bruxelloise comme défaillante sur le plan de l'intégration, une commune "où la plupart des gens sont nés ici" mais qui connaîtrait de graves difficultés sur le plan linguistique. "À Bruxelles, à cause de la pénurie d'enseignants, il y a des gens qui enseignent en arabe, car ils ne parlent pas français. C'est inacceptable."
Ce discours, qu'il a maintenu et appuyé mardi matin au micro de Radio 1, a fait l'effet d'une bombe au sein de la maison socialiste. Le président de la fédération bruxelloise, Ahmed Laaouej, a été le premier à répliquer, dénonçant des propos "stigmatisants et xénophobes". La bourgmestre Catherine Moureaux a décrit une attitude "caricaturale" et "méprisante". Plusieurs ministres fédéraux de gauche ont condamné cette vision et même quelques membres de son propre parti sont montés au créneau, en particulier l'échevin molenbeekois Jef Van Damme. La droite nationaliste flamande, elle, a loué l'audace du jeune socialiste et l'extrême droite flamande a surfé sur ces déclarations comme si Rousseau était l'un des leurs.
Contacté par nos soins, le porte-parole tente de nuancer les propos de son président. "Conner ne porte pas un jugement de valeur sur Molenbeek. Quand il dit qu'il ne se sent pas en Belgique, il ne voit pas ça comme un problème, mais plutôt comme le constat qu'il y a des défaillances en termes de connaissance de la langue. Plus loin dans l'interview, il indique qu'il veut faire quelque chose à ce sujet. Il veut réorganiser l'accueil de la petite enfance à l'instar de l'enseignement, de manière à ce que les enfants apprennent la langue de leur région et ne soient pas en retard."
Côté enseignement, on n'accueille pas ces déclarations sur le même ton. "La pénurie d'enseignants est une réalité dans toutes les régions du pays. La Fédération Wallonie-Bruxelles la combat par différents moyens mais certainement pas en mettant devant les classes des personnes qui ne connaissent pas la langue d'apprentissage", s'émeut la ministre de l'Éducation Caroline Désir (PS). La loi du 30 juillet 1963 concernant le régime linguistique dans l'enseignement prévoit en effet en son article 13 qu'un établissement d'enseignement ne peut recruter dans son personnel de direction, enseignant et administratif que des personnes qui ont fourni la preuve de leur connaissance approfondie de la langue de l'enseignement de l'établissement.
Sur place, en revanche, certains se félicitent que Conner Rousseau "ose dénoncer la réalité". C'est le cas de Yassine, commerçant qui vit depuis 40 ans à Molenbeek. "Rousseau n'a rien dit de mauvais. Il a simplement énuméré un fait : Molenbeek n'est plus réellement une ville belge. Quand je vais au Portugal, je sais qu'on parlera portugais. À Molenbeek, quand on entend la langue parlée, on se dit que l'on est plus proche du Moyen-Orient. Et ce n'est pas raciste que de le constater."