Standard: "Pour franchir un cap, on doit rendre le groupe plus complet"
Nous avons confronté Ronny Deila aux manquements dans son noyau. Le Norvégien répond sans détour.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/2cc7f7d7-6ba8-4679-9375-5eca4f22f6f8.png)
Publié le 17-02-2023 à 07h48
:focal(1995x1338.5:2005x1328.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/ZZ6GNYT7RNGZ5JY4AGLU75V2LQ.jpg)
C’est passablement énervé que nous l’avions quitté dimanche dernier après la cinglante défaite subie à Slcessin face à Courtrai. “On n’a rien créé du tout et réalisé un match de m… On a ce qu’on mérite”, avait alors lâché Ronny Deila. Ce jeudi, nous avons retrouvé le T1 norvégien qui a avoué avoir connu un début de semaine très compliqué. "Lundi, j'ai vécu mon pire réveil depuis mon arrivée au club”, concède-t-il avant d’ajouter : "je me suis levé avec le sentiment d'un gars qui a commis une erreur la nuit et est réveillé par la police au petit matin.” Le ton était donné. Nous avons alors confronté le coach des Liégeois aux manquements dont souffre son équipe mais aussi le club en général. Comme toujours, il a répondu sans détour.
Son groupe manque de solutions offensives
“Il nous faut de la vitesse et un buteur”
C’était déjà criant depuis le début de saison, ça l’est d’autant plus depuis la blessure de Perica : le Standard manque d’un buteur. De manière plus générale, les Rouches ont clairement besoin de plus d’options offensives et ce, dès le prochain mercato estival. “Dans l’immédiat, on doit être créatif… Osher (Davida) peut jouer là mais il est meilleur en tant qu’ailier. On aimerait avoir plus d’attaquants disponibles”, lance le T1 qui revient ensuite au constat qu’on lui a dressé. “Pour le reste, je suis d’accord avec vous. On manque de deux choses : de la vitesse devant et des gars capables de planter des buts. On doit les créer ces joueurs (NdlR : rendre Ohio, Perica et Emond plus tueurs) et on doit aussi les chercher pour le futur. Des buteurs, c’est ce qui est le plus cher en football. Mais quand je regarde la photographie globale du club, voilà ce que je vois : on a rebâti la maison. Quand on rénove, il faut aussi nettoyer. C’est ce qu’on a fait. Et maintenant, on doit l’habiller. Nos fondations sont là : on a une culture, un style de jeu, beaucoup de jeunes talents. Mais on doit maintenant rendre ce groupe plus complet. Il faut donc ajouter de la qualité offensive, des joueurs qui créent des espaces pour les autres. On y est arrivé quand on a joué avec Stipe et Noah devant contre Eupen. C’est sur ça qu’on doit travailler. ” Et Deila de poursuivre en défendant son groupe actuel. "La culture est bonne, le groupe travaille dur, ils sont en demande. Mais on sait qu’on devra, l’été prochain, lui apporter un plus pour franchir un cap."

Son équipe n’assume pas le statut de favori
“On doit mieux gérer la pression”
Face à Courtrai, les Standardmen étaient clairement favoris d’autant qu’en cas de victoire, ils pouvaient revenir à une longueur de Bruges, actuellement quatrième. La suite, on la connaît. “C’était le pire lundi depuis mon arrivée au club. J’étais vraiment meurtri. J’ai déjà ressenti cela plusieurs fois dans ma vie. Je sais que les joueurs avaient envie de bien faire, que l’atmosphère dans le groupe était bonne avant que les gars ne montent sur le terrain. On s’était dit qu’on voulait les attaquer, les acculer durant les premières minutes et à l’arrivée, c’est l’opposé qui s’est produit. ”
Ce n’était pas la première fois que les Standardmen échouaient alors qu’ils partaient avec la faveur des pronostics. “C’est arrivé contre Seraing, contre OHL et même contre Ostende contre qui on a souffert”, constate le coach. “On a un souci lorsqu’il s’agit de gérer la pression, gérer les attentes. C’est quelque chose dont on parle. Il faut être plus dominant. En général, on l’est mais contre Courtrai, malgré une possession de 53 %, on n’a pas su se créer une seule occasion. Ce n’est pas acceptable. Depuis la fin décembre, j’ai senti cette équipe grandir, les gars ont beaucoup bossé. Parfois, on reçoit un choc comme celui de dimanche dernier et on se demande ce qui se passe. On a été plus calme cette semaine. J’ai dit à mes gars que je n’avais aucun problème à perdre un match mais le faire de la sorte, ça me posait un énorme souci. C’est pourquoi j’étais vraiment mal lundi. Samedi, la seule chose que je demande : donnez tout. On a une chance face à tout le monde quand on fait ce qu’il faut. ”

Son groupe manque de leader
“Certains grandissent dans ce rôle”
Ce qui a frappé dimanche dernier, c’est la résignation des joueurs après l’ouverture du score de Courtrai. Les 16.000 supporters présents dans le stade ont alors eu droit à la version 2021-2022 du Standard, celle qui baissait la tête après chaque coup dur. Du coup, une question se pose : ce groupe dispose-t-il suffisamment de leaders ? “C’est bien entendu quelque chose que nous devons également travailler pour le futur”, reconnaît le coach. “Mais certains grandissent dans ce rôle de leader. Je pense ici à Aron (Dönnum) ou encore à Filip (Zinckernagel). C’est dans les moments compliqués qu’il faut relever la tête. Je l’ai dit aux joueurs, le langage corporel est important. Relevez la tête, bombez le torse et battez-vous jusqu’à la fin et on verra alors ce qui se passe. Mais quand les têtes sont basses, on ne parle plus, on ne s’encourage pas et on affiche un manque de leadership et d’engagement. Ce n’était pas beau à voir. Je m’inclus dans ce constat, il faut aussi savoir préparer cette équipe à tout donner et jouer sans pression. ” Une des missions d’un coach, c’est également d’aider certains jeunes à devenir des leaders et Deila en est bien conscient. “On a recruté Ibe (Hautekiet) qui est un leader naturel. Il n’a que 20 ans mais il a toutes les qualités qu’on cherche chez un leader. On doit aussi aider nos jeunes à se développer et à devenir des leaders. Dans chaque club où je suis passé, j’ai entendu cette phrase : nous n’avons pas de leader. Mais en réalité, on en a et on ne se rend pas compte. Si un joueur, spécialement un jeune, se sent impliqué dans le projet, qu’il joue, qu’il a son mot à dire, qu’il peut parler et prendre ses décisions, alors il peut devenir un leader. ”
"Il faut aussi savoir aider un jeune à devenir un leader."
Son groupe n’a pas la culture de la gagne
“Il faut développer notre mentalité”
Le temps et les coachs passent mais le constat reste le même à Sclessin : le Standard manque de consistance et de régularité. Les Liégeois semblent tellement loin de réaliser la même série que l’Union (17 matchs de Pro League sans défaite). Contre Courtrai, les hommes de Ronny Deila ont même semblé douter après l’ouverture du score comme s’ils étaient effrayés de revoir les démons de la saison dernier resurgir. “Soyons de bon compte, cela n’a pas uniquement un lien avec la saison dernière. C’est un constat qui dure depuis plusieurs saisons. Le Standard doit être habitué à la culture de la gagne. On parle de top 4 mais jouer ce genre d’équipes : Genk, l’Union, l’Antwerp, c’est le top niveau. Pour se hisser à leurs côtés, il faut comprendre qu’il faut franchir un cap. On le sait, quand on est au top, on peut battre tout le monde. Mais quand ce n’est pas le cas, on peut aussi perdre contre n’importe qui. C’est ça qu’il faut modifier. On doit développer notre mentalité spécialement dans les matchs où on nous attend. Trop souvent, lorsqu’on pouvait franchir un pas, on a échoué. ”

Du coup, quelle sera la clé pour que le Standard gagne enfin en consistance? “Développer plus de talents, réaliser un bon mercato estival et continuer à développer notre style de jeu. Quand on parle du Standard, on doit immédiatement avoir un style de jeu en tête. Cela ne se fait pas en six mois, cela prend des années. Mais il faut savoir franchir des paliers, tout le temps. ”
Son équipe manque d’expérience des gros matchs
“La répétition des matchs importants nous fera grandir”
En écoutant Ronny Deila, on sent directement que la situation du club le touche et plus que tout, on sent son désir profond d’aider le club à franchir un palier comme il a pu le faire partout où il est passé depuis le début de sa carrière. “Bien sûr que je suis excité par le projet. Même si je suis parfois impatient, je dois bien l’admettre. Mais je suis vraiment heureux avec ce groupe. On fait tout pour améliorer ce groupe et le mettre dans les meilleures conditions possibles. On veut se battre pour atteindre les playoffs. ”
"Tu penses que tu es bon, va le montrer à l'Union ou à Bruges."
Pour faire passer un palier à son club, Ronny Deila ne voit qu’une solution : se mesurer aux meilleurs. Quoi de mieux alors que le calendrier du Standard lui réserve des déplacements à l’Union, à Anderlecht et à Bruges avec une réception de Westerlo. “Cette équipe a besoin d’avoir plus d’expérience des matchs importants. De jouer des playoffs, de sentir ce que cela fait et d’apprendre de ce genre de match. Chaque rencontre doit être une finale de Coupe. Je ne peux pas juste leur expliquer ce que c’est de jouer une finale de Coupe, ce que c’est de jouer à Sclessin, ce que c’est de jouer un match à l’Union, à Bruges. Il faut le vivre, le répéter et l’améliorer. C’est le cercle de l’apprentissage. Si tu ne joues pas ce genre de matchs, tu n’apprends pas. S’entraîner, ce n’est pas uniquement en semaine. C’est aussi affronter les meilleurs, se mettre à leur niveau. Maintenant, on a un calendrier difficile mais c’est une bonne chose. Je veux que les joueurs se rendent compte de ce que c’est de se confronter à ce niveau. Tu penses que tu es bon, alors va le montrer à Bruges ! Tu veux jouer l’Europe la saison prochaine, prouve-le et donne-toi les moyens d’y arriver. C’est comme ça qu’on va faire évoluer le club. Prenons l’exemple de Canak. S’il joue des matchs de playoffs ou encore des matchs de Coupe d’Europe, il va prendre en expérience et sa valeur va augmenter. Avoir des internationaux dans le groupe est aussi primordial. Nous sommes au début de notre projet. ”