À Charleroi, Andreou est passé de titulaire à la tribune : “Je le prends un peu comme une injustice”
Titulaire sous Still, Stelios Andreou (20) a subitement dégringolé dans la hiérarchie défensive avec Mazzù. Il a tout juste rejoué trois minutes samedi dernier. Un contraste vertigineux sur lequel il revient.
Publié le 10-03-2023 à 07h59
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Il avait tout et n’a plus rien. Ou des miettes. On parle de Stelios Andreou et de son temps de jeu. Transféré à Charleroi avec la bénédiction d’Edward Still à l’été 2021 en provenance de l’Olympiakos Nicosie, le défenseur chypriote de 20 ans est passé de titulaire indiscutable à la tribune depuis l’arrivée de Felice Mazzù. Un contraste vertigineux.
Samedi dernier, trois mois et demi après sa dernière apparition en équipe première, et après un départ avorté vers Reims le 31 janvier pour un couac administratif, il a rejoué. Trois petites minutes, à Courtrai, pour aider à valider la victoire (0-1). L'occasion de lui donner la parole.
Quel a été votre premier sentiment lors de votre montée au jeu samedi à Courtrai ?
”J’étais heureux. Ce n’était que trois minutes mais, psychologiquement, après dix matchs hors de l’équipe dont six en tribune, ça m’a franchement fait du bien de me sentir joueur à nouveau. Ça m’a redonné un peu de confiance. J’espère que ça va continuer lors les prochains matchs.”
Étrangement, vous êtes entré comme milieu défensif.
”Ce n’est pas mon nouveau poste, hein (sourire). Courtrai envoyait beaucoup de longs ballons dans les dernières minutes et le coach m’a demandé de me positionner à côté de Marco (NdlR : Ilaimaharitra). Il voulait un gars pour prendre ces ballons aériens et gagner les duels.”

Vous savez pourquoi vous ne jouez plus depuis que Felice Mazzù est là ?
”J’ai parfois parlé avec lui, bien sûr. Il m’a dit que ce n’était rien de personnel, mais qu’il voulait changer quelque chose en défense parce que l’équipe avait trop encaissé en première partie de saison. C’est le choix du coach, je n’ai rien à dire. Je dois juste continuer à bosser et être prêt le jour où il fera appel à moi.”
Peut-être que vous ne correspondez pas au profil qu’il souhaite.
”Je ne crois pas que ce soit ça. Il a dit qu’il voulait plus d’expérience…”
Mais Mehdi Boukamir, qui était titulaire à sept reprises au début sous Mazzù, n’en a pas…
”Oui, c’est étrange. Je ne sais pas. Mehdi a fait une très bonne préparation hivernale et le coach l’apprécie pour ça. Il a très bien presté. À côté, il y a Damien (Marcq). Un milieu de terrain repositionné en défense. Lui a de l’expérience. Ils se connaissent depuis longtemps et le coach connaît ses qualités.”
“Je n’ai rien vu venir jusqu’aux matchs amicaux de la trêve.”
Mazzù insiste sur la mentalité de guerrier. Votre langage non verbal ou vos attitudes parfois nonchalantes peuvent expliquer votre statut ?
”Je ne sais pas.”
J’essaie de trouver, hein…
”Moi aussi (rire). Non, franchement, mon caractère est bon, je pense. Je n’ai de problème avec personne, je suis calme dans le vestiaire et j’ai une bonne relation avec le coach.”
“Je ne suis pas aveugle. Je ne suis plus dans l’équipe, on joue mieux et on n’encaisse moins…”
Aviez-vous senti cette tendance durant le stage hivernal ?
”Non, je n’ai rien vu venir jusqu’aux matchs amicaux de la trêve. Le premier, le coach avait mélangé les titulaires habituels et les autres, donc je ne me suis pas inquiété. Mais les deux suivants, j’ai compris qu’il jouerait sans moi.”
Une injustice, selon vous ?
”Oui, je le prends un peu comme ça. D’accord, collectivement, je sais qu’on avait encaissé trop de buts et qu’on ne prestait pas assez bien. Les résultats avant son arrivée n’étaient pas bons. Mais en tant que Stelios, j’ai toujours donné le meilleur de moi-même et je ne pense pas avoir été particulièrement fautif. Après, je ne suis pas aveugle non plus. Je ne suis plus dans l’équipe, on joue mieux et on n’encaisse moins… (sourire).”

Avez-vous toujours fait ce qu’il fallait pour mériter votre place dans l’équipe ?
”Oui, je crois. Pour le moment, je ne suis pas titulaire, mais je travaille plus qu’avant, pour être prêt. L’entraînement ne suffit pas. Donc je donne plus. Sur le terrain et en dehors.”
Vous est-il arrivé de perdre votre motivation ou votre sourire ?
”Les premières semaines étaient vraiment difficiles à vivre. Mais j’ai toujours essayé d’être positif, de rester moi-même, de faire mes petites blagues dans le vestiaire, de rester motivé… Parce que je sais que si tu réfléchis trop dans ces cas-là, tu peux te perdre.”
“Je ne m'attendais pas à me retrouver en tribune. C'est dur.”
Être sur le banc est une chose. Être en tribune est en une autre… Comment gérez-vous cette transition abrupte ?
(Le regard égaré au loin). “Pff oui, c’est dur. Je ne m’y attendais pas. Mais je dois rester focus et travailler. Dans un collectif, certains connaissent des périodes de moins bien, et les remplaçants doivent être prêts à saisir leur chance. C’est une phrase bateau mais vraie : tout va vite dans le football.”
Van Cleemput et Knezevic sont revenus de blessure mais Boukamir n’est plus titulaire et Bager est blessé. Vous vous rapprochez du onze de base ?
”J’en ai le sentiment, mais cela dépend notamment des absences.”
Comment avez-vous vécu le départ d’Edward Still? C’est lui qui vous a fait venir la saison dernière.
”Je le respecte énormément. Il a cru en moi. C’était une grande étape et je lui en suis reconnaissant. Il me poussait à l’entraînement, à la salle, pour que je perde les kilos superflus parfois, pour que je dorme bien aussi… On avait une bonne connexion et j’ai tenté de montrer le meilleur de moi-même pour lui rendre la confiance accordée.”
“Vu que je ne joue pas à Charleroi, je me suis dit que Reims était une bonne opportunité.”
En janvier, il a été question d’un prêt au Stade de Reims le dernier jour du mercato. À votre demande ?
”Non, je n’ai rien fait, rien demandé. Le 31, vers 19 h, alors que j’étais tranquillement chez moi, mon agent m’a appelé pour me dire qu’il y avait un intérêt de Reims. Le club n’avait apparemment plus que deux défenseurs centraux et cherchait un troisième en cas de blessure ou de suspension. J’étais surpris mais, vu que je ne joue pas ici, je me suis dit que c’était une bonne opportunité. Cela aurait déjà été un bond en avant dans la hiérarchie par rapport à Charleroi. Et puis Reims, la Ligue 1, c’est un très bon niveau.”
Que s’est-il passé ?
”Je n’ai pas dû me mettre en route, mon agent gérait ça à distance. Mais quand il m’a rappelé à 23 h 05, il m’a annoncé que le transfert n’avait pas pu s’enregistrer auprès de la Fédération française pour 40 secondes. J’étais déçu et énervé.”
Vous auriez retrouvé un autre coach Still…
”Oui, et Samba Diawara (sourire). On n’a pas parlé ensemble, mais je connais leur manière de travailler.”

L’été prochain, du coup, vous songerez à partir ?
”Cela dépendra du temps de jeu que j’aurai d’ici là, et de ce que le coach compte faire de moi. Si pas, il faudra trouver une solution. À mon âge, et pour mon développement, c’est important de jouer, même à un niveau un peu inférieur s’il le faut.”
À 20 ans, c’est votre premier creux. Tout est allé très vite, dans un sens comme dans l’autre. Quel regard portez-vous sur vos deux saisons à Charleroi ?
”Même si je jouais, la première n’a pas été si simple. Je découvrais la Belgique, loin de chez moi et je n’avais que 18-19 ans. Je devais tout faire tout seul : préparer à manger, nettoyer, les courses, trouver mes repères… Maintenant ça va, je connais les endroits importants et la manière de fonctionner ici en Belgique. Tout est plus clair dans ma tête. Mon retour à Chypre durant l’été m’a également fait du bien. Cette saison, mentalement, je suis davantage concentré sur le football, mais tout ne se passe toujours comme vous l’espérez…”
“J'en suis à 47 matchs avec Charleroi. J'espère que j'arriverai à 50 avant la fin de la saison.”
Qu’espérez-vous encore de cette saison ?
”Jouer le plus de matchs possibles parce que mon dernier comme titulaire remonte à avant la Coupe du monde. Un bail ! En fait, j’espère enfin recevoir ma chance avec le coach Mazzù. Et gagner ces matchs, si possible, car ils sont tous importants pour viser le top 8.”
Dans trois matchs, vous atteindrez au cap des 50 avec Charleroi…
(Il coupe). “Oui, je sais ! J’espère d’ailleurs que j’y arriverai avant la fin de la saison (sourire).”
Cela signifie quelque chose pour vous ?
”Bien sûr. Si vous m’aviez dit il y a 2 ou 3 ans qu’à 20 ans je serais déjà à 50 matchs dans un championnat européen comme la Belgique, je pense que j’aurais organisé une soirée pour fêter ça (rire).”