Peter Bossaert, le CEO de l’Union belge, au sujet de la Fifa : “On demande une gouvernance avec plus de transparence”
Peter Bossaert, le CEO de l’Union belge, acceptera la réélection de Gianni Infantino, seul candidat, à la tête de la Fifa. “Mais on est très critique”, prévient-il.
Publié le 15-03-2023 à 18h01
:focal(2652x1776.5:2662x1766.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/RUENFW6BLJADPC6UZ4UEEP3JV4.jpg)
Ce jeudi, lors du 73e congrès de la Fifa à Kigali, Gianni Infantino sera prolongé comme président de l’instance mondiale. La Coupe du monde au Qatar a créé des tensions entre Infantino et certaines fédérations européennes, dont la Belgique, au sujet du brassard One Love. Peter Bossaert, le CEO de l’Union belge, sera présent, avec le président de la fédération Paul Van den Bulck. Il explique la position de la Belgique, nuancée.
Il évoque aussi la nomination de Domenico Tedesco, qui dévoilera sa première liste ce vendredi pour les matchs de qualification à l’Euro 2024 en Suède (vendredi 24 mars) et l’amical en Allemagne (mardi 28 mars).
Après l’épisode du brassard One Love à la Coupe du monde, avez-vous eu des discussions, les fédérations européennes, avec la Fifa ? Et quelle sera votre attitude pour l’élection du président ?
”Nous avons eu des discussions, en effet, et la Fifa a compris qu’elle n’a pas bien géré le dossier, que ce n’était pas une bonne façon de collaborer. Avec les fédérations européennes, on a gardé notre groupe de travail créé pour le Qatar, pour rester attentifs aux conditions de travail pour les migrants. On veut aussi des dispositions qui garantissent les droits humains dans le cadre des futures candidatures pour les prochaines Coupes du monde. On doit en discuter (NdlR : des réunions étaient prévues ce mercredi).”
Cela pourrait-il conditionner votre vote pour M. Infantino ?
”On est très critiques. Mais on est presque certains que M. Infantino sera réélu par acclamation. On respectera l’élection et on envisagera de collaborer de façon constructive. Mais cela n’empêche pas d’être critique sur la gestion des dernières années. Il est important de travailler sur plusieurs choses : on demande une gouvernance avec plus de transparence. Il faut travailler à une meilleure entente entre les pays européens et la Fifa. Et on veut, comme déjà mentionné, des dispositions qui garantissent les droits humains dans le cadre des procédures de candidature. La gestion de la Fifa n’est pas simple, car il y a beaucoup d’intérêts, de la géopolitique, de la politique. Mais on veut que nos valeurs belges soient respectées.”
Une abstention de vote, qui serait un signal fort, est-elle envisageable ?
”Cela n’a pas de sens si c’est une élection par applaudissements. On respectera la réélection, on va collaborer, mais on est très critiques.”
M. Infantino est le seul candidat à sa réélection. N’est-ce pas décevant de ne voir personne le concurrencer ?
”Oui, c’est décevant.”
Confisque-t-il le pouvoir ?
”On est face à un jeu mondial. Ce n’est pas évident, pour un concurrent, de se lancer dans une élection en sachant que face à un président sortant, avec ses contacts avec les fédérations et les confédérations, il a peu de chance de s’imposer.”
Diables rouges : “Après six ans et demi, il était temps de casser les routines”

Ce vendredi, Domenico Tedesco présentera sa première liste. Y a-t-il de l’impatience ?
”Il n’y a pas d’impatience par rapport aux résultats, on est plutôt optimistes. Un vent nouveau souffle (sur la sélection) et c’est exactement ce qu’il fallait après l’élimination précoce au Qatar.”
Un vent nouveau ne veut pas dire faire table rase du passé ?
”Il n’est pas question de dire qu’on oublie ce qui a été fait par le passé. Mais après six ans et demi, il était temps de casser les routines, de sortir de notre zone de confort, et c’est ce qu’on a fait.”
Il y avait de la routine en équipe nationale ?
”Oui, mais c’est normal, pour une équipe qui est en place depuis longtemps, à tous les niveaux. C’est le propre du sport de casser les routines, et c’est sain.”
Avez-vous été surpris quand Roberto Martinez a annoncé son départ ?
”Il me l’a annoncé avant le tournoi : si la Belgique ne passait pas le premier tour, il quittait son poste. Mais il l’avait déjà dit plusieurs fois, avant le tournoi, donc je n’ai pas été surpris.”
Il y a eu beaucoup de critiques sur le temps, long, pour trouver un successeur. Comment l’expliquez-vous ?
”Pour nous, l’élément le plus important était de trouver le bon sélectionneur, qui rentre dans notre philosophie de foot. Domenico incarne le foot qu’on avait en tête avec de l’énergie et du pressing vers l’avant. Pour nous, il a toujours été plus important de trouver quelqu’un en qui on croit, plutôt que d’agir dans la précipitation.”
Avec le double rôle de Roberto (Martinez), on n'était pas prêts à chercher nous-mêmes un sélectionneur. Mais il a posé des fondations solides pour le futur.

Une task force avait été mise en place, mais Bart Verhaeghe a été appelé pour aider à la recherche du sélectionneur. Ce rappel sonne-t-il comme un aveu d’impuissance pour la fédération ?
”Tous les clubs font partie de la fédération. J’espère que je peux toujours compter sur la connaissance et l’expertise de Bart, et d’autres personnalités du foot belge. Avec le double rôle de Roberto (sélectionneur et directeur technique), on n’était pas prêts à chercher nous-mêmes un sélectionneur. Mais ce n’était pas un problème, car il y avait assez d’experts dans le foot belge pour nous aider. Roberto avait son double rôle, c’était un petit désavantage pour ce processus de choix. Mais à côté de cela, il a posé des fondations solides pour le futur et je lui en suis très reconnaissant.”
Bart Verhaeghe a également été impliqué dans le footgate. Il a conclu une transaction pénale avec la justice. Pour l’image de la fédération, cela ne pose pas de problème ?
”Bart a fait la transaction et après, pour le parquet, c’est réglé. Qui est la fédération pour se placer au-dessus de la justice belge, et punir une deuxième fois ?”
Punir non, mais vous n’étiez pas obligé de faire appel à lui, dans une logique de bonne gouvernance et pour rompre avec le passé…
”Mais tout le monde fait des transactions pénales, quand vous roulez à 140 sur l’autoroute par exemple.”
Ce n’est pas tout à fait les mêmes montants ni la même nature d’infraction…
”On ne sait pas. Cette transaction, elle est confidentielle. Une fois la transaction effectuée, il n’y a plus rien dans le dossier. Qui sommes-nous pour dire on ne fait pas appel à vous ? Quand arrête-t-on et quand collabore-t-on à nouveau ensemble ?”
J'espère que Thomas (Vermaelen) va rester avec nous.

Vous avez officialisé la composition du nouveau staff. Thomas Vermaelen n’y est pas. Discutez-vous toujours avec lui pour une future collaboration ?
”J’espère qu’il va rester. On parle avec lui pour savoir si on peut continuer à travailler ensemble. Avec les Diables ? C’est à voir, je ne veux pas divulguer le contenu de nos conversations.”
Cette redéfinition du staff est-elle dictée par des raisons financières ?
”Non. La seule raison est que, lors des trois dernières saisons, le calendrier a été très chargé, avec la covid, l’Euro en 2021, le Final Four de la Ligue des nations, la Coupe du monde et des fenêtres internationales à trois ou quatre matchs. Il fallait préparer des joueurs pour le troisième ou quatrième match. En 2023, il y aura cinq fenêtres internationales, et dix matchs, dont deux amicaux. On a donc réduit le staff, mais la porte n’est fermée pour personne, parmi ceux qui ont quitté le staff. On pourra réévaluer la situation en cas de qualification pour l’Euro.”
Des Diables ont annoncé leur retraite. Cela vous a-t-il surpris ?
”On savait pour Eden (Hazard), il en avait parlé à Roberto, et la décision était inévitable. Toby (Alderweireld) m’a appelé il y a deux ou trois semaines pour me dire qu’il arrêtait. Il avait encore sa place, mais je comprends qu’avec ses deux petits enfants, il veuille être plus présent pour sa famille. Pour Simon (Mignolet), on regrette son départ tout autant, mais cela devenait sans doute plus compliqué pour lui de combiner l’équipe nationale avec son club (NdlR : le gardien de Bruges, opéré du genou après l’Euro, doit aussi veiller à se ménager).”
Il faut respecter les arbitres, attention à ne pas aller au-delà.
Où en sont les finances de la fédération ?
”On est à l’équilibre. C’est une année assez dure qui s’ouvre, avec l’inflation et sans grand tournoi pour apporter de nouveaux revenus. On sera à l’équilibre en utilisant les fonds des dernières années (NldR : les fonds propres de la fédération représentent 35 millions €). Nous avons doublé nos revenus commerciaux lors des quatre dernières années, ça aide aussi. Si on se qualifie pour l’Euro 2024, on sera dans de bonnes conditions.”
La fédération a la gestion des arbitres et du VAR dans ses compétences. Les critiques sont nombreuses ces dernières semaines. Comment est-ce perçu ?
”On est tout le temps attaqués à la fédération, il faut vivre avec. Au sujet du VAR : avant il y avait un taux de précision des décisions de 85 %. Maintenant, avec le VAR, on est à plus de 97 %. On ne sera jamais à 100 %, mais on fait tout pour diminuer ce pourcentage. On n’a pas en main le contexte humain, mais on investit du temps et de l’argent pour corriger ce qu’on peut. Il ne faut pas oublier qu’on a perdu deux arbitres, lors des trois dernières années, et il faut sept ans pour préparer un arbitre pour le niveau le plus haut. Pour en revenir au VAR, on s’est excusés pour ces erreurs, mais en même temps il faut respecter les arbitres. Il faut faire attention à ne pas aller au-delà. Plus personne ne comprend que le VAR peut faire des erreurs. Mais je suis d’accord pour dire qu’il faut une meilleure communication avec la Ligue et les clubs.”