"La gare du Midi est une maison qui brûle depuis de nombreuses années, et Rudi Vervoort la regarde brûler"
Selon David Leisterh, chef de groupe MR au Parlement bruxellois, le gouvernement régional refuse d’exercer les compétences de sécurité dont il a hérité.
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- Publié le 29-08-2023 à 07h10
- Mis à jour le 29-08-2023 à 17h24
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Une action policière de grande ampleur s’est déroulée ce week-end à la gare de Bruxelles-Midi. La situation est-elle enfin prise en main ?
Il y a une volonté politique d’intervenir. C’est ce qu’on demande à Rudi Vervoort (PS, ministre-Président bruxellois) depuis non pas quelques jours ou semaines, mais depuis plus de 6 mois. Je l’ai interpellé aussi sur la gare du Nord.
Comment réagit Rudi Vervoort à vos interpellations ?
À chaque goutte qui tombe, il tire le parapluie fédéral. Je ne suis pas d’accord. Il n’a peut-être pas toutes les compétences, mais lors de la dernière réforme de l’État, Bruxelles en a obtenu une large série en matière de sécurité. Elles ont d’ailleurs été traduites dans la création d’un énième organisme, safe.brussels, chargé de coordonner et d’assurer la sécurité des Bruxellois. Mais Rudi Vervoort refuse d’exercer cette compétence de sécurité, qui prend la poussière quelque part dans son grenier.
La police ne relève pas de la compétence de Rudi Vervoort. Comment pourrait-il agir à la gare du Midi ?
En faisant ce que les médias ont fait, déjà. Tirer la sonnette d’alarme auprès d’acteurs qui ne relèvent pas de sa compétence, comme le Fédéral. Mais aussi en prenant le leadership sur ce dossier, en réunissant les zones de police, le Fédéral etc. Faire ce que le Premier ministre Alexandre De Croo (Open VLD) a réalisé il y a deux semaines, voyant que Rudi Vervoort ne faisait rien. Il y a un patron à Bruxelles et c’est Rudi Vervoort. Mais il refuse d’endosser ce leadership politique en matière de sécurité. On voit le résultat. La gare du Midi, c’est une maison qui brûle depuis de nombreuses années et que Rudi Vervoort regarde brûler. Si j’étais Ministre-Président, ça fait longtemps que j’aurais réuni tout le monde.
Les autorités politiques se renvoient la responsabilité. Ridouane Chahid (PS) estime que la situation à la gare du Midi est due au désinvestissement du précédent gouvernement MR-N-VA.
En voilà un autre qui tire le parapluie fédéral. Bruxelles a été refinancé plusieurs fois, aussi en termes de sécurité. Où sont partis tous ces budgets ? On peut continuer à envoyer davantage de policiers à la gare du Midi mais si, dès le lendemain, les personnes arrêtées sont relâchées, ça n’aura pas d’impact. Cela vaut pour les délinquants et les sans-papiers. La réponse doit être beaucoup plus dure.
Sur les 56 arrestations à la gare du Midi, il y avait 47 sans-papiers. Mais comme il n’y a pas de suivi ni d’expulsions prévues, je vous fiche mon billet que ces personnes, aujourd’hui, sont déjà revenues à la gare du Midi. C’est une opération coup de poing dans l’eau."
Mais y a-t-il en effet un désinvestissement du Fédéral à Bruxelles ?
Il y a en effet un débat à Bruxelles sur la norme KUL, donc le financement de la police locale. Il doit avoir lieu. Mais avant de parler des moyens, il faut arrêter avec cette politique laxiste en matière sécuritaire. Selon nos informations, sur les 56 arrestations à la gare du Midi, il y avait 47 sans-papiers. Mais comme il n’y a pas de suivi ni d’expulsions prévues, je vous fiche mon billet que ces personnes, aujourd’hui, sont déjà revenues à la gare du Midi. C’est une opération coup de poing dans l’eau. Pour un sans-papiers qui commet un acte illégal, il doit y avoir une expulsion automatique. Et pour les délinquants, le Fédéral plaide depuis longtemps pour des peines moins laxistes. On se retrouve, en Belgique, avec une image de paradis pénal, comparé aux pays voisins. Les délinquants le savent.
Que faudrait-il faire, concrètement, à la gare du Midi ?
Pour s’assurer qu’un quartier ne tombe pas en déliquescence, trois ingrédients doivent être appliqués : la répression, la réhabilitation et la reconstruction. Comme l’a fait Malines. Et sur ces trois points, à Bruxelles, le gouvernement s’est planté. Prenons d’abord la sécurité à la gare du Midi, mais aussi à la gare du Nord, où c’est tout aussi grave, si pas pire. J’y suis allé hier matin à 8 heures Je tire mon chapeau aux travailleurs qui, tous les jours, descendent de leur train, traversent tunnels et trottoirs pour monter dans une des tours alentour, car c’est extrêmement dangereux.
Une fois que vous avez réprimé, que faites-vous ?
Le second ingrédient, c’est la réhabilitation, l’accompagnement social, comme cela s’est fait à Malines aussi, avec la réorientation vers l’emploi. Là aussi, à Bruxelles, l’échec est considérable. Le dernier angle, c’est celui de la reconstruction. Il faut faire du beau là où c’est moche. Et la gare du Midi, c’est l’une des plus moches en Europe. C’est le syndrome, bien connu à New York, du carreau cassé. Si vous avez un carreau cassé dans un bâtiment, et si vous ne le réparez pas rapidement, d’autres seront rapidement détériorés.
Comment réhabiliter la gare du Midi ? Plusieurs projets existent depuis des années, comme le nouveau siège de la SNCB. Mais il y a aussi un projet de contrat de rénovation urbaine du gouvernement.
Certains projets sont annoncés médiatiquement depuis près de 20 ans… Mais dans les faits, rien n’avance. Il faut un plan d’action, avec le Fédéral. Car cela doit s’accélérer. Il faut pour cela s’assurer que les procédures urbanistiques soient beaucoup plus rapides et efficaces. À Bruxelles, il faut en moyenne 2 à 3 ans de plus qu’en Flandre et en Wallonie pour avoir un permis. Si vous y ajoutez une certaine paresse politique, naturellement, certains projets prennent au moins 20 ans.
Une commission va être spécialement organisée au Parlement bruxellois sur la gare du Midi, à la demande de Groen, Ecolo et le PS. Cela sera utile ?
Personne n’est dupe. Quelle nouvelle réponse Rudi Vervoort peut-il nous apporter à des questions déjà posées ? Durant les cinq premières minutes, il dira que c’est la faute du Fédéral. On demande de l’action sur le terrain.