"On va le payer deux fois plus cher”, le secteur associatif furieux et inquiet après l’annonce de Nicole de Moor
La secrétaire d’État annonçait, mardi soir, l’arrêt de l’accueil pour les hommes demandeurs d’asile isolés. Dans le secteur associatif, la peur d’une crise sociale, sécuritaire et sanitaire est bien présente.
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- Publié le 30-08-2023 à 17h45
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Une douche froide. C’est de la sorte que le secteur associatif bruxellois a reçu, mardi soir, l’annonce de la Secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, Nicole De Moor (CD&V), de suspendre temporairement l’accueil des hommes demandeurs d’asile seuls au sein du réseau d’accueil de Fedasil. Le motif : “ne voulant pas être en retard sur les événements, je prends d’ores et déjà la décision de réserver toutes les places disponibles aux familles avec enfants, justifie Nicole De Moor. Notre pays fait plus que sa part depuis longtemps. Cela ne peut plus durer, car cette année, 19 000 demandeurs d’asile se sont fait enregistrer en Belgique.”
Si pour le Premier Ministre, “il n’y aura pas de lien direct avec l’augmentation des gens dans la rue”, ni des problèmes de sécurité, le secteur associatif n’en croit pas un mot. “Nous sommes saturés depuis plusieurs années, on le dit au politique dans toutes les langues”, affirme Ariane Dierickx, de l’ASBL L’Îlot, qui offre des solutions d’hébergement (et pas que) aux sans-abri bruxellois, et dont les 90 lits sont déjà occupés.
Une amplification du problème dans le quartier Midi
Véritable “saga de l’été” sur le plan médiatique, le spectre de la sécurité autour de la gare du Midi n’a pas manqué de ressurgir à l’annonce de la Secrétaire d’État, mardi soir. “Si le réseau Fedasil est saturé où qu’il refuse des gens, on va se retrouver avec une demande supérieure, souffle Christine Vanhessen, directrice de la Fédération des Maisons d’Accueils et des Services d’Aide aux Sans-Abri. Or le secteur de l’aide aux sans-abri est le dernier maillon de la chaîne avant un retour à la rue, on va se retrouver inévitablement avec des tensions.” Et Ariane Dierickx de l’Îlot de rappeler qu’on se rapproche (encore) d’une augmentation de 20 % de sans-abri à Bruxelles cette année. “Avec ce qu’on va devoir récupérer socialement, on va le payer deux fois plus cher.”
Des tensions, il y en a déjà eu, elles ont d’ailleurs forcé DoucheFlux, l’ASBL d’aides aux sans-abri proche de la gare du Midi, à fermer ses portes en mai dernier. Aujourd’hui, c’est le Samusocial qui tire la sonnette d’alarme déplorant “l’absence totale d’information et de coordination avec les acteurs de terrain”. La Ligue de Familles, elle, refuse l’instrumentalisation faite autour des familles demandeuses d’asile. De son côté, le Ciré parle d’un “nouveau coup de canif dans l’État de droit. En plus, cette décision ne réglera rien. Cela fait un certain temps que l’on s’attend à ce que, dès la semaine prochaine, des familles ne reçoivent pas de place.”
Un manque de volonté politique
”Le problème, c’est la volonté politique, le blocage est politique”, continue Madame Ngo, directrice Générale du Ciré, auprès de Belga. Une analyse partagée par Christine Vanhessen. “On n’a jamais été aussi bien subventionné que par Alain Maron et Rudi Vervoort. Mais vous pouvez mettre le plus beau des sparadraps sur une plaie infectée, ce sera inefficace.” Nicole De Moor ne dira pas le contraire. Elle aussi, rappelle dans son communiqué que des places ont été ouvertes, et se réfère au manque de solidarité des pays européens dans cette crise de l’accueil.