L’avenir de Roberto Martinez à la tête des Diables? Encore mais sous conditions
Si l’Euro l’a fragilisé, le sélectionneur conservera son poste jusqu’au Qatar.
Publié le 04-07-2021 à 20h56 - Mis à jour le 05-07-2021 à 07h51
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Roberto Martinez avait quitté la Russie, en 2018, auréolé d’une troisième place à la Coupe du monde. Il était le sélectionneur qui avait fait progresser la Belgique, et était considéré comme celui qui allait encore la porter vers d’autres sommets. Trois ans plus tard, le technicien espagnol a été pointé comme le responsable de l’échec à l’Euro, et l’élimination contre l’Italie (2-1) a affiché quelques lacunes de management.
C’est le lot d’un sélectionneur d’être tenu pour responsable en cas de contre-performance. Avant Martinez, Marc Wilmots était l’homme de la situation après le Mondial brésilien, en 2014, puis il ne l’a plus été, deux ans plus tard, après l’Euro. Wilmots a été remercié.
Roberto Martinez, lui, sera toujours l’homme de la situation, à la rentrée. Il est sous contrat jusqu’au Mondial qatari, qui débutera en novembre 2022, et il est prévu qu’il aille au bout de son bail. Une raison de ce maintien est que la fédération est à la recherche, elle-même, d’un président après le départ de Mehdi Bayat.
Mettre un terme à la collaboration avec Martinez, en plus de ce que cela coûterait sur un plan financier, serait aussi un risque, vis-à-vis des joueurs. Certains avaient lâché Wilmots en 2016. C’est moins le cas en 2021. Mais Roberto Martinez devra corriger certains points, pour rebondir dès le Final Four de la Ligue des nations, programmé en octobre avec une demi-finale explosive contre la France, le 7.
Une flexibilité de moins en moins flexible
La flexibilité a souvent été présentée comme une des qualités majeures de Roberto Martinez. Son passage à une défense à trois avait été une nouveauté, et une réussite ; le décalage de Lukaku sur le côté droit, pour défendre, avait été salué après le quart de finale du Mondial 2018 contre le Brésil.
Cette flexibilité s’est réduite, avec le temps ; cela s’est vu. Une alternative à la défense à trois n’a jamais été cherchée, par exemple, sinon pour défendre à cinq, ou, par séquence, en cours de match, à quatre. Une attaque à deux avants n’a que très rarement été testée, pour au moins apporter d’autres options, ou mettre un adversaire sous pression quand cela était nécessaire.
Contre l’Italie, le plan de Martinez a été rapidement mis en difficulté, et le milieu a été noyé alors que Lukaku n’a pas su se débarrasser du marquage de Chiellini et Bonucci. Le sélectionneur avait fait le choix de subir, pour profiter des contres, mais il n’a pas su insuffler une deuxième dynamique, en cours de rencontre, quand la situation était bloquée. La seule correction apportée a été la montée de Mertens, à la place de Tielemans, à la 70e minute, pour permettre à De Bruyne de jouer un cran plus bas.
L’idée de faire descendre le joueur de Manchester City d’un cran, dès le coup d’envoi, aurait peut-être permis de mieux garder le ballon, ou d’avoir des options de sorties de balle plus claires, grâce à la lecture de jeu de KDB. Roberto Mancini a gagné le duel tactique, et Martinez reviendra peut-être aux fondamentaux belges, dans le futur : un jeu de possession, pour mettre la pression. La Belgique a joué contre-nature, et n’avait pas toutes les armes pour y arriver (absences de Hazard et Castagne, De Bruyne diminué).
Un management qui pose question
Roberto Martinez avait été un des sélectionneurs à plaider pour l’élargissement des listes à 26 joueurs, à l’Euro. S’il a bien utilisé 23 Diables rouges, il n’a jamais eu recours aux cinq changements qu’il avait à sa disposition. Il en a fait quatre, maximum, et s’est contenté de trois remplacements contre l’Italie - cela s’apparentait même à deux remplacements, puisque Nacer Chadli, à peine monté au jeu, a quitté la pelouse sur blessure.
La montée de Denis Praet, à la place de Chadli, a été interprétée diversement, et pas toujours comprise, surtout. C’est un peu cliché, mais l’apport d’un attaquant, en plus de Lukaku, n’aurait pas été un luxe. Christian Benteke a failli monter… à la 97e minute, quand l’arbitre a sifflé la fin de la rencontre. Le joueur de Crystal Palace aurait pu amener des solutions dans le jeu aérien.
Au final, Benteke et Michy Batshuayi n’ont joué que vingt minutes, cumulées. C’est très peu. L’autre interrogation a porté sur Carrasco, qui n’a pas disputé une minute contre l’Italie. Il n’était que la doublure de Doku, aux yeux du sélectionneur, qui a montré des limites de coaching.
Le maintien des hommes forts, même faibles
Roberto Martinez a-t-il voulu rendre à ses anciens ce qu’ils avaient donné pour la sélection ? Non, le sport de haut niveau ne permet pas d’offrir ce genre de cadeau. Mais le sélectionneur a rappelé qu’il était un conservateur, tout de même.
Au début du tournoi, la question se posait au sujet de Thomas Vermaelen, et sa capacité à enchaîner les rencontres. Le joueur de Kobe Vissel a largement répondu à l’attente, au contraire de Jan Vertonghen. Le défenseur de Benfica, fautif sur le premier but italien, avait fait son âge contre le Danemark. Sa prestation contre le Portugal, en huitième de finale, et pour garder Vermaelen dans l’axe, a sans doute poussé Martinez à lui faire confiance, encore.
Mais il est apparu trop juste, tout comme Mertens a montré ses limites, mais a pu jouer les vingt dernières minutes contre l’Italie, tout de même. Roberto Martinez saura-t-il faire accepter un changement de statut à Vertonghen, comme il a su le faire avec Mertens ? Ce ne sera peut-être pas aussi simple.
Les absences ont également pesé dans la balance belge, et Meunier, même s’il a été esseulé à certains moments, a manqué de fraîcheur. Il avait terriblement manqué en demi-finale de la Coupe du monde 2018 contre la France (il était suspendu). En 2021, l’absence de Castagne a été un élément qui a compté.
Poursuivre le rajeunissement
Tous les choix de Roberto Martinez n’ont pas été mauvais. Celui de titulariser Jérémy Doku, un gamin de 19 ans, pour un quart de finale de l’Euro était osé. Mais il a été le bon. Roberto Martinez a prouvé lors de son mandat qu’il aimait lancer des jeunes, et qu’il s’inscrivait dans une logique à long terme - il est le directeur technique de la fédération, en plus d’être sélectionneur.
Il avait lancé Youri Tielemans au Mondial 2018 et il a profité de toutes les occasions pour le rappeler. Il avait donné sa chance à Yari Verschaeren, très tôt, et a mis à profit ses listes élargies pendant la Ligue des nations ou les qualifications au Mondial 2022, pour inviter d’autres jeunes (Delcroix, De Ketelaere, Saelemaekers, Vanheusden). Il a trouvé, avec Doku, le jeune qui monte et sur lequel il va s’appuyer pour montrer aux autres prétendants le chemin à suivre.