La Ligue des champions prend de plus en plus l’accent belge : retour sur les finales noir-jaune-rouge
Ce samedi à Istanbul en finale de la Champions League, Kevin De Bruyne (Manchester City) ou Romelu Lukaku (Inter MIlan) espère devenir le 7e footballeur noir-jaune-rouge à soulever la “coupe aux grandes oreilles”. Voici la belge histoire de La Ligue des champions, ex-Coupe des clubs champions…
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- Publié le 09-06-2023 à 20h20
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L’accent belge dès trois ans
La Coupe des clubs champions a trois ans seulement quand elle prend déjà l’accent belge : c’est le Heysel, plein comme un œuf (67 000 spectateurs) qui accueille la 3e finale de la C1. Dans le cadre magnifique de l’Expo 58 qui magnifie Bruxelles, le Real Madrid, qui avait éliminé… l’Antwerp (champion de Belgique 1957, le dernier titre du Great Old jusqu’à dimanche dernier) en huitièmes de finale, remporte le plus compliqué de ses cinq succès consécutifs. Le Milan AC le pousse aux prolongations, mais Gento offre la “coupe aux grandes oreilles” aux Merengues (3-2 ap).
Le Heysel est le seul stade belge qui a accueilli une finale de C1. Il eut cet honneur à 4 reprises : en 1958 donc, en 1966 (6e succès du Real, devant le Partizan Belgrade), en 1974 (première victoire du Bayern, contre l’Atletico… en deux matchs puisque le stade bruxellois accueillit aussi le “replay”), et en 1985 (la première C1 de la Juventus, contre Liverpool), avec le funeste match de la honte, qui coûta la vie à 39 spectateurs. Ce drame a brisé l’histoire d’amour entre la capitale de l’Europe et la plus prestigieuse de ses compétitions de foot…
Le 1er Belge sur la pelouse d’une finale était en noir
L’apothéose 1958 de la Coupe des clubs champions au Heysel avait aussi l’accent belge sur le terrain : ce fut en effet la première fois qu’un de nos compatriotes foula la pelouse d’une finale. Un Bruxellois né à Liège, tout de noir vêtu : Albert Alsteen, arbitre du choc entre le Real et Milan. Cet ancien joueur de l'US Auderghem et de Woluwe Sports reconnut que ce match fut "difficile à arbitrer tant le rythme de la rencontre fut infernal". Mais il s'acquitta fort bien de sa tâche. Après la finale, les dirigeants madrilènes lui offrirent même un beau... cadeau. "Ils me firent savoir que ma femme et moi étions invités un mois en vacances en Espagne, avoua quelques années après Albert Alsteen. J'ai attendu de répondre, et d'accepter, que je sois à la retraite..." Et le couple passa alors un mois à Cadix, au frais du Real. Inconcevable aujourd'hui...
Le Carolo Vital Loraux siffla, lui, l’apothéose de 1974, toujours au Heysel, tandis qu’Alfred Delcourt dirigea le replay quelques jours plus tard. Alexis Ponnet eut l’honneur d’être désigné pour la finale de 1987, à Vienne (victoire de Porto sur le Bayern).
Le Bruxellois est le 4e et dernier arbitre belge à avoir sifflé une finale de C1. Il y a 36 ans déjà…

9 Belges en une finale !
9 Belges qui jouent la même finale de Ligue des champions, impensable ? Eh bien non, c’est déjà arrivé, en 1978. Cette année-là, le FC Bruges atteint l’apothéose de ce qui s’appelle encore la Coupe des clubs champions. Les Blauw en Zwart d’Ernst Happel écartent les Finlandais de Kuopio, les Grecs du Panathinaïkos, les Espagnols de l’Atleico et les Italiens de la Juventus pour s’offrir un choc à Wembley, face à Liverpool. Les Reds sont tenants du titre, et ont déjà battu les Brugeois en Coupe de l’UEFA deux ans auparavant. À la 64e minute, Kenny Dalglish brise le rêve des Flandriens, soutenus par 24 000 supporters et diminués par le forfait de Raoul Lambert. Plus aucun club belge n’a atteint la finale de la C1 depuis…
- Les Brugeois alignés par Ernst Happel : Jensen (Dan) ; Bastijns, Krieger (Aut), Leekens, G. Maes puis 70e Volders, Cools, De Cubber, Vandereycken, Kü (Hon) puis 58e D. Sanders, Simoen, Soerensen (Dan).
"J'ai pleuré, après ce match. On avait été si près du but."
Les larmes d’”El Simpático”
Le premier footballeur belge à jouer une finale de C1 sous le maillot d’un club étranger ? Jean-Marie Pfaff, en 1987… lors de la dernière arbitrée par un Belge. Le gardien des Diables la disputa sous le maillot d’un Bayern Munich crucifié par Rabah Madjer d’un geste technique qui porte désormais le nom de l’attaquant algérien de Porto (2-1). "J'ai pleuré, après ce match. On avait été si près du but”, confie “El Simpático”.
"Gagner ce trophée, savoir que tu es le premier joueur belge à le faire, ce fut une immense fierté."
Un Lion belge, à jamais le premier
Un an plus tard, un Belge soulève enfin la “coupe aux grandes oreilles”. Eric Gerets restera à jamais le premier. Le Lion de Rekem est alors le capitaine du PSV Eindhoven qui bat Benfica, en finale 1988 au Neckarstadion de Stuttgart (0-0 après les prolongations, 6-5 aux tirs au but). “Gagner ce trophée, savoir que tu es le premier joueur belge à le faire, ce fut une immense fierté”, confie l’ancien célèbre n°2 barbu.

Le sorcier envoûte la première Ligue des champions
La Ligue des champions a davantage souri aux Belges que la Coupe des clubs champions. En 1992, l’UEFA décide de rebaptiser la plus prestigieuse de ses compétitions de clubs. Et le premier “OM” à marcher sur la Champions League est belge. En 1993, à Munich, Raymond Goethals mène l’Olympique de Marseille au sacre, grâce à un but mythique de Basile Boli, face au Milan AC (1-0).
Le sorcier disputait sa deuxième apothéose, après la finale perdue à la surprise générale en 1991, à Bari, avec l’OM contre l’Étoile Rouge, aux tirs au but. Le Bruxellois reste le seul entraîneur belge à s’être assis sur un banc d’une finale de C1. Il est aussi toujours le plus vieux coach à avoir remporté la Ligue des champions : il avait 71 ans et 230 jours !

Le tournant doré du XXIe siècle
Après l’arrêt Bosman de 1995, les footballeurs belges furent de plus en plus nombreux à tenter leur chance à l’étranger. Et le renouveau de notre équipe nationale grâce à l’impulsion de notre génération dorée a boosté la présence de footballeurs noir-jaune-rouge en finale de la Ligue des champions au XXIe siècle. Depuis 2010, seules trois apothéoses (2011, 2017 et 2020) n’ont pas concerné un ou plusieurs joueurs belges !
Une finale ça ne se joue pas, ça se gagne
Daniel Van Buyten fut notre porte-drapeau en Ligue des champions au XXIe siècle, lui qui fit le lien entre les générations diaboliques. Le Hennuyer est le seul Belge à avoir disputé trois finales de Ligue des champions (2010, 2012 et 2013), toutes avec le Bayern, et son 3e essai fut le bon (succès contre Dortmund à Wembley il y a dix ans), même si le défenseur suivit ce derby allemand sur le banc, Jupp Heynckes décidant de faire confiance à la paire défensive centrale Boateng-Dante, alors que Big Dan avait été titulaire lors des quarts et lors de la demi-finale retour.

Deux autres finales lors de la dernière décennie ont souri à des footballeurs belges, qui ont fonctionné par paires, avec, à chaque fois, un Diable sur le terrain, et l’autre sur le banc.
"Remporter la Ligue des champions, c’est quelque chose de spécial, d’incroyable. C’est un rêve d’enfant qui se réalise."
En 2019, Divock Origi et Simon Mignolet ont entamé l’apothéose de Liverpool face à Tottentham aux côtés de Jurgen Klopp, dans le “dug-out”, mais l’attaquant a eu la chance d’entrer au jeu. Et le joker a permis de remporter la mise : déjà héros de la demi-finale contre Barcelone (son doublé face au FC Barcelone lors de la remontada des Reds les avait envoyés en finale), Origi tuait le match face aux Spurs à la 87e en doublant l’avance de Liverpool (2-0). Pour Mignolet, devenu la doublure d’Alisson, ce sacre effaçait la terrible frustration de 2018, quand il avait dû regarder, impuissant, cloué sur son banc, la calamiteuse prestation de Loris Karius, à qui il avait dû laisser sa place (le portier brugeois disputa seulement les barrages de Ligue des champions cette saison-là), face au Real…

En 2022, Thibaut Courtois était, lui, dans les buts du Real Madrid lors de la victoire face à Liverpool, mais Eden Hazard resta, lui, sur le banc. Le gardien avait été diabolique face aux Reds !
Le Brainois, peu utilisé par Carlo Ancelotti (une seule titularisation, en phase de groupes contre Tiraspol, puis quelques minutes face à l’Inter et le PSG) lors de cette C1, et le Limbourgeois auront donc un successeur ce samedi, à Istanbul…

Ce sera donc Kevin de Bruyne ou Romelu Lukaku
Une finale, ça se joue… mais ça ne se gagne pas toujours
KDB a déjà vécu une finale de la C1, perdue avec City en 2021 contre Chelsea. Il espère faire comme Courtois, qui avait aussi raté sa première tentative, en 2014. Le gardien limbourgeois défendait alors les buts de l’Atletico Madrid, et avait comme équipier Toby Alderweireld. Mais les deux Diables avaient dû s’incliner face au Real, l’Atleti s’écroulant dans des prolongations qu’avaient arrachées les Merengues grâce à un coup de boule de Ramos dans le temps additionnel, pour une Décima historique.
L’Atleti retrouva la finale deux ans plus tard, toujours avec un produit noir-jaune-rouge : Yannick Carrasco. Qui brilla, puisque le Bruxellois devint le premier buteur belge lors d’une apothéose de C1. L’égalisation du Diable ne permit pourtant pas aux Colchoneros d’enfin soulever “la coupe aux grandes oreilles”, puisque le Real, encore lui, émergea lors des tirs au but…

"L'entraîneur m'a enlevé ce plaisir. Je ne lui pardonnerai jamais pour ça."
Les rendez-vous manqués
Comme pour De Bruyne, la Ligue des champions reste une cicatrice dans la carrière de Romelu Lukaku. D’autant plus béante qu’un club dans lequel l’attaquant des Diables jouait l’a remportée… mais elle ne figure pourtant pas à son palmarès ! Arrivé durant l’été 2021 à Chelsea en provenance d’Anderlecht, Big Rom ne disputa que 8 bribes de matchs en Premier League 21/22, avec une seule titularisation, lors du dernier match de championnat quand Di Matteo fit tourner pour préserver ses stars pour la finale de Ligue des champions face au Bayern. Un match remporté ensuite par les Blues, grâce à un super Didier Drogba. Sans Romelu Lukaku, qui ne fut jamais aligné en C1 puisque Villas-Boas, le prédécesseur de Di Matteo, ne l’avait pas inscrit sur la liste des joueurs autorisés à jouer en coupe d’Europe…
”Cette victoire, c’est l’une des choses dont j’avais toujours rêvé. Je voulais fêter un tel titre avec mes équipiers. C’est quand même beau à 19 ans. J’étais très heureux pour le club, mais il y a une personne qui m’a enlevé ce plaisir : l’entraîneur précédent (Villas-Boas). Je ne lui pardonnerai jamais pour ça. Je n’ai pas touché ce trophée (la Ligue des champions) parce que je ne l’ai pas gagné. Si je ne contribue pas à faire quelque chose, ce n’est pas mon trophée”, déclara Big Rom au Het Laatste Nieuws en 2020.
En 2015, un Belge est, lui, allé chercher sa médaille de vainqueur de la Ligue des champions, et a posé sur les photos avec la “coupe aux grandes oreilles”, mais son nom ne figure pourtant pas non plus au palmarès de l’épreuve. Thomas Vermaelen a en effet dû rendre sa médaille : il n’était pas sur le banc de Barcelone lors de la victoire contre la Juventus, et n’avait pas disputé une seule minute en Ligue des champions cette saison-là…