Le règlement de World Athletics, du sur-mesure pour les athlètes Nike
Chaussures de course : l’Alphafly Next% répond parfaitement aux nouveaux critères techniques édictés.
Publié le 27-02-2020 à 09h23 - Mis à jour le 27-02-2020 à 09h32
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Chaussures de course : l’Alphafly Next% répond parfaitement aux nouveaux critères techniques édictés.
Le marathon de Séville qui s’est tenu ce dimanche 23 février a achevé de convaincre les derniers sceptiques : oui, il se passe quelque chose d’étrange au royaume de la course à pied. Avec 30 hommes sous les 2h11, 19 sous les 2h09 et 14 sous les 2h08 - c’est seulement la deuxième fois que cela se produit, après le marathon de Dubaï... un mois plus tôt - les résultats ont de quoi interpeller. Il n’y a plus seulement la vitesse, il y a désormais, aussi, la densité.
Impossible, dès lors, de ne pas regarder vers le bas, vers ces chaussures qui n’en finissent plus d’alimenter le débat. Clairement, depuis quelques mois, voire quelques années, le peloton est divisé en deux : ceux qui portent les fameuses Vaporfly Next% de Nike et les autres. Les chiffres, à ce propos, sont édifiants. Six records du monde battus en moins de deux ans (le dernier en date, ce vendredi 21 février, par l’Éthiopienne Ababel Yeshaneh, auteur d’un chrono de 1h04.31 sur semi-marathon, soit un gain de... 20 secondes), 31 places de podium sur 36 disponibles (hommes et femmes) dans les six plus grands marathons au monde au cours de la saison 2019, contre 25 déjà en 2018, et des listes mondiales voire nationales totalement redessinées par les athlètes chaussés de ce modèle aux couleurs vives (rose, vert et orange) et composé d’une épaisse semelle en mousse compressée, d’une lame de carbone et de coussins d’air. Il y avait assurément de quoi se pencher sérieusement sur la question pour World Athletics (la Fédération internationale d’athlétisme) !
Sa réponse à la polémique, publiée le 31 janvier dernier, était donc très attendue. D’autant qu’il était de plus en plus tentant pour les athlètes d’utiliser le prototype Alphafly (contenant trois plaques de carbone au-dessus d’une semelle de 51 mm) porté par Eliud Kipchoge lors de son marathon non officiel sous les 2 heures à Vienne, le 12 octobre 2019, et de s’engouffrer ainsi dans une sorte de vide réglementaire. World Athletics a donc interdit l’utilisation de prototypes en compétition et a décidé de réguler les caractéristiques techniques des chaussures.
"L’épaisseur de la semelle d’une chaussure de course sur route ne peut excéder 40 mm et il est interdit d’y insérer plus d’une plaque de carbone ou d’un autre matériau", a décrété l’ex-IAAF, condamnant de facto cette Alphafly. "À partir du 30 avril 2020, toute chaussure doit être disponible à l’achat par tout athlète sur le marché pendant une période de 4 mois avant de pouvoir être utilisée en compétition."
Avec un sens du timing qui n’a pas manqué de susciter des interrogations, relatives notamment aux liens étroits entre l’entreprise et son ancien ambassadeur et consultant Sebastian Coe, le président de World Athletics, Nike a présenté dès le 6 février un nouveau modèle appelé à être commercialisé en été : une Alphafly Next% "contribuant à améliorer l’amortissement et l’économie de course" tout en répondant parfaitement aux nouvelles exigences techniques tant pour l’épaisseur de la semelle (39,5 mm) que pour la lame de carbone unique.
Dans la course à l’armement technologique, la marque à la virgule semble donc conserver une, voire deux ou trois longueurs d’avance sur ses concurrents, qui ont à peine le temps de réagir avant le début des Jeux olympiques de Tokyo. Une avance d’autant plus grande que Nike a déposé un brevet d’exploitation concernant cette mousse si particulière qui, en combinaison avec la présence de la plaque de carbone, procure des effets de restitution d’énergie et d’économie à l’effort inédits jusqu’ici…
La différence de rendu d’une marque à l’autre est tellement flagrante que certains athlètes non sponsorisés par Nike avouent, sous couvert d’anonymat, s’équiper chez l’ennemi pour les entraînements, dans un souci de confort pour le pied.
Le détenteur du record de Belgique du marathon, Bashir Abdi, a battu son meilleur temps à deux reprises en étant chaussé des Vaporfly Next%. "J’ai dû m’y habituer au début mais une fois à l’aise, je me sentais non seulement bien dans ces chaussures confortables mais j’avais également le sentiment de mieux récupérer de mes efforts, comme si mes muscles avaient été un peu moins sollicités", décrit-il. Tout est dit !