Cet infirmier a passé 15 jours en Turquie avec B-Fast: “j’ai vu un nombre important d’enfants orphelins”
Gilles Wenkin, infirmier à Marie Curie raconte sa mission en Turquie avec les équipes de B-Fast, pour aider sur place les blessés dans le séisme qui a touché le pays.
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Publié le 17-03-2023 à 15h45 - Mis à jour le 17-03-2023 à 15h47
Le 6 février dernier, la terre tremblé en Turquie causant plus de 50 000 morts ainsi que des dégâts matériels d’une ampleur jamais vue. Dès l’annonce de la catastrophe, l’aide s’est organisée et tant les états que les citoyens se sont mobilisés pour porter assistance aux Turques. L’État belge, s’est rapidement organisé pour envoyer des professionnels de la santé au sein de sa mission B-Fast.
B-Fast est une structure interdépartementale qui organise l’envoi de secours d’urgence belges à l’étranger. La composition d’une équipe B-Fast dépend du type d’intervention et donc du type de catastrophe (inondations, pollutions, raz-de-marée, etc.).
L’une des missions du contingent belge a été de mettre sur pied un hôpital de campagne à Kirikhan.
Infirmier aux urgences de l’hôpital Marie Curie, Gilles Wenkin faisait partie de l’équipe.

Que faisiez-vous sur place ?
”Je suis parti du 24 février au 10 mars. Je fais partie de l’équipe B-Fast depuis 2008. Je suis déjà parti en Haïti, aux Philippines ou encore à Brazzaville. Grâce au soutien de l’ISPPC et de mes collègues j’ai pu partir dans les meilleures conditions. Sur place a été monté un hôpital de campagne comprenant une salle d’opération, un service de gynécologie avec possibilité d’hospitalisation, un nombre minimum de 100 patients par jour. Nous étions une centaine sur place pour le médical et la logistique. Sur les 15 jours que je suis resté sur place nous avons soigné 3 500 personnes. Nous avions une salle d’opération qui a été beaucoup utilisée et il y a eu 8 accouchements. Nous étions installés à côté d’un hôpital endommagé.”
Quel a été votre vision de la catastrophe ?
”C’est une catastrophe terrible. J’ai entendu pas mal de critiques sur la gestion du sinistre mais la catastrophe est si énorme que gérer cela est très compliqué. On déplore beaucoup de morts parmi les victimes. Ceux qui travaillaient à l’hôpital s’en sont sortis, ceux qui étaient chez eux ont été ensevelis dans leur maison.”
Comment on appréhende une telle situation ?
”J’ai déjà fait des missions humanitaires avec Médecin sans frontières. Je suis allé en Haïti où c’était une vraie catastrophe avec 220 000 morts. Quand je me rends dans un endroit c’est pour y travailler comme je le fais ici mais malgré tout il y a des choses qui marquent comme le nombre important d’enfants devenus orphelins. J’ai vu pas mal d’enfants qui avaient perdu leurs parents et qui avaient recueilli par des voisins qu’ils connaissaient à peine. Quand on traverse la ville on voit énormément de bâtiments à terre. Quand on est parti on a laissé en partie la structure médicale sans savoir si elle allait être utilisée à comme il se doit. On est un peu resté sur notre faim parce qu’il y avait des patients qu’on avait opérés et dont nous n’avons pas pu faire le suivi. Une équipe a pris le relais mais ils n’avaient pas notre amplitude. Les conditions ne sont pas pareilles et beaucoup de membres du personnel sont décédés.”
Voit-on la vie différemment quand on participe à une telle mission ?
”Oui forcément. Quand on revient en Belgique on se rend compte que certains viennent et abusent des soins de santé alors qu’on a la chance d’être dans un pays avec un système de santé de qualité. C’est un bien précieux. À certains égards on peut être fier de notre système de santé.”
Quand on intervient à l’étranger lors d’une catastrophe, est-ce qu’on se sent aussi utile qu’aux urgences en Belgique ?
”C’est totalement différent. La motivation est différente. Ici elle a été mise à l’épreuve avec la crise covid tandis que là-bas tout le monde est à bloc. On donne tous le meilleur de nous. Nous sommes avec des personnes venant de toute la Belgique. C’est très particulier.”