Amélie Mauresmo évoque ses anciennes rivales Henin et Clijsters: “Je préférais affronter Kim même si elle m’a mis quelques branlées”
La directrice de Roland-Garros se souvient de ses anciennes rivales Kim Clijsters et Justine Henin. Une autre époque.
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Publié le 26-05-2023 à 07h03 - Mis à jour le 26-05-2023 à 08h39
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Depuis décembre 2021, Amélie Mauresmo est devenue le nouveau visage de Roland-Garros. L’ancienne numéro un mondiale, détentrice de deux titres du Grand Chelem, n’a jamais montré l’étendue de son talent en tant que joueuse à la Porte d’Auteuil. En quinze participations, elle n’a jamais vécu le grand frisson d’une demi-finale. Ses meilleurs résultats – quart de finale en 2003 et 2004 – coïncident aux années fastes du tennis belge. Elle a tourné la page de sa carrière de joueuse marquée par 25 titres, dont un à Wimbledon, un à l’Open d’Australie et un Masters.
Quatorze ans après avoir rangé ses raquettes, la Parisienne revient toujours avec autant de plaisir à la Porte d’Auteuil. Elle était déjà revenue comme consultante et comme entraîneuse d’Andy Murray et de Lucas Pouille. Depuis la saison passée, elle a découvert le rôle de directrice d’un monument.
Amélie Mauresmo, quelles seront les nouveautés à Roland-Garros pour cette 122e édition ?
”Pour la troisième édition avec des sessions nocturnes, le tournoi a tenté de régler un certain nombre de problèmes notamment liés à l’heure tardive de fin des matchs, pour les joueurs comme pour le public. Le premier point des rencontres sera joué à 20 h 30, au lieu de 21 h 00 par le passé. Contractuellement, la Fédération française de tennis (FFT) se doit de programmer en session nocturne l’affiche du jour pour le diffuseur exclusif de ces rencontres, Prime Video.”
Il y a aussi une mise à l’honneur d’un joueur qui vous a beaucoup inspiré lors de votre enfance…
”Oui, nous célébrerons les 40 ans de la victoire de Yannick Noah à Roland-Garros. La journée caritative organisée le samedi 27 mai, à la veille de la première journée du tournoi, est renommée 'Journée Yannick Noah' et une fresque à son image sera dévoilée, le lendemain, dans l’enceinte du stade.”
Durant les trois semaines de tournoi, votre emploi du temps sera digne de celui d’un ministre. En dehors de Roland-Garros, à quoi ressemble votre vie d’aujourd’hui ?
“Je ne joue quasiment plus jamais au tennis. Je n’ai pas envie. Le padel ? Non, plus. Il paraît que c’est très addictif mais je n’ai pas craqué. En réalité, je pratique deux sports à commencer par la course à pied. Je participe à un ou deux marathons par an. Je cours certainement trois fois par semaine. En novembre, je bouclais le marathon de San Sebastian en 3 h 14. Sinon, j’adore jouer à la pelote basque quand je vais à Biarritz.”
Roland-Garros ne vous lâche jamais réellement tout au long de l’année. Appréciez-vous ce rôle plus politique ?
“Je prends beaucoup de plaisir dans la gestion du tournoi. Il y a évidemment des soucis à gérer. Mais, on travaille en équipe. Il faut être capable d’écouter, de discuter et prendre les meilleures décisions possibles. Je ne me soucie pas trop de l’aspect politique. Vous savez, la star, c’est avant tout Roland-Garros. Le lieu dépasse toutes les personnes qui peuvent fouler ses allées. Le Grand Chelem était là avant nous et sera toujours là après notre passage.”
L’autre star, c’est Rafael Nadal quand même…
“Rafael Nadal est une bénédiction pour notre Grand Chelem. Son histoire ici est fabuleuse. Il est fantastique. Quand il ne sera plus là, d’autres histoires incroyables s’écriront. Je suis extrêmement déçue pour Rafael Nadal, qui est amené à renoncer à son tournoi de cœur. Je le suis également pour le public de la Porte d’Auteuil ainsi que pour tous les fans de tennis qui seront privés cette année de cet immense champion. Rafael Nadal dont le destin est intimement lié à celui du tournoi de Roland-Garros qu’il a remporté à quatorze reprises, va évidemment énormément nous manquer. Même dans les pires conditions, il a sans cesse renouvelé son histoire.”
N’avez-vous jamais eu un dégoût pour le tennis ?
“Non, jamais. J’ai toujours adoré ce sport. J’ai occupé différentes fonctions. Que ce soit comme joueuse, entraîneuse, consultante ou directrice, je reviens toujours avec le sourire à la Porte d’Auteuil. Après ma carrière, j’ai directement entraîné. Puis, j’ai accepté le job d’entraîneuse en Coupe Davis. Comme consultante, j’ai adoré voir autant de matchs. Aujourd’hui, j’avoue que j’ai moins le temps de voir les rencontres.”
Remontons à l’époque des premiers titres de Rafael Nadal. Vous étiez au sommet du tennis mondial. Êtes-vous nostalgique de ce tennis des années 2000 ?
“Nous avions une génération exceptionnelle avec Justine Henin, Kim Clijsters, les Williams, Lindsay Davenport, Maria Sharapova, Elena Myskina, Jenifer Capriati ou encore Svetlana Kuznetsova.”
Titrée à Wimbledon et à l’Open d’Australie, vous avez toujours éprouvé des difficultés sur votre terre parisienne. Quel est votre regard sur votre parcours à Roland en tant que joueuse ?
“Mon meilleur souvenir est et restera ma victoire chez les juniores. Par la suite, je me mettais beaucoup trop de pression. Elle venait d’abord de moi. J’ai grandi ici. Je savais que ce rendez-vous était important. Je voulais tant proposer mon meilleur tennis. Les Français et les Françaises éprouvent des difficultés en règle générale. Je crois qu’une fille comme Caroline Garcia a le potentiel pour aller au bout. Chez les garçons, une présence en deuxième semaine est jouable.”

Vous avez été aux premières loges pour comparer Justine Henin et Kim Clijsters. Laquelle des deux préfériez-vous affronter sur le circuit ?
“Que la Belgique produise deux telles championnes était hallucinant. Moi, je préférais jouer face à Kim Clijsters même si elle m’a mis quelques branlées. Avec Kim, nous proposions souvent des matchs marathons avec une très haute intensité. Physiquement, nous allions loin. Justine offrait un jeu plus technique. Son approche du point était différente. Kim et Justine s’opposaient au niveau du style. J’estime avoir eu les plus beaux matchs avec Clijsters.”
Avec Justine, nous nous sommes toutes les deux retrouvées au mariage de Nathalie Dechy. Nous étions les deux meilleures joueuses au classement et nous nous étions retrouvées dans le Lubéron en septembre
Justine Henin a tout gagné sauf le tournoi de Wimbledon à cause de vous. En avez-vous reparlé depuis vos retraites respectives ?
“Je l’ai battue lors de deux finales de Grand Chelem (Wimbledon et Open d’Australie). Elle m’a battu en finale des Jeux olympiques d’Athènes en 2004. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis cette époque. Nous avons toutes les deux une autre vie. Il nous arrive de nous parler. On se croise notamment à Roland-Garros. Nous avons toutes les deux du respect l’une pour l’autre. On s’appelle parfois.”
Quelle image gardez-vous de Justine Henin en dehors des terrains ?
“Je me souviens d’une anecdote. Avec Justine, nous nous sommes toutes les deux retrouvées au mariage de Nathalie Dechy. Nous étions les deux meilleures joueuses au classement et nous nous étions retrouvées dans le Lubéron en septembre.”
Et de Kim Clijsters ?
“Quand je pense à Kim, il me vient d’abord ce huitième de finale à l’US Open en 2002. Je l’emporte 6-4, 3-6, 7-5. Mais, c’est surtout pour la scène qui se déroule avant la rencontre. Il avait plu une grande partie de la journée. J’avais croisé un gars de la WTA qui m’annonçait que le match était reporté au lendemain. Moi, je me rendais aux vestiaires pour prendre mon sac et me casser. Je vois alors Kim, étonnée, qui me demande ce que je fais. Elle m’apprend que nous jouons 30 minutes plus tard. Si je ne l’avais pas vue, je serais partie. J’aurais perdu cette rencontre sans même la jouer. Nous avions joué jusqu’au bout de la nuit.”
