Les agents dans le sport (8/8) : “En cyclisme, c’est très différent du football”
Toute cette semaine, nous vous proposons une plongée dans le monde des agents. Dernier épisode en retrouvant le témoignage de Dries Smets, l’un des plus importants agents de coureurs.
Publié le 11-02-2023 à 17h47
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C’est une équipe cycliste qui aurait fière allure. Imaginez Julian Alaphilippe, Greg Avermaet, Japser Stuyven, Yves Lampaert, Arnaud Démare, Michael Matthews, Tim Wellens, Tiesj Benoot ou encore Ben O’Connor, Thomas De Gendt et Quinten Hermans réunis sous la même bannière. Ceux-là, sont les principaux coureurs (avec Lotte Kopecky) qu’accompagne la société de management Squadra Sports. Dirigée par Dries Smets, c’est l’une des plus importante dans le monde cycliste.
Squadra Sports est l’émanation des anciennes sociétés SEM puis Celio Sport&Image dont Paul De Geyter était le patron. Frank Vandenbroucke fut l’un de ses premiers coureurs dont les plus connus furent Peter Van Petegem, Tom Boonen ou Philippe Gilbert.
Dries Smets, qui fut stagiaire dans la société puis le bras droit de De Geyter, la lui a rachetée en 2017 et l’a rebaptisée. De quatre, le nombre des collaborateurs est passé à six (économistes, juristes, spécialistes des assurances, du droit, du marketing…) parmi lesquels un deuxième agent certifié auprès de l’UCI, spécialement chargé de la détection.
C’est un des bouleversements de ses dernières années, il convient pour les agents de s’intéresser aux (très) jeunes coureurs. On est encore loin des pratiques du football mais il y a désormais des juniors qui confient leurs intérêts à un agent ou manager.
À l’image de ses collègues, par exemple Jef Van den Bosch et Yannick Prévost, d’Isea Sport Management, société dont les “fers de lance” sont Wout van Aert, Oliver Naesen, Victor Campenaerts, Christophe Laporte ou les cyclo-crossmans Michael Vanthourenhout et Laurens Sweeck, les agents sont des acteurs importants dans les coulisses des pelotons.
Un rôle qui a changé
Autrefois, les managers actifs s’occupaient surtout de négocier des contrats de participations aux critériums, kermesses, cyclo-cross et nombreuses réunions sur piste. Jusqu’à la fin du XXe siècle, ces rentrées constituaient en effet une part importante, et parfois la principale, des revenus d’un coureur. Même si quelques épreuves du genre subsistent, désormais, c’est le salaire provenant du contrat le liant à une équipe qui est très largement son revenu principal. C’est ce salaire que négocient les différents agents pour plus de 90 % des professionnels du WorldTour et du niveau Proctontinental.
”À mes débuts”, nous confiait Dries Smets lors d’un entretien, “il fallait expliquer aux coureurs ce qu’était un agent, les convaincre de notre utilité.”
Ce n’est plus le cas aujourd’hui.
”On négocie les prolongations de contrat ou ceux lors d’un changement d’équipe, mais aussi de nombreux problèmes administratifs, pour les étrangers notamment, les papiers, les visas, le droit au travail, les résidences… “, dit-il. “Les statuts des sportifs sont différents, la pension, la sécurité sociale, les assurances. Les coureurs évoluent dans un contexte international et pratiquent un sport à risques. On leur explique de quelles assurances ils disposent, comment ils sont couverts, pour quels risques… Il y a la sécurité sociale qui couvre ceci ou cela. Cela change selon les contrats, les pays, les équipes… Un montant x dans une équipe ou dans une autre ne fait pas la même chose au final. Donc, nous mettons en garde nos coureurs par rapport à tel ou tel risque et on les invite ou non à prendre des assurances privées complémentaires. Il y a des coureurs qui ont des statuts d’indépendants, d’autres de salariés selon les équipes et les pays.”

Contrairement au football, il n’y a pas de transferts entre équipes.
”C’est très différent”, poursuit-il. “Dans le foot, c’est très difficile d’avoir une relation stable avec son client. Il y a en permanence des agents qui cherchent à prendre votre place. Dans le football, les agents gagnent la plus grande partie de leur argent sur les transferts, sur leurs commissions qu’ils négocient avec les clubs. Quel est leur client ? Le joueur de foot ou le club qui paie la commission sur le transfert ? En cyclisme, c’est plus transparent. Le coureur nous paie un pourcentage, qui est quasi toujours le même quel que soit l’agent, sur ce qu’on leur négocie comme salaire. Pour chaque euro que nous obtenons pour le coureur, nous touchons un petit pourcentage. C’est plus clair et sain.”
Depuis quelques années, l’Union Cycliste Internationale a réglementé la profession. Pour être agent officiel, il faut avoir passé des examens et obtenu une licence et dans certains pays, les fédérations nationales en exigent une supplémentaire. Les avocats en sont dispensés et seul un père ou un frère peut aussi s’occuper des intérêts d’un coureur de sa famille comme c’est le cas de Patrick Evenepoel avec Remco.