Vliegen, l’ange gardien de Grimay : “Bini est toujours relax et souriant”
Le Liégeois Loïc Vliegen s’entend à merveille avec Girmay, le leader d’Intermarché-Circus-Wanty, qui rêve de gagner son premier monument.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/178fdfc6-fd57-4879-b7d1-0d3376bfe7aa.png)
Publié le 16-03-2023 à 07h41
L’équipe Intermarché-Circus-Wanty a bien lancé la nouvelle saison, dans la foulée de la meilleure année de sa carrière, en 2022, et aborde en confiance la campagne des classiques. La formation de Jean-François Bourlart rêve, à court terme, de remporter une étape du Tour de France pour la première fois. Et de décrocher son premier monument. Dès samedi, à Milan-Sanremo, avec sa pépite Biniam Girmay ?
Le coureur africain sera le leader de l’équipe wallonne. Il sera épaulé par le Liégeois Loïc Vliegen. Il y a une belle osmose entre les deux hommes, rapidement devenus inséparables depuis qu’ils sont coéquipiers. Entretien avec l’ancien vainqueur du Tour de Wallonie, diminué en ce début de saison après avoir contracté le Covid. Mais il fera tout pour protéger au mieux et placer le plus longtemps possible Hawey. Soit l’équivalent de “my brother”, mon frère, comme ils s’appellent affectueusement.
On vous présente comme l’ange gardien de Biniam Girmay. Le Loïc Vliegen 2023, c’est uniquement ça, ou ce sera aussi un coureur qui voudra retrouver la victoire ?
”Ma volonté, oui, cela ne pourrait être que ça. Je suis capable de me mettre de côté pour quelqu’un qui en vaut la peine, à partir du moment où mon travail est vu et apprécié. Mais la volonté de l’équipe est aussi de me garder comme coureur qui peut marquer des points. Aike Visbeek aimerait que j’aille chercher des résultats sur certaines courses. Ma première partie de la saison jusqu’au Tour des Flandres sera principalement aux côtés de Bini. Quand je suis avec lui, ce sera pour lui. Même si cela ne veut pas dire que je ne jouerai pas ma carte en fonction des circonstances de course. Souvent, il me dit : 'vas-y, attaque'. Il préfère m’avoir devant. Car cela peut me réussir et cela permet à l’équipe ou à lui de ne pas devoir rouler derrière. Cela pourrait être un bon scénario sur les classiques…”
Girmay nous disait en interview cet hiver que cela fonctionne vraiment bien entre vous. Qu’il y a un bon lien…
”C’est vrai. Et c’est réciproque. On partage toujours la chambre à l’hôtel. Je pense que si nous n’avions pas été cyclistes professionnels et si nous avions par exemple été à l’école ensemble, on aurait été deux potes. C’est difficile à expliquer pourquoi ça colle entre deux personnes, mais entre nous, il y a un fort lien d’amitié. On s’amuse bien tout en étant pros. On a un bon feeling. On a passé pas mal de temps ensemble, il est même venu loger chez moi…”
Je l'ai rencontre après l'avoir battu au Tour du Doubs... Je me demandais qui était ce coureur africain. Cela a directement bien collé entre nous."
Comment est né ce lien ?
”Sur le podium d’une course, après… l’avoir battu. C’était sur le Tour du Doubs en 2020. Il termine deuxième derrière moi. C’était une de ses premières courses pros après le Covid. Je me demandais qui était ce coureur africain… Il avait l’air fort… On a parlé assez longtemps sur le podium. Il était déjà souriant, j’ai tout de suite apprécié la personne. Surtout parce que je l’avais battu… Non, je rigole… L’année suivante, il est arrivé dans l’équipe et ça a directement bien collé entre nous. Au niveau sportif, nous avons les mêmes caractéristiques, même s’il est plus talentueux que moi et va plus vite que moi au sprint…. Mais nous sommes complémentaires. Je peux avoir un bon rôle pour lui en tant que lieutenant. Je remarque aussi qu’il m’écoute beaucoup. Il a confiance en moi. Quand il a ma roue, il se bat pour la garder. On se comprend sans même se parler.”
Vous avez des habitudes particulières ensemble ?
”La veille d’une course, on aime regarder le parcours d’une course sur Vélo Viewer. On l’analyse ensemble. Je fais des propositions par rapport aux endroits clés du tracé, les endroits où il faudra être placé, ceux où il serait bien d’attaquer. On remet les choses au point le lendemain au meeting de l’équipe.”
"Il m’épate par sa facilité à s’endormir. Il peut faire une longue sieste l’après-midi et dormir sans soucis le soir."
Vous avez déjà roulé avec des grands leaders comme Philippe Gilbert, Greg Van Avermaet et d’autres. En quoi est-il spécial, Girmay ?
”Une de ses grandes qualités, c’est son côté relax. Cela vient peut-être aussi de sa culture. Il me dit souvent qu’en Érythrée, ils ne vivent pas comme en Europe. C’est plus tranquille, il y a moins de stress. C’est une force qu’il transmet après les entraînements ou sur une course. Il m’épate aussi par ses capacités à… dormir. Il peut s’endormir en moins de trois secondes ! Il récupère super bien. Il peut par exemple faire une longue sieste l’après-midi et ne pas avoir de soucis pour s’endormir le soir.”
"Les Grands Tours, ce n'est pas mon truc."
Vous avez des envies pour cette saison ? Retourner au Tour de France par exemple ?
”Je pense que ce ne sera pas dans les plans. Biniam aimerait que j’y sois. Mais j’en ai discuté avec l’équipe. J’ai déjà fait plusieurs Grands Tours et je pense que ce n’est pas mon truc. Ça ne fait pas partie de mes caractéristiques. Je pense avoir le moteur pour les terminer. Mais au niveau de la récupération, cela fonctionne moins bien. J’ai un caractère un peu hyperactif. Sur un Grand Tour, la clé est de veiller sur la récupération. Je me sens mieux sur des courses d’un jour ou des épreuves d’une semaine. J’ai aussi l’impression de perdre mon temps sur un Grand Tour. Je ne suis pas assez grimpeur pour viser une étape avec des côtes raides, dans une échappée d’une quinzaine d’hommes. Et je ne suis pas assez sprinter non plus. Et comme un Grand Tour prend du temps, quasiment deux mois avec les stages, les trois semaines de course et la période de récupération… C’est une longue période sans disputer d’autres épreuves qui me conviennent mieux, sur lesquelles je peux aller chercher des résultats…”
La victoire vous manque ?
”Oui. Je suis passé très près de gagner une étape du Tour de Wallonie l’an passé quand je termine deuxième chez moi, à Herve. Et si je ne suis pas gêné par une bête chute dans la première étape, je ne finis pas second du classement final mais sans doute vainqueur… Mais, je le répète, ma saison sera réussie si j’ai fait du bon travail pour Biniam. Et si je fais aussi quelques beaux résultats.”
Vous êtes en fin de contrat ? Vous pensez déjà à 2024 ?
”Je ne me vois pour l’instant pas ailleurs que chez Intermarché-Circus-Wanty. Je pense que l’équipe sait que ça fonctionne bien entre Girmay et moi. Je suis désormais le plus ancien de cette structure. Depuis mon arrivée, elle n’a fait que s’améliorer. L’arrivée de Aike Visbeek a été un vrai plus. Il motive toujours super bien les troupes. Je deviens aussi de plus en plus un capitaine de route. Ce n’est pas toujours gai de devoir gueuler… Mais je pense au bien de l’équipe. Je n’aime pas voir un mec faire un truc pour lui tout seul alors qu’on a une tactique bien planifiée. J’aime réussir une mission d’équipe, avec une belle cohésion.”
Vous vous voyez terminer votre carrière avec Bini ?
”Oui, pourquoi pas. Et je pense que pour l’instant, c’est aussi son souhait. Je fais tout avec plaisir avec lui. Il est gratifiant. Toujours positif. Je n’aurais pas su avoir la même connexion sportive avec un Egan Bernal, par exemple, car nous n’avons pas le même profil.”
Quelles sont ses limites ?
”Il peut être champion du monde. Et gagner des grandes classiques. On verra pour Sanremo, samedi. Il n’est pas encore certain de sa forme, mais Tirreno-Adriatico a dû lui permettre de passer un cap. J’espère que pour moi aussi. J’ai préféré abandonner après cinq étapes, pour ne pas me mettre dans le rouge pour mon retour. Ce Covid m’a bien diminué, avec des symptômes de fatigue pendant deux semaines… Je n’ai pas su bien m’entraîner avant Tirreno, raison pour laquelle il valait mieux être prudent. Mais je serai bien samedi à Sanremo. Pour aider l’équipe et Bini. Et continuer à travailler ma condition en vue de la période des classiques.”