Malgré une saison difficile à l'Antwerp, Kevin Mirallas pense toujours aux Diables: "Je vais téléphoner à Martinez pour avoir une discussion"
Exilé en Turquie pour relancer sa carrière après une année folklorique à l’Antwerp, Kevin Mirallas pense toujours aux Diables.
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Publié le 14-11-2020 à 09h43 - Mis à jour le 14-11-2020 à 15h22
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Kevin Mirallas était de la fameuse année 2012, quand les jeunes Belges ont commencé à prendre le pouvoir en Premier League. Il avait débarqué à Everton en même que Jan Vertonghen à Tottenham, Kevin De Bruyne et Eden Hazard à Chelsea, juste un an après Romelu Lukaku et Thibaut Courtois. Ils sont encore tous des cadres de l’équipe nationale avant la réception de l’Angleterre, sauf lui qui a disparu de la circulation depuis mars 2018 et une montée au jeu contre l’Arabie saoudite.
Après une année compliquée à l’Antwerp, il s’est engagé au Gaziantep FK, à quelques kilomètres de la frontière syrienne, le 5 octobre, le jour de ses 33 ans. Avec une idée en tête : tout faire pour prouver qu’il n’a rien perdu de ses qualités et retrouver les Diables qu’il aime tant. Un sacré défi qu’il a entamé par un but contre Besiktas le week-end dernier (succès 3-1) puis une présence dans le onze type de la semaine en Süper Lig turque.
Vous n’aviez plus marqué depuis quasi un an, avec l’Antwerp contre Malines. Ça a dû être un vrai soulagement ?
"Après la saison frustrante de l’an passé et ce mercato bizarre, oui clairement. Beaucoup de gens ont pensé que je venais m’enterrer en Turquie. Ou que je prenais ça pour des vacances. Mais j’ai très envie de montrer que je ne suis pas du tout fini."
On a pu le penser après votre tout premier match, quand vous avez pris deux cartons jaunes en… deux minutes.
"Les arbitres sont très différents ici et je dois encore m’y faire. Tu as des fautes spectaculaires qui ne sont pas sifflées et des petits contacts sanctionnés. Quand je prends la première jaune, je crois même qu’on siffle une faute pour moi. Ce qui m’a énervé et m’a fait réagir. J’avais tellement faim de foot que je me suis laissé déborder par mes émotions."
Le mercato a vraiment été difficile à vivre pour vous ?
"Oui. Avec le Covid, les clubs sont encore plus prudents : "Mirallas, il a 33 ans, il n’a plus joué depuis huit mois, prend-on le risque de le faire signer ?" Heureusement que les dirigeants turcs réfléchissent différemment. Ici, ils tiennent moins compte de l’âge et de savoir si on pourra un jour te revendre avec une plus-value. Tous les clubs sont gérés par des multimilliardaires qui préfèrent voir un mec de 35 ans qui mouille le maillot qu’un mec de 18 ans qui se bat mais qui n’a pas d’expérience. Regardez Loïc Remy qui a signé à Rizespor. Qui connaît ce club ? Pourtant, il a reçu un très beau contrat. La direction de Gaziantep m’a fait me sentir désiré ; c’était agréable."
En voyant que la ville était à la frontière syrienne, ça ne vous a pas fait peur ?
"Non. J’ai plusieurs amis turcs et j’ai demandé ce qu’ils pensaient de Gaziantep. Ils m’ont tous dit la même chose : ’On sera trop jaloux si tu signes là, c’est la ville où l’on mange le mieux du pays.’ J’ai effectivement pu m’en rendre compte : tout est délicieux. En plus, il y a le soleil tous les jours et il n’y a pas de trafic malgré 1,8 million d’habitants."
À votre âge, vous n’avez pas envisagé un transfert lucratif dans un championnat exotique ?
"Pour être honnête, la possibilité a été sur la table un moment. J’avais une très belle offre en Arabie saoudite. Le contrat était prêt et j’avais reçu des billets d’avion pour me rendre sur place mais j’ai finalement refusé. Je savais que quelque chose pouvait se concrétiser en Turquie ; j’avais plusieurs touches."
En Belgique, personne n’a tenté le coup ?
"C’était difficile. Ma priorité a longtemps été de resigner à l’Antwerp. J’ai eu Leko plusieurs fois au téléphone et on a directement eu un bon rapport. Mais on n’a pas su se mettre d’accord avec la direction."
Vu votre saison difficile, on vous imaginait pourtant mal prolonger l’aventure à l’Antwerp.
"Justement, j’aurais aimé montrer que mes prestations décevantes de l’an passé étaient dues aux soucis que j’avais avec l’entraîneur précédent."
Pourquoi ça n’a pas collé entre Bölöni et vous ?
"Dès le deuxième jour au club, j’ai compris que ce serait compliqué entre nous. On avait des idées opposées. Pour tout vous dire, j’ai déjà eu plus de contacts avec mon coach à Gaziantep que sur toute l’année dernière avec Bölöni."
C’est pourtant aussi un Roumain, Marius Sumudica.
"Oui, mais ils sont très différents. Footbalistiquement, je les respecte tous les deux mais humainement, c’est l’opposé. Dès que j’ai signé à l’Antwerp, des joueurs sont venus vers moi. Ils voulaient que je parle au coach, vu mon expérience, pour régler ce qui n’allait pas. J’ai essayé d’instaurer un dialogue, mais j’étais réprimandé. J’étais un peu le délégué syndical du vestiaire et je l’ai payé."
Qu’est-ce qui n’allait pas ? On raconte que Bölöni arrivait très souvent en retard.
"Je vais le dire ainsi : c’est le coach qui m’a le plus surpris en dehors du terrain. Il se passait des choses que tous mes autres entraîneurs n’auraient jamais acceptées. Finalement, il a eu des résultats. On a été en finale de Coupe grâce à lui. D’autres joueurs de l’Antwerp gardent d’ailleurs un super souvenir de lui. J’ai connu des coachs avec qui je ne jouais pas mais que je trouvais extraordinaires. Et d’autres où j’étais titulaire mais qui ne me faisaient pas rêver. Avec Bölöni, c’était juste humainement que ça ne passait pas."
Vous avez été surpris de le voir signer à Gand ?
"Oui, personne ne l’avait pas vu venir. Pourtant, quand on regarde bien, Gand avait déjà pris son T2 avant (NdlR : Wim De Decker) et les deux présidents s’adorent. Est-ce que ce n’était pas prévu d’avance ? En tout cas, j’étais certain que la mayonnaise n’allait pas prendre. Connaissant des joueurs de Gand, ça ne pouvait pas réussir. Quelqu’un de Gand m’avait même dit : ‘Tu vas voir, il ne restera pas un mois.’ C’est ce qu’il s’est passé…"
Les choses ont changé aujourd’hui à l’Antwerp ?
"Oui, j’ai encore beaucoup de contacts et l’ambiance a changé. Il suffit de voir le cas de Didier (Lamkel Zé) : ce n’est plus la même chanson."
Il vient de démolir Leko dans une interview accordée à notre journal (lire notre édition de jeudi).
"Ça ne m’étonne pas. Pourtant, Didier ne peut s’en prendre qu’à lui. L’Antwerp a fait plus que ce qu’il ne devait pour l’aider. Il a des qualités et s’il avait la tête bien droite, il pourrait viser plus haut. L’Antwerp a essayé de le vendre cet été et il n’est pas parti ; cela veut dire beaucoup. Il faut savoir que tous les coachs se téléphonent aujourd’hui. De toute manière, il suffit de taper son nom sur Google et tu ne verras que des mauvaises choses dans les premiers résultats. C’est du gâchis. J’ai essayé de lui expliquer, d’autres aussi, mais ça ne clique pas dans sa tête."
C’est le joueur le plus fou que vous ayez côtoyé dans un vestiaire, malgré toutes vos années en Angleterre ?
"Oui, c’est fort possible. Ce qui est certain, c’est que c’était la saison la plus dingue de ma carrière, de loin. Je pourrais écrire un livre uniquement sur cette année. J’ai vu des trucs de fou… Je pense que ça pourrait bien se vendre (rires)."
Quand comptez-vous prendre la plume ?
"Vous avez le temps, je ne suis pas près d’arrêter ma carrière (sourire). Tant que mon corps dit oui, je jouerai, même jusqu’à 39-40 ans. Je connais des gars qui ont arrêté le foot trop tôt et qui s’en mordent les doigts aujourd’hui. Pour l’instant, tout va bien. Le coach m’a replacé au poste de numéro 8 dans un 3-5-2 et ça me plaît. Je dois beaucoup courir en perte de balle mais j’arrive aussi à me faire oublier des défenseurs."
Les Diables rouges font-ils toujours partie de vos objectifs ?
"Si je regarde sur mes derniers mois, je ne mérite pas d’être repris. Mais je veux montrer que j’ai toujours le niveau. Maintenant, ce sera difficile quand je vois comment ça se passe. Je devrai avoir une discussion avec Martinez. Je me pose parfois des questions sur certains joueurs sélectionnés, mais il est vrai que, vu la période particulière et cette crasse de Covid, il doit composer avec les blessés, les malades, les positifs… J’ai l’impression qu’avant, il fallait avoir prouvé au haut niveau sur plusieurs années pour être dans l’équipe. Le coach fait peut-être de la place pour la jeunesse mais il faut garder un niveau d’exigence en ce qui concerne la qualité. Il faut que les jeunes soient tirés vers le haut par les Diables les plus expérimentés. Plusieurs gamins ont un vrai potentiel mais, pour certains, ce n’est pas encore le moment. Je suis fier de ce que j’ai déjà accompli chez les Diables, et c’est pour ça que j’ai envie d’avoir une discussion avec Martinez. Je ne fermerai jamais la porte aux Diables. À moi d’être bon en club et on verra bien."
Discuter avec Martinez, c’est possible ?
"Oui. Avec Romelu, je le connais plus que tout le monde. On l’a vu tous les jours pendant quatre-cinq ans. Je sais comment je peux discuter avec lui."