Une maman de Dour doit répondre de l’assassinat de son fils devant la cour d’assises. Des traces d’asphyxie ont été relevées par les médecins
Le procès de Madissone Massy débute jeudi avec le tirage au sort des jurés. L’examen sur le fond débutera lundi prochain. L’accusée se dit innocente, rejetant la faute sur le personnel médical.
- Publié le 19-09-2023 à 11h02
- Mis à jour le 19-09-2023 à 12h50
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Les autorités judiciaires sont restées relativement discrètes sur la mort de cet enfant âgé de neuf mois, après avoir été transféré en urgence de l’hôpital d’Hornu vers celui de Jolimont à La Louvière. Nous avons pu lire l’acte d’accusation, d’une trentaine de pages, et résumer cette affaire de la sorte.
Le 24 juin 2019, Enzo, un bébé âgé de neuf mois, est emmené par ses parents à l’hôpital Saint-Joseph à Mons. Le bambin a fait un malaise. Un coup de chaleur est évoqué par les parents. Le lendemain, ils emmènent l’enfant à l’hôpital Marie Curie à Charleroi pour subir de nouveaux examens. Ils sont inquiets, ce qui est compréhensible car ils ont déjà perdu une petite fille. Toutefois, les résultats des examens les rassurent et ils peuvent rentrer chez eux avec le bébé.
Retour à l’hôpital
Le 16 juillet, Enzo fait encore un malaise. Il semble ne plus réagir. Une ambulancière, une infirmière et un médecin du SMUR sont envoyés chez les parents. Quand ils arrivent, la grand-mère effectue un massage cardiaque à l’enfant. La maman reste en retrait.
Le bébé se réveille et est emmené à l’hôpital d’Hornu pour subir des examens, qui sont plutôt rassurants. Le personnel médical décide de placer l’enfant sous monitoring, mais la maman s’y oppose. Elle cède face au personnel de l’hôpital qui menace d’appeler les autorités judiciaires.
Le 17 juillet, un pédiatre ne constate aucun signe clinique montrant une insuffisance cardiaque. Toutefois, le lendemain, le bébé est blanc et sans tonus.
Le 18 juillet, l’enfant se trouve dans un état grave sur les plans cardiaque et cérébral. L’enfant meurt quatre jours plus tard à l’hôpital de Jolimont à La Louvière où un pédiatre rédige un certificat de décès, qu’il qualifie de non naturel. Une instruction est ouverte au parquet de Mons pour homicide.
Qui est responsable de la mort de l’enfant ?
Le juge d’instruction a inculpé la maman Madissone Massy (29 ans) et la chambre des mises en accusation l’a renvoyée devant la cour d’assises pour répondre d’un assassinat et de coups portés à son fils, mineur. Le procès débute jeudi avec le tirage au sort des jurés. L’examen sur le fond débutera lundi prochain avec de nombreuses interrogations.
Lors de l’enquête, de nombreuses personnes actives dans le monde hospitalier, qui se sont occupées de l’enfant, ont été entendues. Il ressort de leurs témoignages que la maman avait une attitude suspecte, en s’opposant notamment au transfert de l’enfant vers Jolimont. Elle préférait aussi voir partir son fils que de s’occuper d’un légume.
Les collègues du papa ont aussi évoqué le comportement suspect de l’accusée. Tous déclarent qu’il arrivait quelque chose à l’enfant quand son papa n’était pas à la maison. Ils décrivent Madissone Massy comme possessive avec son époux, notamment depuis la mort de leur premier enfant, de cause naturelle. Ce que confirme d’ailleurs le papa dans sa première audition.
Expertise et contre expertise
Le corps d’Enzo a fait l’objet d’une autopsie. Les légistes concluent leur rapport en écrivant que “l’hypothèse d’une asphyxie semble pouvoir être privilégiée comme étant à l’origine du décès”. Toutefois, un médecin a réalisé une contre-expertise à la demande de la famille et ses conclusions sont différentes.
Mais un autre médecin légiste conteste cette contre-expertise. “Il est incorrect de dire que la réanimation avec ventilation et intubation est responsable exclusive des lésions observées à l’examen anatomopathologique”. Enfin, le médecin mandaté par la défense précise que la bronchiolite et pneumonie sont à l’origine du décès, ce qui est contesté par un médecin légiste.
L’accusée reporte la faute du décès de ses enfants sur le personnel médical. Lors de son transfert à la prison, le 1er août 2019, elle évoque avoir placé une couverture sur la bouche et le nez de son fils. Toutefois, elle conteste avoir tué son fils.
Shopping hospitalier
L’enquête se poursuit et révèle que l’enfant a été admis aux urgences, à onze reprises entre le 8 février et le 16 juillet 2019, dans les hôpitaux d’Hornu, de Baudour, de Warquignies et de Saint-Joseph à Mons. Le pédiatre de l’enfant mentionne une bronchiolite, le 11 juin 2019, et il a prescrit une médication à domicile. Il déclare aussi que la maman semblait très inquiète, à la suite du décès de son premier enfant.
L’enquête révèle aussi que l’accusée a fait des recherches sur internet avec des mots-clés “étouffé un bébé de huit mois”, “mourir étouffé” … notamment le 16 juillet, et de nombreuses contradictions dans le récit de l’accusée.
Syndrome de Münchhausen
Un syndrome de Münchhausen a été évoqué par le psychiatre et la psychologue qui ont pris en charge l’accusée après la mort de son premier enfant. “Nous avons évoqué un Münchhausen par procuration. Notamment eu égard aux nombreux passages dans les hôpitaux qui ont été évoqués. Un des critères du Münchhausen pourrait être un deuil pathologique et un historique des maladies familiales similaires. Ce serait une manière pour la maman, en grande souffrance, de focaliser le regard médical sur elle et sur sa souffrance”.
Informé, le juge d’instruction a soumis la question à un collège d’experts, lesquels estiment que 75 % des critères retenus pour un Münchhausen sont présents chez l’accusée.
Coupable ? Innocente ? Le jury devra rendre un verdict après avoir entendu de nombreux experts durant une semaine. En attendant, Madissone Massy reste présumée innocente.