Le Supporter Liaison Officer du Standard positive malgré l’absence de fans cette saison: “98% des abonnés ont repris leur abonnement”
Rencontre avec Quentin Gilbert, le Supporter Liaison Officer des Rouches.
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Publié le 27-05-2021 à 21h13 - Mis à jour le 28-05-2021 à 09h39
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Il doit être disponible, à l’écoute, faire preuve de beaucoup d’empathie, de patience parfois. Il, c’est Quentin Gilbert, le SLO (Supporter Liaison Officer) du Standard. Cette fonction, relativement nouvelle dans le football et imposée depuis quelques saisons par l’UEFA, ce Verviétois de 27 ans l’occupe depuis désormais trois saisons. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’homme est motivé par son rôle qui, à l’heure où les stades sont désespérément vides, revêt encore plus d’importance. Rencontre avec un passionné et un acharné du Standard.
Passé de la T3 à employé du club
Le Standard, le SLO l’a dans la peau. Supporter de la première heure, Quentin Gilbert a vite fait de Sclessin son temple. "Je supporte le club depuis mon plus jeune âge. J’ai passé 10 saisons au cœur du bloc E3. J’étais un membre des Ultras, sans pour autant faire partie du noyau dur. Mais je prenais plaisir à me poster juste au-dessus de ce dernier pour en ressentir toute la puissance, au cœur du chaudron", précise-t-il. En tant que bon supporter rouche qui se respecte, Quentin Gilbert terminait souvent les rencontres avec une extinction de voix. "Je suis du genre acharné. Les chants, je les ai tous chantés. Être au centre de cette T3, c’est magnifique, surtout les jours de Tifo. Être en dessous de la bâche, c’est un sentiment particulier."
La T3, Quentin Gilbert l’a délaissée pour endosser le rôle de SLO. Pour bon nombre de personnes, cette appellation ne veut pas dire grand-chose. Et pourtant, aujourd’hui, la fonction assurée par Quentin Gilbert est primordiale. "L’idée, c’était de remplir le vide, le fossé qui existait entre le club et ses supporters. Avant, il n’y avait pas d’interface, de Monsieur supporters qui filtre tout ce qui vient de la fan base jusqu’au club et la direction et ce, inversement. C’est ça, un Supporter Liaison Officer."
D’abord recommandée par la Pro League aux clubs, cette fonction a été imposée pour suivre les directives de l’UEFA. Dans beaucoup de clubs de l’élite, le SLO n’est pas le poste qui focalise le plus d’attention. Au Standard, c’est différent. "Le Standard a été un des premiers clubs à engager un SLO. Pour les autres formations, c’était souvent un supporter influent qui occupait ce poste. Ici, le Standard, Alexandre Grosjean en particulier, a compris l’importance que pouvait avoir une telle personne au sein d’un club. Cela prouve que la direction veut, plus que jamais, prendre le pouls de ses supporters." L’autre fonction de Quentin Gilbert à Sclessin, c’est d’assurer la stratégie du club. "Cela consiste à professionnaliser la structure, mettre en place une méthodologie de travail, définir des objectifs ou encore allouer des budgets aux différents départements mais mon rôle s’arrête aux portes de la gestion sportive."
"Je ne suis pas un espion"
Passer de la T3 à employé du club, voilà un mouvement qui aurait pu ne pas plaire. Pour ses débuts, Quentin Gilbert a d’abord dû convaincre. "C’est vrai que je suis le cul entre deux chaises. Je suis un employé du club, mais je suis également et avant tout un supporter. Je suis un pont, une courroie de transmission entre le club et ses fans. Un des challenges était de convaincre que je n’étais pas une taupe, un espion ou encore la belle-mère qui allait surveiller les supporters et rendre compte à la direction de leurs moindres faits et gestes. Je peux comprendre qu’on pense à cela mais les gens qui me connaissent, et, je pense, 95 % des supporters, savent que je ne suis pas comme ça et qu’ils peuvent avoir confiance en moi. Deux de mes valeurs sont la disponibilité et la transparence. Je ne cacherai jamais rien sauf si j’y suis contraint et si on me pose une question sur un sujet sur lequel je ne suis pas habilité à répondre, je le dirai sans crainte car je ne sais pas mentir. J’ai un rapport franc avec les supporters. De toute façon, il faut bien se dire, que ce soit les supporters, les employés du club, les joueurs, la direction, on aspire tous à la même chose : que le Standard se porte bien. Et les supporters, au cœur de ce jeu, ont une place primordiale et cela est d’autant plus criant depuis le début de cette crise sanitaire qui est marquée par leur absence. On se rend alors compte de tout le poids qu’ils ont. On espère qu’ils seront de retour prochainement."
"Deux fois plus de travail avec le Covid"
On serait tenté de croire que la crise du Covid est venue réduire les attributions de Quentin Gilbert, mais c’est tout le contraire. "Il n’y a que les jours de match où cela change. En temps normal, je passe aux quatre coins du stade pour être visible, pas pour mon ego, mais pour être disponible pour nos fans. En général, je fais dix kilomètres par match à domicile (rires). Avec le Covid, je marche moins les soirs de match mais je suis deux fois plus actif le reste du temps. Avec cette pandémie, on n’avait, et on n’a toujours, aucune perspective. Il a d’abord fallu rassurer nos supporters par rapport aux abonnements pour la saison passée, leur dire que le Standard n’allait pas leur planter un couteau dans le dos. Les mois ont passé mais le discours n’a pas changé. On a dit qu’on ferait le bilan en fin de saison, ce qu’on a fait et on a trouvé, en étroite collaboration avec la famille des Rouches, trois solutions qui répondaient aux besoins de nos supporters." Rapidement, via les nombreux contacts qu’il entretient avec les fans, Quentin Gilbert prend réellement connaissance du manque qui grandit chez eux. "Du jour au lendemain, on leur a enlevé leur passion, on les a empêchés de se réunir, de se retrouver le temps d’un match, autour d’un verre, pour oublier les tracas du quotidien et supporter leurs couleurs. Plus que de les interdire de venir au stade, c’est d’un sentiment d’appartenance dont ils ont été privés."
"On n’est pas arrivés au point de non-retour"
Plus les mois passaient cette saison et plus on sentait le vent tourner en bord de Meuse. "Tous les ingrédients étaient réunis pour qu’il en ressorte quelque chose de négatif. La pandémie mondiale, des résultats décevants, un changement de coach. Tout était fait pour que le vase déborde." Malgré des mouvements de contestation, cela n’est pas arrivé. "À mon niveau, je ne peux pas éliminer le Covid ou faire en sorte que l’équipe gagne d’un claquement de doigts. Ce qu’il me reste, c’est le dialogue, expliquer aux supporters que le futur ne pourra qu’être meilleur. On veut réellement construire, dès la saison prochaine, sur des bases solides que ce soit au niveau sportif, financier, gestion opérationnelle. Tout le monde bosse en coulisses pour faire avancer le club. Cela ne se voit peut-être pas car ce qui est perceptible, ce sont les résultats ou encore les transferts, mais je peux assurer aux fans que tout est mis en œuvre pour que le Standard se porte bien."
Cette saison, à plusieurs reprises, cela a été plutôt tendu avec les supporters qui n’ont pas manqué de marquer leur mécontentement. "Mais le point de non-retour n’a pas été atteint et ce, je pense, grâce à la réunion de samedi dernier", assure Quentin Gilbert. "Initialement, elle devait se tenir plus tard mais suite aux communiqués de la FDR et des groupes d’animation, on a décidé de l’avancer pour, justement, que cela ne dérape pas. Quand on est dans une situation compliquée, il faut savoir se dire ses quatre vérités en face, quitte à hausser parfois le ton. Mais il en est ressorti une ligne directrice commune."
"Garder une ligne directrice"
Dans un avenir proche, le Standard aimerait retrouver de la tranquillité et de la sérénité. "Notre but est de tracer une ligne directrice et de la suivre, peu importent les résultats. Dans le foot, émotionnel et rationnel s’entremêlent. Le supporter, et c’est sa définition, est à 100 % dans l’émotionnel. De notre côté, on se doit de garder ce côté rationnel. Cela ne veut pas dire que l’un a raison et l’autre a tort, il faut trouver le juste équilibre. Un exemple, si un de nos jeunes venait à partir, c’est peut-être parce que ce dernier a une autre ambition, ou encore que cela représente un bon deal financier pour le Standard et que cela permettra de garder les autres et de continuer à en sortir des nouveaux. Mais cela ne voudrait pas dire que tous nos jeunes vont nous quitter."
Et le SLO du Standard de lancer un message aux supporters. "Je n’ai qu’une envie : leur dire merci. Merci car des 20 000 abonnés de la saison dernière, 98 % ont opté pour une de nos formules et ont ainsi repris leur abonnement. Je leur dis qu’i ls sont le symbole de la loyauté envers le club."