De l’Olympic Charleroi à Riyad Mahrez, l’incroyable trajectoire de Kevin van den Kerkhof: "En Belgique, j'ai retrouvé le plaisir de jouer"
Encore en D1 amateurs il y a quatre ans, Kevin van den Kerkhof a fêté sa première titularisation avec l’équipe nationale d’Algérie ce lundi à 27 ans.
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Publié le 29-03-2023 à 21h36
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Forcément, le fil de l’histoire sinueuse s’est déroulé dans sa tête lorsque ses crampons ont pénétré la pelouse du stade Radès de Tunis. Il y a quatre ans, Kevin van den Kerkhof se produisait au Sportcentrum de Tessenderlo ou au Sportpark Terschueren de Winkel.
Désormais, le latéral droit évolue aux côtés de Riyad Mahrez et d’Ismaël Bennacer. “Si mon parcours peut donner de la force aux jeunes, ça me ferait plaisir. J’ai toujours eu le mérite d’y croire”, commente au téléphone le Fennec juste de retour sur le sol français après avoir étrenné sa première cap avec l’une des meilleures nations africaines.
C’est que le chemin fut tortueux. Il faut remonter le temps quatre ans en arrière pour s’apercevoir que la pente qu’il a franchie est gigantesque. En 2017, le Valenciennois débarque à la Louvière Centre après une expérience à Lorient où aucune chance chez les pros ne lui a été octroyée. “J’étais cantonné à la CFA avec l’équipe réserve. Les blessures m’ont ralenti. Je suis revenu jouer à Aulnoye, un club situé dans ma région natale, puis j’ai voulu voir autre chose et découvrir la Belgique qui ne se trouvait pas loin de chez moi”, explique celui qui ne détient pas de lien avec le plat pays contrairement à ce que pourrait laisser supposer son nom de famille.
Autant l’avouer. Ce serait mentir de prétendre que ses coéquipiers de l’époque avaient prédit une telle trajectoire. N’empêche, van den Kerkhof sort vite du lot par ses qualités intrinsèques. “Tu voyais qu’il était doué naturellement et qu’il avait reçu une bonne formation”, se remémore Tibor Balog, son premier entraîneur en Belgique. “Il est venu en test et on l’a tout de suite gardé. Mais si vous m’aviez dit à l’époque qu’il finirait en équipe nationale, bien sûr que je ne vous aurais pas cru.”
Si vous m'aviez dit à l’époque qu’il finirait en équipe nationale, je ne vous aurais pas cru.”
Toujours à Basic-Fit en dehors des entraînements
Il fallait garder la foi pour croire encore à un parcours professionnel dans les terrains embourbés de D2 amateurs. “En plein hiver, sur des pelouses à la limite du praticable, j’ai vécu des moments compliqués, mais je vous assure que j’ai toujours su que je pourrais revenir dans le milieu pro”, certifie le principal intéressé.
Doté d’un mental d’acier, celui qui peut évoluer également au poste de milieu droit décide de mettre toutes les chances de son côté en travaillant seul à côté des entraînements collectifs. “Dès qu’on avait un moment de libre, je voyais sur son snapchat qu’il était à Basic-Fit”, se rappelle Quentin Garcia Dominguez, son coéquipier chez les Louviérois. “Forcément, il était le plus fort aux tests physiques.”
“Dès qu’on avait un moment de libre, il était à Basic-Fit.”
”Si je n’avais pas exercé ce travail-là, peut-être que je serais encore en D1 amateurs”, s’interroge l’international algérien dont le parcours laisse rêveurs ses anciens partenaires.
“Je l’ai eu par message il y a quelques jours. Il avait mis une photo avec Mahrez. C’est magnifique ce qui se passe pour lui, mais il y a une logique. Il a réalisé les bons choix aux moments idoines”, conclut Dominguez.
Il y aura donc d’abord ses 9 buts qui aident l’URLC à décrocher le titre en D2 amateurs. “Ce n’est pas mal pour un arrière droit”, sourit Balog. “Il évoluait très haut lorsque nous avions la possession. Et puis, Kevin est grand et rapide, fort dans les duels et il dispose d’une bonne technique. Ça nous a aidés.”
Un contretemps qui change sa vie
Ses performances attirent l’œil de l’Olympic Charleroi. Très vite, l’actuel élément de Bastia se familiarise avec le niveau de l’échelon supérieur. “En Belgique, j’ai retrouvé le plaisir de jouer. Ce que j’ai aimé, c’est la proximité avec les gens du club et les supporters. Ils étaient adorables. C’était presque une famille.”

Hélas, la Covid passe par là et à l’instar de toute la planète, il est mis en arrêt forcé contrairement à sa carrière qui prend un coup d’accélérateur. Un trimestre plus tard, le Nordiste est proche de signer dans un club de D1B. “Ça ne s’est finalement pas fait à cause d’un problème de papier.”
Il ne le sait pas encore, mais ce contretemps viendra changer sa vie. Van den Kerkhof atterrit à Dudelange et croise la route de Régis Brouard qui lui promet de travailler un jour avec lui tant il a trouvé grâce à ses yeux.
L’ancien technicien de Tubize met en application sa promesse l’été dernier lorsqu’il signe à Bastia. Le reste de l’histoire présente tous les codes d’un conte de fées. “Avec mes 4 buts et mes 5 passes décisives, des articles sont sortis dans la presse comme quoi Djamel Belmadi s’intéressait à moi, mais je n’avais reçu aucune confirmation.”
Comme un symbole, elle interviendra après un match à Valenciennes, là où il a vu le jour. “Je ne suis pas retourné à Bastia, car j’ai profité de mon week-end pour rester chez mes proches. Je me trouvais juste devant la porte du domicile familial quand un numéro français que je ne connaissais pas m’a appelé. C’était l’entraîneur adjoint de la sélection qui me demandait ce que représentait l’Algérie pour moi et si j’avais mes papiers. Il m’a précisé qu’il prenait juste des renseignements et que ce n’était pas pour tout de suite.”
Quelques jours plus tard, le latéral est pourtant prié d’accélérer les démarches. La loi stipulant qu’il doit porter le nom du parent d’origine algérienne, Kevin van den Kerkhof devient donc Guitoun. “J’ai dû faire mon passeport en vitesse. Lundi dernier, j’étais dans un avion et quand j’ai atterri, j’ai découvert mon nom sur la liste. J’avais les larmes aux yeux.”
Le rêve ne s’estompe pas, bien au contraire. “Pendant tout le stage, j’ai repensé à mon parcours et au fait qu’il y a quelques années, je n’étais pas à ce niveau-là.”
Ça ne l’a pas empêché mardi de se hisser au niveau international en réalisant une prestation aboutie avec une victoire face au Niger qui envoie l’Algérie à la prochaine Coupe d’Afrique des nations. “Si on m’avait dit ça, il y a un an…”, sourit-il. La Ligue 1 lui est promise avec son niveau affiché. Qui sait, sera-t-il dans la liste de Belmadi pour la prochaine CAN ? Une chose est sûre, l’avenir s’annonce radieux et il ne devrait plus croiser la Belgique de sitôt.